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« Jouer jusqu’à 40 ans ? On peut l’imaginer, si la santé le permet »

Âgé de 36 ans et déjà vainqueur de deux Grands Chelems en 2017, Roger Federer est en train de remonter le temps.

Roger Federer a fêté le 8 août ses 36 ans, mais il a toujours l’allure d’un jeune premier. Le Suisse semble même plus fort que jamais, après avoir emporté la planète tennis dans un tourbillon depuis son retour à la compétition à Melbourne, le 16 janvier 2017. Le recordman du nombre de titres du Grand Chelem a épaté son monde – ainsi que lui-même – avec ses victoires à l’Australian Open, Wimbledon, Indian Wells et Miami. Et il peut même briguer un retour à la première place du classement ATP à l’US Open, où il sera l’un des grands favoris. Entretien.

Roger, vous vivez une année 2017 de rêve. Comment l’expliquez-vous ?

« Cette année 2017 est effectivement magnifique. Je ne vois pas comment j’aurais pu faire mieux. Je vais partir refaire un break pendant six mois et j’espère que chaque come-back sera aussi fantastique que celui-ci ! (sourire). Plus sérieusement, si j’ai choisi de m’éloigner des courts l’été dernier après Wimbledon, ce fut avant tout pour des raisons de santé (NdlR : il avait été opéré du ménisque et souffrait de douleurs au dos). Cela n’avait rien à voir avec mon jeu. Je désirais simplement être en pleine forme afin de rivaliser avec les meilleurs et de pouvoir jouer sept fois cinq sets. C’était tellement dur l’année dernière et nous avons énormément travaillé pour revenir. »

Roger Federer
Roger Federer© Reuters

Vos résultats vous surprennent-ils ?

« Oui, je suis très surpris du déroulement de mon année, de ma gestion des moments difficiles sur le court et de mon niveau de jeu au quotidien. Je pensais pouvoir à nouveau briller, mais pas à ce point. Vous aussi, vous auriez ri si je vous avais dit que j’allais gagner deux Grands Chelems cette saison. Ma victoire à l’Australian Open fut une immense surprise. Ensuite, j’ai réussi à enchaîner avec Indian Wells et Miami. J’ai eu beaucoup de chance à Miami contre Berdych et Kyrgios, avant de disputer une autre grande finale contre Nadal. Mon objectif était d’être en pleine forme pour la saison sur gazon. C’est incroyable ! »

Votre dernier titre en Grand Chelem avant les deux de cette année remontait à 2012. Vous avez toujours cru que vous en regagneriez un jour ?

« Oui, j’y ai vraiment cru. Mais pour moi, il était aussi important que mon équipe y croie. Je ne dois pas être seul à porter l’équipe, c’est l’équipe qui doit me porter la plupart du temps, car ce sont les quelques pourcent où elle fait la différence. Lorsque vous doutez, votre entourage est là pour vous rassurer. Lorsque vous planez, il vous ramène les pieds sur terre. J’ai d’ailleurs posé la question à tous les membres de l’équipe et la réponse a été la même : ils considéraient que si j’étais en bonne santé, bien préparé, motivé, alors tout était possible. »

Vous pourriez même redevenir n°1 mondial à l’US Open. Qu’est-ce que cela représenterait ?

« Si je peux choisir, je préférerais terminer l’année en tant que n°1. Je pourrais alors partir en vacances et ce serait cool. (sourire) Cela se joue entre Rafa (NdlR : Rafael Nadal) et moi. Je ne sais pas combien Rafa tient à terminer l’année à cette place de n°1, ou s’il désire simplement y rester pour un petit temps. Mais bon, il est clair que redevenir n°1 est quelque chose de grandiose, particulièrement à un stade avancé de ma carrière. »

Roger Federer : le style, c'est l'homme.
Roger Federer : le style, c’est l’homme. © BELGAIMAGE

Vous pouvez également arriver à 20 titres du Grand Chelem à New York…

« Remporter mon troisième titre du Grand Chelem de l’année à l’US Open et le 20e de ma carrière serait complètement fou ! Je n’ai jamais joué dans le nouveau stade Arthur Ashe, vu que j’ai manqué la dernière édition. Il y aura un changement de balles également, qui va permettre pas mal de styles de jeu différents. Tout cela me motive. J’espère simplement que je serai en pleine forme (NdlR : il avait ressenti des douleurs au dos dans sa finale à Montréal contre Alexander Zverev). »

Quelles sont les qualités qui ont fait de vous un tel champion ?

« Je pense qu’à ce stade, c’est principalement la régularité. J’ai toujours été un joueur de grands courts, de grands rendez-vous. J’étais toujours à la peine sur le court n°18, je ne sais pas pourquoi. J’ai toujours considéré que je ne touchais pas aussi bien la balle que sur le court central. Et je me disais que c’était une bonne chose, que cela me servirait lorsque j’affronterais les meilleurs, ou lors de grands matches. J’ai rêvé grand aussi. Et je me suis entraîné très dur et de façon intelligente. J’ai eu de la chance d’avoir beaucoup de talent, mais j’ai dû beaucoup travailler, car le talent, ça ne vous donne pas tout. »

Qu’est-ce qui vous motive à continuer ? Vous avez dit que ce n’était pas les records…

« Je ne sais pas. L’amour du jeu. Mon épouse est entièrement d’accord pour que je continue. Elle est mon supporter n°1. Aujourd’hui, mes quatre enfants sont tous présents. Mes garçons n’ont aucune idée de ce qui se passe, c’est assez drôle. Pour eux, c’est juste un terrain de jeu, mais j’espère qu’un jour, ils comprendront. Jouer devant eux, en tout cas, est très spécial. Et puis, j’aime encore m’entraîner et voyager. Vu que je joue un peu moins, j’ai l’impression de travailler à mi-temps. C’est génial pour toute la famille ! »

Peut-on imaginer vous voir jouer jusqu’à 40 ans ?

« On peut l’imaginer, si la santé le permet. Je pourrais prendre 300 jours de congé et simplement me préparer pour Wimbledon. Je me mettrais dans un frigo et j’en sortirais. Je ne risquerais pas d’être blessé. (sourire) Mais disputer Wimbledon et le gagner, ce n’est pas la même chose. Si on veut continuer à gagner, il faut jouer un minimum, car c’est en match que l’on voit vraiment ce que l’on vaut. Je n’ai pas encore pris de décision à long terme, si je serai encore là aux Jeux Olympiques de Tokyo, par exemple. Je me vois être à Wimbledon l’an prochain, mais c’est encore loin et il n’y a aucune garantie quand on a 35 ou 36 ans. »

Serge Fayat

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