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Entretien avec Andy Murray: « Cette opération à la hanche a changé ma vie ! »

Andy Murray effectue son retour à Wimbledon, en double, six mois après avoir pensé devoir dire définitivement adieu au tennis. Vainqueur au Queen’s à son tournoi de rentrée avec l’Espagnol Feliciano Lopez, l’ancien n°1 mondial, 32 ans, espère redevenir à terme compétitif en simple, mais gagner n’est plus sa priorité.

Andy, comment vous sentez-vous à l’idée de vous produire à nouveau sur le sacro-saint gazon de Wimbledon ?

« Je ne m’attendais pas vraiment à être dans cette situation. Je ne savais pas ce qu’allait donner cette autre opération, comment j’allais me sentir, mais je dois avouer que cela a été génial. Cela a changé ma vie ! Je me considère chanceux et je me sens plutôt détendu. Je me réjouis de revenir, mais je ne me fixe pas d’objectif, car le seul fait d’être à nouveau sur un court de tennis et de ne pas avoir de douleurs suffit à mon bonheur… »

Vous venez pourtant de triompher au Queen’s, à votre tournoi de rentrée, avec Feliciano Lopez. Vous êtes-vous épaté vous-même ?

« Oui. C’est une grande surprise. J’ai gagné le tournoi du Queen’s avec Feli (NdlR : Feliciano Lopez) et une hanche en métal ! C’est un peu fou, d’autant que nous n’avions jamais joué ensemble et dû affronter les têtes de série n°1 (NdlR : les Colombiens Cabal et Farah) dès le premier match. Cette victoire a plus de saveur que certains de mes titres en simple. Feli a été exceptionnel. Il a été incroyable au service. J’ai apprécié tous les efforts qu’il a faits, alors qu’il s’était également hissé en finale du simple. Pour ma part, j’ai le sentiment de m’être amélioré à chaque match et surtout d’avoir bien retourné. »

Vous avez même reçu les félicitations d’un certain José Mourinho…

« Il aime le tennis et nous avons discuté un peu. Je l’avais déjà rencontré. Il sait ce que c’est de rester au sommet en sport pendant une longue période. Il m’a souhaité bonne chance et j’ai essayé de savoir s’il comptait coacher Arsenal. (sourire) Mais il n’a rien laissé paraître. »

Vous aviez pourtant dit en quittant Melbourne et avant votre opération, que vous ne deviendriez jamais un joueur de double ?

« Il faut croire qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. (sourire) Il y a deux mois, nous avons discuté avec mon équipe du meilleur moyen de revenir sur les courts en simple et nous pensions que le double serait une bonne option pour me tester. Le double est un peu moins contraignant, même s’il faut être très vif et avoir de bons réflexes. »

Car vous confirmez que vous avez toujours envie de rejouer en simple.

« Mon but est toujours de revenir en simple, en effet. J’ai effectué de gros progrès à l’entraînement et c’est la prochaine étape, mais pour l’instant, je ne fais que des pas de bébé. Je suis encore loin du niveau requis pour être compétitif. J’espère que cela pourra encore être le cas cette année, mais je ne mets pas de pression. Je ne suis pas dans l’obligation de jouer après Wimbledon comme les autres. »

Vous craignez de ne pas y arriver, ou de rencontrer de nouveaux problèmes ? Deux opérations à la hanche, à votre âge, ce n’est pas rien…

« Il est évident que lorsque vous montez sur un court, il y a toujours un risque. J’ai une hanche en métal, et cela peut inquiéter les gens, mais je suis en bonne forme physique et en bonne santé. Ma revalidation a été suivie à la lettre et je me suis beaucoup entraîné. Là, je ne ressens pas de douleurs ou d’inconfort. Rien. Zéro. Bref, je suis optimiste. »

Vous avez tout connu dans votre carrière. Les grandes victoires, la place de n°1, et de sérieuses blessures. Vous auriez facilement pu ranger votre raquette et partir, non ?

« C’est vrai. J’ai d’ailleurs voulu arrêter plusieurs fois lors des dix-huit derniers mois. Je ne prenais plus de plaisir dans le tennis. Gagner n’était même pas amusant. Maintenant, c’est juste sympa. Ce serait bien de remporter à nouveau de grands tournois, comme Wimbledon, mais ce n’est pas donné à tout le monde et il y a plein de gens qui adorent le sport sans être capable de gagner quoi que ce soit. Depuis que j’ai réalisé combien cette opération a amélioré mon quotidien, j’ai un regard différent sur le tennis. J’ai toujours envie d’être compétitif, mais si je ne devais pas y arriver, cela ne me poserait pas de problème. »

Vous avez toujours été réputé pour votre vie plutôt rock ‘n roll sur le circuit. Avez-vous gardé ce rythme ces derniers mois ?

« Oui, j’ai eu le temps de me perfectionner à la PlayStation. (sourire) Plus sérieusement, si je reviens sur le circuit, je tâcherai de plus profiter des villes que je visite. On a la chance d’être dans des endroits fabuleux, parmi les plus beaux de la planète. Et souvent, on passe la plupart de notre temps au club à s’entraîner ou dans notre chambre d’hôtel à commander du room service. Maintenant, les gens ne le réalisent pas toujours, mais si vous voulez faire les choses convenablement, il n’y a pas vraiment d’autre solution. »

On imagine que vos proches, en tout cas, ont dû être contents de vous voir plus souvent à la maison…

« Je ne suis pas si sûr. (sourire) C’est vrai que si je suis là pour aider ma femme avec les réveils à 5h du matin pour nos filles, ma présence est appréciée. Mais pour le reste, je pense que l’on me préfère hors des pieds. »

Avez-vous pris du plaisir à être loin du circuit ?

« Les six à sept premières semaines ont été pénibles. C’était très invalidant. Mais plus vite on parvient à bouger, plus vite on peut être sur pied. À partir des semaines 8 et 9, j’ai pu commencer à faire de plus en plus de choses, des choses que je n’avais pu faire depuis pas mal de temps, comme sortir mes chiens, aller au restaurant avec mon épouse et des amis, jouer au golf ou voir Arsenal perdre. (sourire) J’ai eu une vraie vie sociale. Quoique le golf, ce fut plutôt horrible. Nous avons joué le championnat de notre club à Wentworth, mon frère Jamie et moi. Et j’ai rendu une carte de 101 ! (sourire) Disons que ce fut une belle leçon d’humilité… »

Vous avez déjà réfléchi à ce que ressemblera votre vie après le tennis ?

« Une des aspects positifs de ce que j’ai traversé ces six derniers mois, c’est que cela m’a effectivement donné une idée de ce à quoi ma vie ressemblera après ma carrière. Il y a des choses qui m’intéressent, comme le sport féminin et l’égalité des sexes. Je me suis beaucoup exprimé sur le sujet durant ma carrière. Et j’espère que le jour où je rangerai définitivement mes raquettes, je pourrai consacrer une partie de mon temps à ce genre de cause. »

Au fond, vous pensez que vous pouvez gagner Wimbledon ?

« C’est possible, mais ce sera difficile. Idéalement, j’aurais aimé jouer avec le même partenaire, car à Wimbledon (NdlR : avec le Français Pierre-Hugues Herbert), je vais devoir retourner du côté ‘égalité’, ce qui est différent. La position au filet changera aussi, vu que Feli est gaucher et que l’effet de son service n’est pas le même. J’ai un bon partenaire et s’il joue aussi bien que Feli au Queen’s, pourquoi pas ? De toute façon, cela n’a aucune importance. Ce serait chouette, mais si ce n’est pas le cas, pas de souci. »

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