HOLLANDE SELF-BASHING

Que se passe-t-il au pays des Lumières et des droits de l’homme ? A l’heure où Bruxelles débat de l’impact sur la croissance et sur les élections d’une nouvelle Belgique, gagnante et décomplexée, la France, dans un contre-exemple saisissant, donne d’elle une image que l’on a rarement perçue aussi exécrable. En un seul week-end horribilis, le président s’est empêtré dans le fiasco de la gestion d’une expulsion ; le chef de l’Etat et son Premier ministre ont été conspués par des partisans de leur propre camp à la faveur d’une bravade marseillaise contre l’establishment parisien ; une ministre de la République a été la cible d’une hallucinante attaque raciste par la candidate d’un parti extrémiste qui brigue le titre de première formation de l’Hexagone aux élections européennes de 2014 ; et une pseudo-star de football a, par des propos de charretier, définitivement enterré le rêve black-blanc-beur, version 1998, d’une France métissée et réconciliée…

La plus sensible des questions que soulève ce mael-ström délétère touche à la faculté réelle de François Hollande à diriger la 5e puissance mondiale. Lui qui traînait déjà la réputation d’un serviteur du consensus mou, héritée de ses mandats à la tête du Parti socialiste, a réussi à renforcer cette prévention en intervenant solennellement dans le dossier de l’expulsion de l’écolière rom kosovare Leonarda. Il plaidait pour la fermeté et l’humanité. Il est sorti de sa prestation en direct de l’Elysée affaibli (en offrant la possibilité à l’adolescente de revenir en France alors que le rapport d’enquête certifiait que la loi avait été respectée) et critiquable sur un plan humain (en envisageant, par faveur régalienne, une issue, finalement déclinée, qui prévoyait la séparation de la famille).

Dans L’homme sans com’ (Seuil), le livre que Denis Pingaud, professeur en communication politique à Sciences po, consacre aux ratés du début de la présidence Hollande, le chef de l’Etat français reconnaît que dès lors qu’il a choisi,  » avec le Premier ministre, de laisser la place à une forme d’expertise et de concertation, le récit de l’action publique peut s’en trouver affecté « . Ce n’est pourtant pas ce souci d’une large consultation préalable à la décision, marqueur également de la  » méthode Di Rupo  » en Belgique, qui hérisse mais le constat qu’à de trop nombreuses reprises, François Hollande n’a pas tranché entre les différents protagonistes. Entre le Premier ministre Ayrault et le ministre de l’Intérieur Valls, entre ce dernier et sa collègue de la Justice Taubira…

Cette fébrilité a fini de brouiller le discours de la gauche française, déjà historiquement divisée sur des dossiers comme l’immigration, la fiscalité ou la dialectique compétitivité/emploi. Or l’époque, marquée par la crise économique, l’incertitude sociale et le doute idéologique, requiert plus qu’auparavant la fixation d’un cap et de repères. François Hollande se montre aujourd’hui incapable de répondre à cette attente légitime d’une majorité de Français et écrit, pour les socialistes à la présidentielle de 2017, la chronique d’un naufrage annoncé. Une gauche en perdition, une droite sans leadership, une extrême droite de plus en plus manipulatrice : décidément, la France, cette grande nation, mérite mieux que ce piètre spectacle.

de Gérald Papy

 » La fébrilité de François Hollande a fini de brouiller le discours de la gauche française « 

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