Carla et Sarko : les coulisses d’un faux scoop

Deux mois à peine après l’annonce de son divorce, le président français décide d’afficher son idylle avec sa nouvelle amie, la chanteuse Carla Bruni. Le Vif/L’Express vous raconte comment les politiques utilisent leur vie privée et manipulent la presse people.

Il l’avait promis, juré, craché en mai 2005 : plus jamais il n’étalerait sa vie privée devant les médias. C’était au moment de sa séparation d’avec Cécilia Sarkozy. Mais le président français, communicant débridé, n’a pas résisté aux sirènes de la  » pipolisation « . Deux mois à peine après l’annonce de son divorce, il se laisse photographier, en toute décontraction, dans les allées de Disneyland, en banlieue parisienne, en compagnie de sa nouvelle amie, Carla Bruni. Ce jour-là, une dizaine de paparazzis étaient en  » planque  » devant le domicile de la chanteuse, compositrice et ancien top model : depuis plusieurs semaines circulaient des rumeurs sur une liaison sentimentale du chef de l’Etat avec la star d’origine italienne. Les photographes se sont contentés de suivre le cortège de Sarko jusqu’au parc d’attractions. Là, le couple s’est mêlé aux centaines de badauds qui assistaient à la parade de Noël, créant un véritable happening. La belle et le président se sont laissé photographier par les curieux, concurrençant les animations du parc. Ils ont même dormi sur place, avec belle-mère et enfants.

Entre-temps, il n’aura fallu que quelques instants aux paparazzis pour négocier au prix fort (entre 20 000 et 40 000 euros selon les titres) avec trois magazines people, Point de vue, Paris-Match et Closer, un reportage photo qui allait déclencher une mini-tornade médiatique, relançant du même coup, de manière spectaculaire, le débat sur la vie privée du président de la République. Aucun éditorialiste de la presse hexagonale ne conteste le goût de Sarkozy pour la beauté et le talent. Certains sont même troublés par la ressemblance entre Carla et Cécilia : regard perçant, charme, timidité… En revanche, beaucoup trouvent un peu grosse la ficelle de la révélation de l’idylle entre  » Mickey  » Sarkozy et  » Minnie  » Bruni. Le choix du moment de cette annonce est vu comme un artifice de communication pour faire oublier la polémique sur la visite de Kadhafi à Paris.  » A la trogne d’un dictateur libyen succède comme par miracle le minois d’une belle Italienne « , remarque le chef du service politique d’un grand quotidien régional français.  » A défaut d’incarner les Pères Noël sur le pouvoir d’achat des Français, Nicolas Sarkozy leur raconte des histoires de princesses charmantes « , commente l’un de ses confrères.

Une certitude : il faut à Sarkozy une image glamour, qui fasse rêver.  » Les tribulations de sa vie privée lui assurent la longévité dans l’espace public, sans tenir compte des frontières et des oppositions idéologiques, commente Benoît Grevisse, spécialiste des médias à l’UCL. Le people nous impose la notoriété du personnage, alors que l’homme politique doit convaincre pour être populaire  » (1). Pour le journaliste Jean-François Kahn, fondateur et ancien directeur de l’hebdomadaire Marianne, Sarko souffre du  » complexe Kennedy  » : comme JFK, qui avait une liaison avec Marilyn Monroe, il affiche sa relation avec une star. Le cadre de l’officialisation du coup de foudre, le royaume de Mickey, illustre, une fois encore, le rêve américain du président libéral. Le voilà aussi qui pratique l' » ouverture  » à domicile : Carla Bruni, artiste bobo et intello, a voté Ségolène Royal au printemps dernier et s’est récemment prononcée contre l’utilisation de tests ADN dans le cadre du regroupement familial et de l’immigration choisie.

De toute évidence, les flashs de Marne-la-Vallée n’ont pas heurté le chef de l’Etat, qui devait emmener le plus officiellement du monde Carla Bruni, le 20 décembre, à Rome, à l’occasion d’une visite officielle en Italie. La chanteuse va sans doute aussi accompagner le président pendant son séjour en Egypte entre les fêtes. Si l’on savait déjà qu’il n’y a pas de politique sans personnalisation, force est de constater qu’avec Nicolas Sarkozy il n’y a pas de personnalisation sans  » pipolisation « . Il s’applique à gérer au cordeau sa communication, notamment quand celle-ci touche à son intimité. Au nom de la transparence et de sa  » proximité  » avec les Français.

Une analyse approuvée par les photoreporters de tous les pays, lancés sur les traces d’autres proies. Dans le collimateur de la presse people, Ségolène Royal, tout d’abord. L’ancienne candidate socialiste à la présidentielle excite, depuis sa séparation avec François Hollande, l’intérêt d’une presse prête à payer le prix fort pour les toutes premières preuves de sa  » nouvelle vie « . Cécilia Sarkozy est l’autre piste que suivent assidûment une poignée de photographes : l’ex-première dame de France devrait ainsi avoir les honneurs de la presse people dans les jours qui viennent.

(1) Médiatiques, automne 2005.

Pascale Gruber, Elisabeth Mertens, Olivier Rogeau et Renaud Revel

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