Immo et eau font la rime

La brique a toujours fait bon ménage avec l’élément aquatique, qu’il s’agisse d’une mer, d’un lac ou d’un fleuve, comme à Namur, doublement parée en la matière.

Dans toutes les villes qui ont les pieds dans l’eau, la proximité de celle-ci, qu’elle soit physique ou visuelle, est généralement prisée par les candidats-acquéreurs. Il y a bien sûr quelques exceptions – Bruxelles, par exemple, dont les bords du canal sont moins bien cotés que d’autres quartiers – mais Namur, elle, n’échappe pas à la règle. Et ce, d’autant plus qu’elle a la particularité d’être érigée au confluent de deux fleuves : la Meuse et la Sambre, le premier étant toutefois plus couru que le second (lire l’encadré).

A la Belle Epoque, déjà, la vallée mosane se pare de grosses villas de villégiature unifamiliales dont le style s’inspire tant des cottages anglo-normands que des chalets suisses, bâties par de riches bourgeois bruxellois, carolorégiens ou liégeois en mal de campagne. Des biens de seconde résidence, donc, qui vivent surtout à la belle saison, leurs volets étant clos l’hiver. Aujourd’hui, ces dites villas mosanes sont une petite centaine à avoir traversé les ans – et les démolitions – et se laissent découvrir sur les quelques kilomètres séparant Wépion et ses environs de Namur, de part et d’autre de la chaussée de Dinant (à Wépion et La Plante) ou le long du boulevard de la Meuse (à Jambes).  » Elles ont été minutieusement répertoriées et protégées par la Ville de Namur, explique Philippe Taillet, de la branche namuroise du réseau d’agences Latour et Petit. Les candidats à leur acquisition savent qu’ils ne pourront pas effectuer de travaux structurels, ni toucher à leurs façades.  » Or, ces grosses bâtisses présentent souvent un bilan énergétique peu performant et nécessitent des transformations importantes pour être remises aux normes actuelles.  » Ce type de bien est par définition un achat coup de coeur « , sourit le courtier.

Il est amusant de constater que ceux qui  » craquent  » pour pareilles villas de nos jours sont les mêmes que ceux qui les ont édifiées plus d’un siècle auparavant…  » Ce sont des gens de 40 à 50 ans, d’un certain niveau de réussite sociale et professionnelle, des professions libérales pour beaucoup « , observe Philippe Taillet.  » Rarement des Namurois, mais plutôt des Bruxellois ou des Brabançons-wallons, qui choisissent de quitter la ville, la pollution et les embarras de circulation pour le vert et le calme des bords de Meuse « , ajoute Pierre Closon, de l’agence Trevi éponyme. La raison ?  » La concurrence est rude sur le marché du prestige à Namur. Il y a pas mal de biens disponibles et les acquéreurs locaux dont le budget leur permet de se tourner vers ce segment leur préféreront des maisons plus contemporaines, mieux équipées, faites de matériaux performants et de qualité.  » C’est que, outre l’aspect énergétique, le charme désuet des villas mosanes est loin de correspondre aux standards actuels de confort.  » Elles comptent au moins trois ou quatre chambres mais bien souvent une seule salle de bains… « , pointe Philippe Taillet.

Autant de  » pour « , mais surtout de  » contre « , qui pèsent sur leur prix.  » Avant 2008, les villas mosanes partaient à des tarifs allant jusqu’au million d’euros, estime Philippe Taillet. Désormais, les acquéreurs sont plus raisonnables. On est autour de 300 000 à 400 000 euros à Wépion et entre 500 000 et 700 000 euros au confluent.  » Pierre Closon acquiesce :  » Le marché du prestige a souffert de la crise pour reprendre un peu de couleurs cette année. Mais on est loin d’être revenus aux prix de 2007, ce que certains vendeurs, attentistes, ne veulent pas assimiler.  » Conséquence ?  » Compte tenu de leurs attentes parfois démesurées, le matching ne se fait pas forcément entre les parties.  » Les mises en vente ne sont pas nombreuses, mais cela n’empêche pas certains biens de s’attarder sur le marché jusqu’à s’en trouver…  » brûlés « .

Appartements : l’ancien au prix du neuf

Après les villas de villégiature et plus… récemment, c’est au tour des résidences à appartements de se multiplier le long de la Meuse. Celles-ci colonisent ses deux rives depuis les années 1960-1970, au prix, parfois, de la démolition de leurs illustres ancêtres.  » C’est aussi pour cela que la Ville de Namur a décidé de protéger son patrimoine, note Pierre Closon. C’était les belles années de l’immobilier et les promoteurs ont acquis des villas mosanes à la pelle pour ensuite faire table rase et élever des complexes mixtes résidentiels et commerciaux à leur place.  » Désormais, l’urbanisation des bords de Meuse est sous contrôle strict. Ce qui est loin de freiner les appétits des promoteurs ; même si, comme le fait remarquer Philippe Taillet,  » depuis un an, le marché se minimise un peu « .  » On construit beaucoup pour une ville aux dimensions de Namur. Il existe des limites au marché, malgré tout, sans compter un effet crise qui se rappelle plus ou moins à lui selon les ans.  »

Le dernier grand projet en date est celui d’Atenor, sur le site du Port du Bon-Dieu.  » Très ambitieux, il s’agit selon moi d’un des plus grands projets en bord de Meuse, commente Pierre Closon. Et un beau pari, puisqu’il cible un quartier en devenir, à l’image de ce qu’Atenor a fait à Tour & Taxis, à Bruxelles. Le Port du Bon-Dieu était un chancre, une vieille usine désaffectée coincée entre la voirie ferroviaire et l’avenue Albert Ier.  » Un pari qui semble en bonne voie d’être relevé, assurent à l’unisson les deux courtiers.  » Le projet se construit en trois phases. La première est en train de sortir de terre, pour une livraison en juin 2015, tandis que nous venons à peine de lancer la commercialisation de la troisième phase « , souligne Philippe Taillet. Bilan ?  » Sur les 135 appartements, 40 sont d’ores et déjà vendus.  » A des acquéreurs tout droit venus de Charleroi, Liège, Bruxelles ou du Brabant wallon ; des investisseurs pour la plupart, et des seniors troquant ce faisant leur grande maison en périphérie namuroise.

Le tout à des prix… bords de Meuse.  » Le marché namurois est pour beaucoup constitué d’appartements neufs, qui se monnaient entre 2 000 et 2 500 euros le mètre carré, poursuit le courtier. Mais le long de la Meuse, les tarifs grimpent à… 3 000 euros le mètre carré, voire jusqu’à 3 500, 3 750 et même 4 000 euros pour les plus beaux.  » A cela s’ajoutent un garage et une cave – quelque 17 000 à 25 000 euros de plus – et la TVA (21 %). Rien d’étonnant, dès lors, à ce que beaucoup se rabattent sur l’ancien, espérant y rencontrer des sommes plus abordables. Que nenni.  » L’ancien s’écoule à des prix équivalents à ceux du neuf, pour autant que l’état et l’orientation du bien soient bons « , glisse Pierre Closon. Soit quelque 3 000 euros le mètre carré en moyenne, auxquels il faut ajouter, outre cave et garage, les droits d’enregistrement (12,5 %).

Par Frédérique Masquelier

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