Le Verdi des familles

Sous la houlette d’Ivan Törzs et de Guy Joosten, Luisa Miller, de Verdi, nouvelle production de l’Opéra de Flandre, met du bonheur dans les voix

Luisa Miller, à l’Opéra de Gand, du 11 au 19 octobre. Tél. : 070 22 02 02 ; www.vlaamseopera.be

Inspirée de la pièce Kabale und Liebe (1784), de Friedrich Schiller, Luisa Miller (1849), de Verdi, représente le premier exemple significatif de la  » nouvelle veine  » du compositeur à l’époque. Adieu les fresques historiques – ce qui n’empêche pas ici la présence d’un message social fort -, bienvenue à l’intimisme et à l’investigation psychologique, avec, en tête des préoccupations, celle qui allait tarauder Verdi toute sa vie : qu’est-ce qu’être père ? C’est à travers la subjectivité de deux pères – et les règles de deux mondes – que Guy Joosten fait progresser l’action, opposant l’univers dépouillé des Miller, guidé par un amour quasi désincarné, et celui de Walter, regorgeant de richesses et de séductions.

Placés de part et d’autre d’un bâtiment de verre constituant l’axe d’un immense plateau tournant, les pôles sont reliés entre eux par le bureau de l’intendant félon, campé ici comme un maniaque minable, plus obsédé par la savante découpe de la pomme qui fera son dix-heures, que par la conquête de la belle Luisa…

Costumes intemporels (Klaus Bruns), décors de Johannes Leiacker passant, selon la famille, du futurisme clinique aux scènes de genre (immenses natures mortes évoquant l’abondance d’un automne tyrolien, galerie de trophées, fourrures et soies…), fine direction d’acteurs – en dépit de l’indécrottable pessimisme de Joosten sur notre pauvre humanité -, le théâtre qui soutient la nouvelle production du Vlos ne manque ni de force ni d’idées. Quant à la musique, si la direction de Törzs, directeur musical de la maison, nous laisse une nouvelle fois sur notre faim par ses nombreux désordres et son manque de tension, la distribution enchante, et tout particulièrement la soprano Fiorella Burato, dans le rôle-titre, idéale dans ce répertoire par la puissance, la lumière et l’agilité de sa voix, comédienne et musicienne accomplie. Un bonheur. Avec le ténor américain Carl Tanner (Rodolfo, sensible et vaillant), le baryton Bruno Caproni (Miller, ovationné), la basse Askar Abdrazakov (Walter), le baryton Urban Malmberg (impayable Wurm), Graciela Araya (pulpeuse Frederica), le ténor Eric Raes, et, confirmation d’un nouveau talent belge, la soprano Anja Van Engeland.

Martine D.-Mergeay

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