Kompany, fauché en plein vol

Alexandre Charlier
Alexandre Charlier Journaliste sportif

Le joyau du football belge ne brille pas à Hambourg. A 20 ans, il est sur le flanc, opéré au tendon d’Achille

Le 28 avril dernier, Roger Vanden Stock déclarait que Vincent Kompany était  » l’un des 5 meilleurs joueurs mondiaux, avec Messi, de Barcelone « . Une bonne dose d’intox, sans doute, de la part du président du Sporting d’Anderlecht, mais un avis non dénué d’un fond de vérité. A l’époque, l’Europe entière semblait vouloir se payer les services du prodige du football belge. Etonnant, car Vincent sortait de plusieurs mois d’inactivité consécutive à une énième blessure. L’épaule après le dos et l’aine. La poisse.

Lors de sa convalescence au Centre européen de rééducation du sportif (CERS) de Saint-Raphaël en France, il croise des émissaires de l’Olympique de Lyon, nouveau riche d’Europe. Son patron, Jean-Michel Aulas, a un faible pour le défenseur d’Anderlecht, club ami. Lyon, donc, pour Vincent, qui a décidé de partir ? Non. Cela coince. Une histoire de gros sous et des sentiments non intensément partagés font capoter une union pourtant naturelle. Ce ne sera pas davantage Chelsea ou le FC Barcelone de Frank Rijkaard. A quelques heures de la clôture des transferts : coup de théâtre. Hambourg dribble la concurrence et dépose les millions aux pieds de Saint-Guidon. Combien ? Rien d’officiel mais Anderlecht, c’est certain, n’est pas floué. On flirte au minimum avec les 10 millions d’euros, tenant compte de l’évolution de la carrière du joueur.

Mais d’évolution, il n’y en a guère eu depuis que Hambourg, à la dérive en Ligue des champions et humilié en Bundesliga (17e), a pris le pari de troquer Daniel Van Buyten (Bayern de Munich) pour Vincent Kompany. Accueilli en seigneur au HSV avec une vareuse frappée du numéro 10, le Bruxellois affiche depuis des statistiques désastreuses : 6 petits matchs joués en quatre mois. Une nouvelle fois, ce sont des pépins physiques qui l’empêchent d’exprimer la pleine mesure de son insolent talent.

Début novembre, le corps de Vincent Kompany craque. Le tendon d’Achille de la jambe gauche, cette fois. Le 9 novembre, il passe sur le billard dans une clinique de Bâle, opéré par le Pr Bernhard Segesser, assisté par le Dr Dierk du SV Hambourg. Outre le tendon d’Achille, les spécialistes en profitent pour  » renforcer un muscle de la région « , signale le communiqué officiel du club, annonçant une  » indisponibilité jusqu’à la fin février 2007 « . Si le pronostic est bon, ce ne serait qu’une paille. On peut revenir plus fort d’une blessure, même d’un tendon à ce point sensible. Mais l’on s’inquiète.

Silence réfléchi

Les blessures font partie de la vie des sportifs de haut niveau. A 20 ans, on se remet parfaitement de ce genre d’opération. Thierry Henry et Ruud van Nistelrooij ont tous deux souffert d’un mal similaire, sans pour autant hypothéquer leur carrière grâce à un traitement approprié. Mais s’agissant de Vincent Kompany, les questions fusent. Le grand public songe désormais davantage à ses déboires corporels qu’à ses exploits sur le terrain. L’a-t-on  » carbonisé  » à Anderlecht en le faisant trop jouer pour son âge ? Et puis, n’a-t-il pas commis une erreur, l’été dernier, en choisissant l’Allemagne et son très exigeant championnat afin de donner une nouvelle impulsion à sa carrière ? Questions sans réponses sérieuses tant les paramètres sont nombreux. Une chose est sûre : sa carrière parmi les Diables rouges, où un rôle de leader lui était naturellement dévolu, est mise entre parenthèses.  » Je sais depuis longtemps qu’en football, un jour, vous êtes le meilleur et, le lendemain, le plus mauvais, avance-t-il. Je ne cherche pas d’excuses car les résultats ne plaident pas en ma faveur. Les journalistes ont le droit de donner leur avis. Je préfère ne pas réagir car je n’en ressortirais pas plus fort. Je ne mélange pas Hambourg et l’équipe nationale. J’essaie de faire rejaillir le positif de l’un sur l’autre, contrairement au négatif que je laisse de côté.  »

De Jacques Lichtenstein, son manager, à son paternel Pierre, le clan Kompany encaisse difficilement une certaine réalité belge consistant à monter en épingle ce qui ne va pas. Plusieurs quotidiens ont fait le bilan des blessures de Vincent, avec des audacieux montages où les dates le disputaient aux flèches… Réalité crue, amalgames et commentaires plus ou moins définitifs s’étalent sur des pleines pages. Cette  » médiocrité  » a incité notre homme à se murer dans un silence parfaitement réfléchi. Il laisse passer l’orage en s’accrochant à un but : rejouer. Il se fait ainsi très rare dans la presse belge. Et ce n’est pas innocent.

La Belgique ne peut se permettre de se brouiller avec l’un des plus grands talents qu’elle ait connus. Il tarde à Vincent de faire parler son talent sur le terrain. De défier un jour le génial Argentin de Barcelone Lionel Messi – blessé lui aussi, pour le moment – en Ligue des champions. Osons ouvrir nos agendas…

Alexandre Charlier

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