Olivier Rogeau

Quand Europol alimente le discours anxiogène

Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Pourquoi l’organisme européen basé à la Haye en remet-il une couche sur la menace terroriste  » d’ampleur  » qui pèse sur les citoyens européens ?

« Oyez, oyez, bonnes gens, les terroristes de Daesh préparent de nouvelles attaques de grande ampleur contre vous ! » Tel est, en version crieur public médiéval, l’avertissement inquiétant qu’Europol a lancé cette semaine, communiqué repris tel quel par tous les médias. En ces temps de discours politiques et policiers anxiogènes, qui nous martèlent qu’il faut s’habituer à vivre avec la menace permanente d’un attentat, l’organisme européen basé à La Haye devait-il en remettre une couche ?

Son directeur, Rob Wainwright, assure que l’Etat islamique a développé « une nouvelle capacité de combat pour effectuer une campagne d’attaques d’ampleur concentrée sur l’Europe. » Le rapport publié par Europol, fruit d’un séminaire entre experts des 28 Etats membres de l’Union européenne, précise que les terroristes viseront en priorité les « cibles molles », donc les simples citoyens rassemblés dans des lieux culturels, des centres commerciaux, des restaurants, des cafés, des gares, des bus, des ferries… Leur objectif : faire un maximum de victimes, « avec l’impact que cela génère. »

Le bureau de police européen veut-il semer la panique dans la population, faisant ainsi le jeu de Daesh

Que cherche Europol en diffusant de tels messages ? Le bureau de police européen veut-il semer la panique dans la population, faisant ainsi le jeu de Daesh, qui poursuit le même but ? Si l’intention d’Europol est d’inciter les Etats membres à renforcer la lutte antiterroriste et la collaboration entre polices européennes, n’y a-t-il pas d’autres moyens que d’alimenter ainsi la spirale de la peur dans la société civile ?

D’autant que, sur le fond, les conclusions du rapport sont d’une banalité et d’une indigence consternantes. Elles ne font qu’enfoncer une succession de portes ouvertes. Que « révèle » ce rapport, concocté par un bataillon d’experts ? Que les attaques de masse comme celles du 13 novembre à Paris peuvent être interprétées comme une nouvelle phase dans la stratégie de Daesh. Que les terroristes utilisent désormais, outre des Kalachnikovs, des ceintures d’explosifs. Que les futurs attentats de l’Etat islamique viseront des personnes et des lieux particulièrement vulnérables à ces attaques. Et que les opérations ne seront pas nécessairement centralisées et commandées depuis la Syrie, une grande liberté étant laissée aux leaders locaux dans la planification des projets. Vous avez dit révélations ?

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