» La marque Eddy Merckx est sous-exploitée « 

Administrateur délégué de Brantano pendant quinze ans, Kurt Moons dirige les cycles Merckx depuis septembre 2010. Interview.

Le Vif/L’Express : Au moment du rachat des cycles Merckx, en 2008, Sobradis a annoncé son intention de moderniser et de rajeunir l’entreprise. C’est toujours votre leitmotiv ?

Kurt Moons : Eddy Merckx a créé l’entreprise. Il a bossé dur, a développé de très bons vélos. Mais concernant la vente elle-même, son action est restée limitée. Il s’est surtout concentré sur le Benelux, le Japon et les Etats-Unis. De plus, le marché des vélos a connu une révolution au cours des années 1990, le passage des cadres en aluminium vers des cadres en carbone. Cette transition-là n’a pas été très bien négociée. Depuis le rachat de l’entreprise, nous misons tout sur le développement de nouveaux modèles en carbone, tout en travaillant pour rénover, rafraîchir la marque.

Pieter Vansynghel, votre prédécesseur au poste d’administrateur délégué, a comparé la réputation des vélos Merckx à celle des Mercedes : fiables, mais ennuyeux.  » Nous voulons transformer ces Mercedes en Porsche, rendre nos vélos à la fois branchés, à la mode, sélects et sérieux « , disait-il. C’est aussi votre état d’esprit ?

Je n’ai pas employé moi-même cette expression. Comparer des vélos et des voitures, cela me semble dangereux. Mon objectif, c’est de donner à la marque Eddy Merckx une identité propre, sans avoir besoin de nous référer à une marque de voitures. Cette identité combine l’émotion liée à la figure d’Eddy Merckx avec la qualité de nos produits. Nous fabriquons des vélos de course, par nature tournés vers la performance, mais nous veillons aussi à la sécurité des coureurs. Certaines marques ont été si loin dans la recherche de la légèreté à tout prix que les vélos en deviennent dangereux. Nos vélos ne sont peut-être pas les plus légers du marché, mais ils sont étudiés pour rester stables. Cela correspond d’ailleurs à une volonté d’Eddy Merckx lui-même.

Envisagez-vous d’exploiter la marque Eddy Merckx dans d’autres domaines que la fabrication de vélos ?

C’est une possibilité. A terme, il n’est sûrement pas exclu d’adapter la marque à d’autres produits, et de la diffuser parmi des publics qui n’ont pas envie de rouler sur des vélos de course. On pourrait par exemple s’intéresser au textile, et à tout ce qui concerne le temps libre. Mais il n’est pas question de développer nous-mêmes les produits. L’idée serait plutôt de vendre à d’autres entreprises la licence pour utiliser la marque, comme c’est déjà le cas avec les chaussures. Il y a un potentiel. Je me suis rendu avec Eddy Merckx aux Etats-Unis, notre directeur des ventes l’a accompagné en Australie : partout, des centaines de personnes lui demandent un autographe. La marque Eddy Merckx est encore sous-exploitée. Nous allons essayons de changer ça dans les années à venir.

Eddy Merckx ne sponsorise plus aucune formation de l’élite mondiale, alors que les coureurs de l’équipe Quick Step ont roulé sur vos vélos les deux saisons passées. Pourquoi ?

L’opération était peut-être prématurée. J’en retiens ceci de positif : cela a montré que des coureurs de haut niveau pouvaient gagner avec nos vélos. Mais cela coûtait très cher, c’était difficilement tenable. Au niveau opérationnel, cela s’est également avéré compliqué de gérer toutes les contraintes liées au suivi d’une équipe Pro Tour. Nous l’avons fait mais, pour le moment, notre entreprise est trop petite pour endosser une telle charge.

Constatez-vous une différence entre le marché francophone et le marché flamand ?

La Flandre représente un cas unique au monde. L’intérêt pour le cyclisme y est gigantesque. Dans chaque commune, on trouve un marchand de vélos. Mais l’effet Philippe Gilbert joue beaucoup en Wallonie : la popularité du vélo y est grandissante.

ENTRETIEN : FRANÇOIS BRABANT

 » Partout, des centaines de personnes lui demandent un autographe « 

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