La love story américaine

Depuis la guerre froide, les Etats-Unis soutiennent les Frères musulmans, quand les autorités belges les classent  » groupe à suivre « .

Entre les Frères musulmans et les Etats-Unis, c’est une vieille histoire. Dans Une mosquée à Munich (JC Lattès, 2011), le prix Pulitzer américain Ian Johnson révélait comment les Etats-Unis avaient utilisé les réseaux musulmans du Reich, après la Seconde Guerre mondiale, pour déstabiliser les républiques musulmanes d’URSS et s’attirer les bonnes grâces du tiers-monde. Doctorant à Cologne, Saïd Ramadan, gendre d’Hassan el-Banna, fondateur des Frères musulmans, fut longuement  » traité  » par l’antenne allemande de la CIA. L’agence américaine rêvait d’en faire le porte-parole des Occidentaux dans le monde musulman. L’inverse se produisit : le futur père de Hani et de Tareq devint la tête de pont des Frères en Europe.

Après le 11-Septembre, l’on découvrit  » que les auteurs des attentats avaient basculé dans l’extrémisme sous l’influence idéologique des Frères musulmans dont le message utopique les avait séduits en leur apprenant à séparer l’humanité en deux camps : les croyants et les infidèles  » (Ian Johnson). Une période de froid s’ensuivit mais, en 2005, l’administration Bush décida de réintégrer les Frères dans son jeu.

Les 15 et 16 novembre 2005, l’islamologue Michaël Privot participa, avec 64 autres musulmans belges, à un colloque organisé par le Département d’Etat ( » Les communautés musulmanes prennent une part active à la société : un dialogue américano-belge « ). Converti à l’âge de 19 ans, le Verviétois était alors vice-président du Forum de la jeunesse musulmane européenne, une organisation FM financée par les Saoudiens. Depuis, la stratégie américaine consistant à choyer la nouvelle génération des Frères ne s’est pas démentie, que cela plaise ou non aux autorités belges. Dans son rapport 2012 sur les libertés religieuses dans le monde, le Département d’Etat a volé au secours d’un conseiller communal de Verviers, Hajib El Hajjaji, exclu du CDH pour avoir soutenu une  » soeur « , conseillère au CPAS soudainement voilée.

La politique de la main tendue

Qu’ils soient républicains ou démocrates, les ambassadeurs américains en poste à Bruxelles ont toujours appliqué cette politique de la main tendue. Ainsi, lors de la rupture du jeûne du ramadan, l’ambassade US reçoit large. En toile de fond, il y a toujours des frérots. Parfois, c’est plus discret. Le 18 juin 2012, des FM belges (ou apparentés) présentèrent à Farah Pandith, la déléguée spéciale d’Hilary Clinton auprès des communautés musulmanes, ce qui allait devenir, le 23 avril 2013, l’asbl Empowering Belgian Muslims (EmBeM). Plusieurs futurs cadres furent expédiés aux States en stage d' » empowerment « , une technique permettant à des groupes fragiles ou discriminés de se prendre en charge.

Le 19 février dernier, le Bruxellois Taoufik Amzile, administrateur d’EmBeM et président de l’Association belge des professionnels musulmans (ABPM), prit la parole au Sommet international de lutte contre la radicalisation violente, à Washington, en présence de Barack Obama et de Jan Jambon, ministre de l’Intérieur (N-VA). Son message  » Faites-nous confiance  » venait juste après la dénonciation de la  » violence systémique  » (inégalités, islamophobie) que subiraient les jeunes musulmans de Belgique. Une offre de service ambiguë. Jamais à court d’idées, l’ambassade américaine organisa, le 24 février dernier, une rencontre en mémoire du militant noir américain Malcolm X, fondateur de Nation of Islam. Etaient présents une palette de musulmans, dont Yasmine Kherbache (SP-A), ancienne cheffe de cabinet d’Elio Di Rupo (PS), qui a démissionné récemment du poste de cheffe de groupe socialiste au conseil communal d’Anvers. Depuis 2013, elle souhaite que son parti revienne sur l’interdiction du voile dans la fonction publique de la métropole.

M.-C.R.

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