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Immersion au coeur d’une communauté mennonite

Stagiaire Le Vif

Le photographe espagnol Jordi Ruiz Cirera est parti en Bolivie à la rencontre d’une communauté mennonite. Son projet a pour but de montrer les relations et le rôle de la famille au sein de la communauté. Par ses photos, il représente également la profonde isolation des mennonites de la société contemporaine.

Jordi Ruiz Cirera est parti à la rencontre des mennonites de Bolivie en 2010. Il a récemment expliqué dans une interview accordée à Slate.fr qu’il était « curieux de savoir comment vivait ce genre de communauté, quel était son mode de vie et quelles étaient ses motivations ». C’est lors d’un deuxième voyage qu’il a réalisé ses portraits.

Le mennonitisme est un mouvement de chrétiens anabaptistes qui apparaît parallèlement à la Réforme protestante. En 2018, on comptait 2,13 millions de mennonites répartis dans 86 pays. Ils se trouvent principalement au Canada, aux Etats-Unis et au Mexique. En Europe, c’est en Suisse et en Allemagne qu’ils sont le plus présents.

Les mennonites sont très mobiles car ils doivent échapper aux persécutions religieuses et politiques de certains pays. La communauté de l’Est de la Bolivie s’est installée dans les années 1950. Ses membres proviennent du Canada, du Mexique ou encore du Belize. Ils se sont établis dans l’espoir de préserver leurs traditions et de mener une vie simple. Jordi Ruiz Cirera explique qu’il est très difficile de connaître leur nombre exact car beaucoup d’entre eux ne possèdent pas de papiers d’identité. Le gouvernement estime qu’ils sont environ 50.000.

Immersion au coeur d'une communauté mennonite
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La colonie est délibérément éloignée et difficile d’accès : vivre loin des villes est un moyen de renforcer le sens de leur communauté. Ils mènent une vie plutôt calme et subsistent à leurs besoins via l’agriculture. Il est cependant nécessaire pour eux d’établir des relations commerciales avec la société moderne alentour. Leur principale source de revenus réside d’ailleurs dans la vente de lait et de fromage.

« Les barrières linguistiques et culturelles étaient très difficiles à surmonter » explique le photographe. En effet, les membres de la communauté ne parlent qu’un dialecte allemand et seulement quelques-uns connaissent l’espagnol puisqu’ils commercent avec les Boliviens.

Les mennonites pratiquent le « baptême du croyant », c’est-à-dire une fois adolescent ou adulte. Ils proscrivent l’usage des armes et tout signe de technologie (voiture, téléphone, électricité, …). Ils ne boivent pas d’alcool et ne votent pas, car ils ne reconnaissent pas la séparation de l’Église et de l’État. Les familles sont en général nombreuses puisqu’ils n’utilisent aucun contraceptif. En moyenne, elles sont composées d’une dizaine d’enfants.

Les adultes se rendent tous les dimanches à la messe. Les enfants restent à la maison puisqu’ils ne sont pas encore baptisés. Lors de son voyage, Jordi Ruiz Cirera n’a pu assister à la messe puisqu’il ne fait pas partie de la communauté. Il est alors resté auprès des enfants et c’est ainsi qu’il a constaté qu’ils n’ont pas beaucoup de jouets pour se divertir. Ce sont principalement des figurines agricoles (vaches, cochons, …). Ils n’ont ni jeu de cartes ni jeu de société.

Chaque famille de mennonites fabrique elle-même ses vêtements. Toute la communauté s’habille de la même façon pour que personne ne soit supérieur à un autre.

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La communauté dispose d’un magasin qui fonctionne comme une coopérative. C’est un endroit où ils peuvent trouver tout ce dont ils ont besoin et qu’ils ne savent pas produire eux-mêmes (conserves, tissus, …). Il arrive qu’ils doivent se rendre à Santa Cruz, ville proche de la communauté, pour obtenir des articles plus difficiles à trouver mais la plupart d’entre eux n’aiment pas s’y rendre.

Bien que le gouvernement ait octroyé à la communauté un territoire et une liberté religieuse, celui-ci renforce de plus en plus le contrôle environnemental. Les mennonites ne savent plus abattre les arbres nécessaires à leurs constructions et au chauffage et craignent l’affluence croissante de la population locale. À cause de cela, certains membres de la communauté ont décidé de partir dans l’espoir de fonder une nouvelle colonie davantage isolée du monde. Mais il est de plus en plus difficile de trouver de nouvelles terres à exploiter et les mennonites redoutent leur extinction.

Les photos de Jordi Ruiz Cirera sont disponibles sur son site.

Loreline Dubuisson

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