En rase campagne

Michel Delwiche
Michel Delwiche Journaliste

2014 sera une grande année électorale, avec des votes pour la Région, pour l’Etat et pour l’Europe. Conséquence : les candidats ne pourront plus sautiller d’une campagne à l’autre, ils devront choisir où ils se présentent.

La décision de dissocier les élections régionales et fédérales, grande victoire des régionalistes, date de 1993, dans la foulée de l’accord sur l’élection directe des députés régionaux. Elle n’est entrée en application que dix ans plus tard, en 2003 avec les fédérales, et en 2004 avec les régionales. Une application tardive, mais logique dans un Etat fédéral où les entités sont autonomes et traitent (théoriquement, du moins) de matières spécifiques. Mais le modèle belge a immédiatement souffert d’une particularité de notre vie politique : l’absence de grands partis nationaux qui fait que, même pour une élection fédérale, à l’échelle de tout le pays donc, les partis traditionnels ne s’adressent qu’à leur communauté, dont ils s’engagent à défendre les seuls intérêts. Tout comme aux élections régionales.

Elio Di Rupo et les autres

Une confusion entretenue par l’omniprésence des mêmes candidats à toutes les échéances. Les exemples ne manquent pas. Les Montois, sans remonter trop loin, ont trouvé en tête de liste du PS Elio Di Rupo pour les communales de 2006, les législatives de 2007, les régionales de 2009, les fédérales de 2010, et le retrouveront menant la liste municipale de 2012. Pareil à Namur avec le CDH Maxime Prévot : rendez-vous avec le bon peuple en 2006, 2007, 2009, 2010, 2012, du communal au fédéral, puis au régional, retour au fédéral où il décide ne pas siéger pour rester à la Région, et rebond vers les communales. Le MR Jean-Luc Crucke, bourgmestre de Frasnes-lez-Anvaing, a lui aussi été de toutes les campagnes : alors qu’il était député wallon, il s’est fait élire député fédéral en 2007, puis réélire député wallon en 2009, puis s’est représenté aux fédérales de 2010 (en queue de liste, il est vrai).

Ces belles séries sont stoppées dans leur course. En faisant tomber le gouvernement avant terme, et donc en provoquant des élections un an plus tôt que prévu, l’Open VLD a fait coïncider les fins de législatures. La fédérale actuelle, d’une durée de quatre ans, a en effet commencé aux élections de 2010 et se terminera en juin 2014, date qui était déjà prévue pour les prochaines élections régionales après une période complète de cinq ans, tout comme les élections européennes. Et comme l’accord actuel sur la réforme de l’Etat interdit le cumul des candidatures à des élections simultanées, il faudra choisir : soit la Région, soit le fédéral, soit l’Europe.

Sans cette coïncidence (mais en est-ce vraiment une ?), les trois élections n’auraient pu se tenir ensemble qu’en juin 2019. L’accord dont ont accouché les partis qui étaient encore huit veut aller au-delà, et prévoit la simultanéité des élections fédérales et des élections… européennes, soit tous les cinq ans. Pas un mot des scrutins régionaux, sauf pour dire que, après 2014, les entités fédérées pourront décider elles-mêmes de la durée de leur législature, et donc de la date de leurs élections. Grosse ficelle pour tenter d’apaiser les tenants d’un fédéralisme véritable, qui craignent à juste titre que les thèmes de débat soient confisqués par le fédéral, qui aurait également la haute main, ensuite, sur le calendrier post-électoral, dans un poto-poto où la confection de tous les gouvernements de la Belgique (9, en comptant les Commissions communautaires bruxelloises) et de leurs programmes ferait l’objet de marchandages incompréhensibles pour la majorité des électeurs.

MICHEL DELWICHE

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