Des filles… et DSK ?

L’enquête sur le réseau de prostitution qui opérait depuis la Belgique dans des hôtels de Lille pourrait conduire jusqu’à New York. Cité dans le dossier, l’ex-directeur du FMI demande à être entendu.

La malédictionà Le 16 octobre, jour du triomphe de François Hollande, vainqueur de la primaire socialiste en France, Dominique Strauss-Kahn estime, une nouvelle fois, devoir se défendre dans une affaire à caractère sexuel. Il se fend d’un communiqué dénonçant  » insinuations  » et  » extrapolations hasardeuses « , comme il qualifie les informations parues les jours précédents dans la presse. Depuis sept mois, deux magistrats du Nord dissèquent les ramifications d’un réseau de prostitution qui, depuis la Belgique, £uvrait dans trois hôtels de Lille. Et peut-être jusqu’à Paris et New York. DSK demande à être entendu.

Le 28 mars dernier, une enquête est ouverte après un renseignement de la police belge. Au fil des écoutes téléphoniques se dessine une intrigue à la Chabrol : des  » intermédiaires  » et un proxénète fournissent des filles à des clients d’hôtels lillois, ainsi qu’à des notables, sous l’£il bienveillant de policiers. Dominique Alderweireld, dit  » Dodo la Saumure « , apparaît comme le pivot de l’affaire. Ce tenancier de bars à hôtesses implanté en Belgique, où la prostitution est légale, gère une dizaine d’établissements dont ceux animés par sa compagne, Béatrice, Chez Béa et le Low Cost, à Tournai.

En France, le réseau passe par René Kojfer, 70 ans, un ancien vendeur en confection et bonneterie. Ce personnage truculent connu du Tout-Lille peut compter sur de solides amitiés, y compris au sein de la police. En 2000, il a même servi d’intermédiaire lors de la vente du Politel, un hôtel appartenant à une mutuelle de la police, aujourd’hui rebaptisé hôtel des Tours. Il en devient ainsi le  » public relations « , ainsi que du Carlton, un quatre-étoiles du Vieux Lille. C’est ici que René Kojfer, habitué des loges maçonniques, se met en quatre pour organiser les fêtes où se retrouvent des personnalités locales, comme pour l’arrivée du beaujolais nouveau. Les écoutes montrent qu’il rend aussi des services en nature, proposant aux clients les filles de Dodo la Saumure.  » A raison de trois chambres par mois au Carlton et aux Tours « , selon une source proche du dossier. En mai dernier, Dominique Strauss-Kahn est interpellé à New York, soupçonné d’avoir agressé une employée dans la suite qu’il occupe au Sofitel (1). Selon le quotidien La Voix du Nord, René Kojfer se vante alors d’avoir fourni des filles au patron du FMI.  » Il ne fréquente pas les politiques, relativise son avocat, Me Christophe Snyckerte. Il se contentait d’orienter les clients qui souhaitaient passer un moment agréable.  »

Au début d’octobre, une vaste opération judiciaire franco-belge est lancée. Dodo la Saumure et sa compagne sont arrêtés, ainsi que le propriétaire du Carlton, le directeur de l’établissement, René Kojfer et un industriel de Lille. Ils sont aujourd’hui mis en examen et écroués pour proxénétisme. En garde à vue, au moins une prostituée a affirmé avoir rencontré DSK lors d’une partie fine à Paris. Ces affirmations précises font l’objet de vérifications par la police judiciaire.  » Il faut savoir jusqu’où s’étend ce réseau, qui l’a organisé et si des policiers sont impliqués « , prévient Me Frank Berton, l’avocat du directeur du Carlton. Un commissaire lillois de haut rang, proche de DSK, pourrait être prochainement entendu et interrogé sur un éventuel déplacement à New York peu avant l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn.

(1) L’affaire a, depuis, été classée.

Eric Pelletier et Jean-Marie Pontaut

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