Ô Belgique! Ô mère chérie!

Quatre jeunes femmes sont sorties du lot, parmi les nombreux participants au concours photo du Vif/L’Express axé sur le thème de la belgitude.

Les différents jurys ont tranché. Georges Vercheval et Frédéric Pauwels (photographes professionnels), Dorothée Klein et Valérie Gay (respectivement rédactrice en chef et directeur artistique du Vif/L’Express), Stephan De Broyer (rédacteur en chef du magazine de photographie View) età les lecteurs du site Internet du Vif/L’Express ont opté pour un palmarès exclusivement féminin. Quatre jeunes femmes aux fortes attaches wallonnes (elles sont toutes nées en province de Liège ou dans le Hainaut) remportent le concours de photographie lancé par notre hebdomadaire à l’occasion de ses 25 ans d’existence. Les quatre artistes, qui ont décliné le thème choisi (la belgitude) avec exubérance, morosité ou un regard franchement décalé, se partagent des téléviseurs Lenco DVT, des appareils photo Canon EOS et des commandes de reportages dans Le Vif/L’Express, version papier ou Internet. Jusqu’au 25 janvier, des agrandissements des £uvres gagnantes sont en outre accrochés aux cimaises du restaurant Ma belgitude, situé 392, chaussée de Bruxelles, à Waterloo. A titre d’avant-goût, voici quelques-uns des travaux primés (les légendes en italique sont les titres donnés par les auteurs à leurs clichés).

Prix du jury : Stéphanie Pety de Thozée

Elle est née à Liège, elle habite Bruxelles. A 30 ans, Stéphanie Pety de Thozée a fourni un travail photographique mixte,  » métissé « , autant dans la forme que dans le fond. L’artiste est en effet partie de Mai 40, un texte signé Jacques Brel – décédé il y a trente ans -, pour raconter la Belgique d’aujourd’hui, ses crises et son quotidien.  » J’ai choisi cette chanson comme fil conducteur, les paroles complètent les images, les images actualisent les paroles.  » Le résultat reflète la culture melting-pot du pays, sa pérennité, son drôle de folklore et  » notre dérision légendaire qui fait passer les événements avec bonhomie « . Selon la photographe, c’est dans la capitale que s’exprime peut-être le mieux la belgitude. Un vieil homme, mégot au bec, joue de l’accordéon sous des tags. Ailleurs, d’autres graffitis, mêlés à une fresque bédéesque, sert de toile de fond aux rêveries d’un jeune homme adossé à un réverbère, qui date sans doute encore du début du siècle passé. A Bruxelles, ce ne sont pas seulement les races humaines qui se télescopent, mais aussi les époques. Stéphanie Pety de Thozée, que les internautes avaient également élue troisième de leur classement, l’a subtilement compris, en jouant des touches de couleurs  » flashy  » dans l’environnement beige, gris, vert-de-gris de la ville.

Prix de la rédaction : Isabelle Detournay

Ces portraits racontent l’histoire d’une approche de Sioux, prudente et patiente. Un jour d’été, dans son quartier bruxellois d’adoption, l’auteur, Isabelle Detournay (née à à Tournai, voici trente-quatre ans), aborde timidement un buveur en terrasse, sur un trottoir des Marolles. Le courant passe, entre les clients du café hispano-portugais El Carés et cette jeune femme réservée.  » Je photographie un peu, j’écoute beaucoup « , raconte-t-elle, avant d’être de plus en plus sollicitée par les habitués, puis par les habitants du coin. Tissu de grande mixité sociale, le réseau des ruelles coincées derrière la Foire du Midi offre alors un univers  » clos, uni, convivial et sombre à la fois « . Où la vie occidentalisée, pour certains (Belges ou étrangers), n’est  » pas aussi rose qu’on imagine « à

Prix des internautes : Marine Dricot

La benjamine du concours – Marine Dricot a juste 20 ans – a été plébiscitée par l’ensemble des lecteurs du Vif en ligne, loin devant ses concurrents (elle remporte 2 846 votes sur 7 649). Impossible, par définition, de savoir ce qui a motivé le choix d’internautes anonymes. Le cynisme de la jeune photographe d’Alleur ? Sa dérision ? Sa vision d’une Belgique sombre et maussade ? Les clichés de Marine Dricot, où des individus se devinent plutôt qu’ils se montrent (l’ombre d’un passant, la protubérance d’un nez flouà), évoquent un univers terne de solitude et de pluie écrasantes, où la brique des maisons, si palpable, semble isoler définitivement le spectateur hors du monde des vivants. Les habitations ont leurs volets clos, ou à demi baissés. La belgitude nous empêcherait-elle d’avancer ?  » Et si ces artifices, écrit l’auteur, nous plongeaient dans un confort léthargique, une bonne excuse pour se dire que l’on ne pourra rien y changer ? « à

Mention de la rédaction : Laure Geerts

A 30 ans, Laure Geerts jette sur le folklore belge le même regard sans concession que les réalisateurs du documentaire Strip-tease, précurseur de la télé-réalité. Presque plus reporter que photographe, la Schaerbeekoise, née à Oupeye, présente le film figé du traditionnel Cramignon. De l’essayage des costumes aux farandoles finales, c’est toute cette fête estivale, organisée au nord de Liège depuis le xiiie siècle, qui se déroule en dix séquences animées. Distinguée par le public, Laure Geerts a aussi été classée deuxième au vote des Internautes.

Valérie Colin

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