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Négociation fiscale avec le Panama : de la poudre aux yeux ?

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Dans les mesures présentées ce mardi suite aux révélations des Panama Papers, le gouvernement prévoit d’ouvrir une procédure de négociation avec le Panama pour conclure avec cet Etat un accord d’échanges d’informations financières. Pourquoi seulement maintenant ? Et à quand son entrée en vigueur ?

Le ministre Johan Van Overtveldt (N-VA) n’aura pas traîné à réagir au tsunami provoqué par les nouvelles révélations en matière de sociétés offshores, suite à la fuite du bureau-conseil Mossack Fonseca à Panama. Parmi les nouvelles mesures qu’il avance, celle de négocier un accord d’échanges d’informations avec le Panama. Première remarque: pourquoi un tel accord n’existait-il pas déjà ? La Belgique, qui a signé en novembre dernier un accord protégeant les investissements entre les deux pays, semble offrir un traitement favorable au petit Etat sulfureux d’Amérique centrale qu’on sait depuis longtemps être un paradis fiscal. Le Panama ne se trouve même pas dans la liste enfin actualisée en décembre 2015 des paradis fiscaux pour lesquels le fisc refuse toute déduction pour double imposition en raison du régime fiscal très avantageux que ceux-ci offrent aux contribuables belges qui y placent leurs fonds. Il a donc fallu attendre le scandale des Panama Papers pour que le gouvernement prenne la mesure de ce qui se passe au Panama.

Même s’il arrive très (trop) tard et fort opportunément, on peut se réjouir qu’un tel accord soit enfin négocié. On se demande néanmoins quand celui-ci aboutira et entrera en vigueur. Car, même une fois signé (ce qui peut prendre plusieurs mois, voire années), l’entrée en vigueur du texte avalisé peut aussi prendre du temps, beaucoup de temps. Il suffit de consulter la liste des accords signés sur le site du SPF Finances pour s’en convaincre. Si onze de ces accords sont entrés en vigueur (Andorre, Bahamas, Belize, Dominique, Gibraltar, Grenade, Lichtenstein, Montserrat, Saint-Christophe-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-des-Grenadines), dix autres accords signés ne sont toujours pas entrés en vigueur: certains sont relativement récents comme pour les Îles Cook (septembre 2015), Aruba (avril 2014) ou Guernesey (avril 2014); d’autres ont été signés il y a fort longtemps, comme pour Monaco (juillet 2009), Antigua et Barbuda (décembre 2009), Anguilla (septembre 2010) ou les Bermudes (mai 2013). Bref, vu ces délais, la négociation avec Panama pourrait bien n’être que de la poudre aux yeux. D’autant que l’échange automatique d’informations, mis en place par l’OCDE et auquel ont adhéré jusqu’ici 94 Etats, entrera en application dès 2017. Panama n’a pas encore décidé d’y participer, mais vu la pression internationale suite aux Panama Papers, on voit mal comment cet Etat pourra résister.

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