Victime et bourreau

Jodie Foster joue les victimes devenues vengeresses dans un thriller complexe et violent de Neil Jordan.

Jodie Foster est d’autant plus attachée à bien choisir ses rôles qu’elle se fait par ailleurs rare à l’écran, ne souhaitant pas négliger sa famille au profit d’une carrière où elle n’a plus rien à prouver. Avec le personnage d’Erica Bain dans A vif ( The Brave One), l’actrice se confronte à un nouveau et considérable défi. Elle incarne une journaliste de radio new-yorkaise, qui subit une agression brutale alors qu’elle et son fiancé promènent leur chien dans Central Park. Son ami perdra la vie, Erica survivra de justesse. Mais aux blessures physiques s’en ajoutent d’autres, psychologi- ques, dont les effets vont entraîner son basculement du rôle de victime à celui de vengeresse. Par peur de s’aventurer au dehors, elle va se procurer une arme. Et, lorsque de nouveaux agresseurs voudront la prendre pour cible, elle en fera usage, entamant une sanglante série qui mettra presse, police et public en émoi…

Trois films viennent à l’esprit en regardant A vif. D’abord, Taxi Driver, de Martin Scorsese, où la toute jeune Foster jouait une prostituée que Robert De Niro voulait sauver à coups de revolver d’un milieu criminel repoussant. Les Accusés, de Jonathan Kaplan, ensuite, où elle interprétait la victime d’un viol collectif qui poursuivait ses agresseurs par la voie légale et voyait sa vie privée taillée en pièces. Et, bien sûr, Un justicier dans la ville, le film réalisé en 1974 par Michael Winner et où Charles Bronson se transformait lui aussi en  » nettoyeur  » urbain, après l’ignoble traitement réservé à sa femme et à sa fille par deux voyous. Nettement plus complexe que ce dernier film, où l’on put voir une apologie pure et simple de la  » justice  » privée, A vif nous plonge profondément dans la psychologie d’une femme confrontée à une épreuve terrible, et qui porte sur ses propres agissements vengeurs un regard évidemment ambigu. Le jeu du chat et de la souris qu’elle va jouer avec un policier de plus en plus soupçonneux est fascinant à suivre, d’autant que Terrence Howard offre une réplique de qualité à une Jodie Foster au sommet de son art.

Derrière la caméra, Neil Jordan distille habilement tension, suspense, éclats de violence et réflexion sur un sujet délicat entre tous. Foster a choisi elle-même de confier la réalisation du film au cinéaste irlandais de The Crying Game. Une bonne idée, contribuant de faire d’ A vif un spectacle aussi prenant que propice à prolonger l’éternel débat entre justice et vengeance personnelle. l

L.D.

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