Michel Delwiche

Communauté française : une institution à l’avenir incertain

Michel Delwiche Journaliste

Ce 27 septembre, c’est la fête de la Communauté française, rebaptisée Fédération Wallonie-Bruxelles, une appellation qui n’a pas plus de sens que la précédente. L’avenir de cette institution semble incertain, au-delà des concerts de circonstance. Elle a connu, et connaîtra, des dépeçages.

Selon la Constitution, et sans trop entrer dans le casse-tête institutionnel propre à la Belgique et que le monde entier, quoi qu’on en dise, ne nous envie pas, les Communautés sont compétentes pour

-les matières culturelles (culture, sports, médias et loisirs) ;
-l’enseignement ;
-les « matières personnalisables » (santé, aide aux personnes…).


Saint-Quentin, 1ère. Mais quand, en 1993, la Belgique devient officiellement un Etat fédéral, constitué (article 1er de la Constitution) de Communautés et de Régions, la Communauté française doit déjà se dépouiller et, en application des accords intrafrancophones dits de la Saint-Quentin, céder certaines de ses compétences à la Région wallonne et à la COCOF (Commission communautaire française de la Région de Bruxelles). Ou plutôt -nuance admirable!- doit-elle céder « l’exercice » de ces compétences, car les Régions ne peuvent, dit encore la Constitution, hériter des attributions communautaires. Dans les faits, on assiste bel et bien à la régionalisation du tourisme, des infrastructures sportives, du transport scolaire, de l’aide sociale, de certains aspects de la politique de santé, des politiques des immigrés, des handicapés et du 3e âge. Les budgets correspondants ne seront transférés qu’en partie, histoire de donner un peu d’air à la Communauté.

Saint-Quentin, 2e. Le mécanisme se répète pour l’instant, 20 ans plus tard, dans le cadre de l’actuelle 6e réforme de l’Etat, qui prévoit de transférer du fédéral aux entités fédérées la politique de l’emploi, la gestion des soins de santé, de l’aide aux personnes et des allocations familiales. L’emploi va aux Régions. Normal, elles étaient déjà compétentes en la matière. Le reste va aux Communautés, puisqu’il s’agit de matières personnalisables. Mais la logique régionale s’impose aussitôt: pour éviter que, sur le territoire de la Région bruxelloise, il puisse y avoir des traitements différents selon l’appartenance (à déclarer) à l’une ou l’autre des Communautés (flamande ou française), l’accord sur la réforme de l’Etat prévoit de confier l’exercice des nouvelles compétences à la Cocom (Commission communautaire commune de la Région bruxelloise). Et les partis francophones, cohérents, décident dans la foulée de confier à la Région wallonne les mêmes responsabilités. Le mécanisme de Saint-Quentin dépouille la Communauté française pour la 2e fois. D’habits qu’elle n’a même pas eu le temps de déballer.

Saint-Quentin, 3e. Depuis des années, des voix réclament en Wallonie que l’enseignement puisse être différencié en fonction des réalités du terrain. Cette revendication est aujourd’hui partagée par les Bruxellois. Rudy Vervoort (PS), le nouveau ministre-président, plaide ainsi pour un enseignement bilingue à Bruxelles. C’est-à-dire régional, organisé conjointement par les Flamands et les francophones. Pour lui, l’enseignement doit favoriser un sentiment d’appartenance bruxellois. C’est une nouvelle donne, et elle est d’importance. On ne pourra plus faire l’impasse sur ce débat qui devrait provoquer un 3e dépouillement.

Saint-Quentin, 4e. C’est pareil pour la culture, elle aussi déterminante d’une appartenance, d’une identité. Le Manifeste pour la culture wallonne, qui a 30 ans cette année, a été rejoint par le Manifeste bruxellois, qui revendique la multiculturalité de la capitale. Sans s’exclure l’un l’autre.

Mais que restera-t-il donc demain à la Communauté française pour se couvrir décemment? Une équipe cycliste et la RTBF ?

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