LES PARTIS FLAMANDS POUSSÉS À SE DISTANCER DE DI RUPO IER

Ce 6 décembre, le gouvernement Di Rupo a fêté son deuxième anniversaire. L’exécutif n’est devenu une véritable équipe que fin 2012, une équipe qui n’a atteint sa vitesse de croisière qu’au cours de cette année. Avant cela, il était un rassemblement de partis condamnés à travailler ensemble à partir d’un choix négatif. Mais en 2013, Di Rupo Ier est devenu un projet positif, porté par des partis croyant en eux-mêmes et en leur gouvernement. Maintenant que les élections approchent, ces partis – surtout côté flamand – reprennent davantage de distance.

En 2012, un gouvernement Di Rupo II paraissait exclu. En 2013, cette possibilité a refait surface. En 2014, nous verrons bien. Le choix porte en premier lieu sur les différentes visions politiques. Mais aussi sur la manière d’aborder les problèmes. Soit via des mesures progressives, censées produire les effets souhaités à plus longue échéance via de larges compromis : c’est le modèle B, avec le B de Belgique, comme prôné par Di Rupo Ier. Soit via des décisions plus prononcées, plus radicales, censées être payantes à plus court terme, par le biais d’un changement de cap radical : c’est le modèle A, avec le A d’Anvers, comme illustré par la coalition anversoise de Bart De Wever. La manière dont nous décrivons les problèmes auxquels les prochains gouvernements devront faire face contribuera à déterminer quelle approche politique finira par l’emporter.

En Flandre, surtout via la lutte sans merci qui anime le centre-droit, la gravité de la situation du pays fait l’objet d’âpres discussions. Si l’on en croit l’analyse la plus retentissante, promue par la N-VA et populaire dans le monde flamand des entreprises, auprès de nombreux think tanks ou experts, les tableaux de bord de la Belgique révèlent quantité de problèmes structurels importants. Cette analyse mène à la conclusion qu’après les élections, il s’agira d’intervenir avec fermeté, par une réduction drastique de l’appareil public, des charges et impôts, par des investissements ciblés et des mesures draconiennes dans de nombreux domaines. Car, poursuit-on le raisonnement, le gouvernement actuel a repoussé devant lui trop de réformes structurelles embarrassantes.

C’est la N-VA qui entend intervenir de la manière la plus radicale, mais elle n’est pas la seule à énoncer des variations sur ce thème. L’Open VLD souscrit également à ces visions, mais il présente son libéralisme comme étant plus généreux et plus social. Il ne peut pas non plus attaquer Di Rupo Ier de front, même s’il qualifie certains impôts instaurés par ce dernier de harcèlement. Cela illustre bien l’aversion qu’éprouve le centre-droit flamand à l’égard de la politique fiscale du gouvernement actuel. Jusqu’à présent, le CD&V n’a formulé qu’un seul point de rupture : l’élimination du handicap salarial, qui ne peut être atteinte que par le biais d’un allégement des charges. Une telle approche représente une baisse des revenus de la sécurité sociale qu’il est difficile de compenser puisque le CD&V entend aussi réduire d’autres impôts. Tous les partis de centre-droit en Flandre prônent des économies substantielles, mais avant les élections, aucun ne précise concrètement où ces économies doivent être réalisées.

Certains affirment aussi en Flandre que la Belgique résiste bien et que nous nous tirerons d’une mauvaise passe sans devoir recourir à des mesures de crise susceptibles d’occasionner trop de dégâts collatéraux. Mais en Flandre, la lutte est surtout menée sur le volet compétitivité, par le centre-droit. Dans le discours qui en résulte, l’électeur flamand est surtout préparé à l’idée qu’après le 25 mai 2014, dans de nombreux domaines, il s’agira de prendre des décisions stratégiques qui forceront le citoyen à prendre davantage ses responsabilités. La concurrence avec la N-VA force le CD&V et l’Open VLD à garder leurs distances par rapport à Di Rupo Ier. Une évolution qui pourra encore se poursuivre au cours des prochains mois.

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Retrouvez la chronique de Thierry Fiorilli le lundi à 7 h 20 sur Bel-RTL Matin.

par Carl Devos Politologue à l’Université de Gand.

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