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Witsel, Hazard, De Bruyne, Martínez: le point sur ces Diables qui posent encore question

Leur avenir – proche ou lointain – avec les Diables est rempli de points d’interrogation: Axel Witsel, Eden Hazard, Kevin De Bruyne. Roberto Martínez aussi. Avec quel impact sur notre EURO?

Ça n’a surpris personne. À plusieurs moments, dans les matches contre la Grèce et la Croatie, les cadres absents nous ont manqué. Quand il fallait distribuer efficacement face aux Grecs, on aurait bien eu besoin d’ Axel Witsel. Quand il fallait emballer les échanges via une action individuelle, quand il était nécessaire de donner un caviar sur un coup franc ou un corner, Eden Hazard et Kevin De Bruyne auraient été bien utiles. Il faut donc faire avec ces défections, dans un premier temps. Pour résumer, Witsel ne sera pas disponible en début d’EURO, Hazard sera là, mais pas encore prêt pour jouer des matches complets, et De Bruyne reste un point d’interrogation (moins inquiétant). Comment faire sans eux dans un premier temps? Et à partir de quand notre équipe pourra-t-elle vraiment compter sur ce trio au top de sa forme? On fait un point détaillé.

Fin mars, on a commencé à voir une petite ouverture, à penser à l’EURO. »

Thierry Witsel

Pour Witsel, l’EURO a tenu à « un fil »

« Pour le moment, il y a zéro chance de voir Axel à l’EURO. » Déclaration de Thierry Witsel dans la presse le 22 janvier, une dizaine de jours après la blessure de son fils. Logiquement, médicalement, on ne peut pas disputer un tournoi cinq mois après s’être déchiré le tendon d’Achille. Mais Axel Witsel est proche du but. Roberto Martínez pense qu’il pourrait être opérationnel à partir du troisième match. Comment ce miracle a-t-il été rendu possible? Thierry Witsel nous explique tout.

« Quand j’ai dit qu’il avait zéro chance d’aller à l’EURO, c’était la réalité à ce moment-là. On n’avait aucun paramètre pour dire qu’il y avait un espoir. On ne voulait pas non plus se faire de faux espoirs et retomber de haut. Directement, Axel a relativisé en disant qu’il y avait des choses plus graves dans la vie, il sait qu’il est béni des dieux parce qu’il a sa première blessure grave à 32 ans. Mais par rapport à l’EURO, c’était catastrophique. C’est la première chose qu’il a eue en tête: pas de championnat d’Europe. Il s’est directement mis focus sur la préparation avec Dortmund. »

La première bonne nouvelle a été enregistrée sur la table d’opération à Anvers. « Déjà, ce n’était pas une rupture totale, comme Christian Benteke avant le Brésil. Quand c’est total, tu hurles à mort, tu as la cheville qui gonfle et le mollet qui double de volume. Chez Axel, il y avait encore un tout fin fil qui tenait le talon. Et quand le chirurgien a ouvert, il a vu que le tendon était encore en plus ou moins bon état. En général, il est effiloché, ça part dans tous les sens. C’est entre autres grâce à ça qu’il a pu revenir plus vite que prévu. Et grâce au régime qu’il s’est imposé. Après quinze jours de repos total, il a attaqué chez Lieven Maesschalk, il avait deux heures d’exercice deux fois par jour. Il a tout fait en Belgique, il n’est jamais retourné à Dortmund, le club a été d’accord pour qu’il fasse le boulot ici. Il a aussi fait des gros efforts au niveau de son alimentation. Souvent, quand un footballeur a une blessure de longue durée, il se laisse un peu aller. Lui, il a fait super attention et il est encore plus mince qu’avant sa blessure. Au fur et à mesure de sa rééducation, on a commencé à voir des petits signes encourageants. Semaine après semaine, il prenait un peu d’avance sur le programme. Vers fin mars, on a commencé à voir une petite ouverture, à penser à l’EURO. »

Sans masque, Kevin De Bruyne pourra-t-il aborder franchement les duels?
Sans masque, Kevin De Bruyne pourra-t-il aborder franchement les duels?© BELGAIMAGE

Après ça, il y a eu le retour sur le terrain. Avec les inévitables appréhensions. « Les premières fois où il a retouché le ballon, il avait des réticences, peur de frapper trop fort, peur que ça ne tienne pas. C’est très bien qu’il ait pu reprendre des entraînements avec ballon avant le rassemblement des Diables. Ainsi, quand il est arrivé à Tubize, il n’avait plus ces a priori. » La semaine passée, il a participé à peu d’entraînements collectifs. Il a surtout passé du temps avec un préparateur individuel. « Le but était de retrouver ses sensations de course, de placement, les automatismes spécifiques à un numéro 6. Les courses latérales, vers l’avant, vers l’arrière, le positionnement par rapport au ballon. Physiquement, à part le manque de rythme, il est déjà très bien. Maintenant, il doit retrouver sa deuxième accélération. Il est revenu plus vite que prévu, mais il faut rester vigilant. Roberto Martínez ne lui met pas la pression. Le troisième match, c’est un objectif réaliste. »

Pour De Bruyne, c’est dans la tête

En milieu de semaine dernière, à Tubize, Roberto Martínez expliquait que Kevin De Bruyne ne devrait finalement pas être opéré et que c’était une bonne nouvelle. « S’il avait subi une opération, il n’aurait pas joué l’EURO. » Finalement, une petite intervention a eu lieu, au niveau de l’orbite. Elle n’a duré qu’une vingtaine de minutes. Dans la foulée, il a hérité d’un nouveau trophée de meilleur joueur de Premier League. Une consolation pour un gars qui, psychologiquement, est dans le dur.

« Il était terriblement déçu après la finale de Ligue des Champions », nous confie son clan. « À cause de sa blessure, mais aussi parce qu’il était conscient que c’était un rendez-vous unique dans sa carrière. Il se voyait gagner la Ligue des Champions, puis enchaîner avec un gros truc à l’EURO. Maintenant, par rapport au championnat d’Europe, il ne doute pas. Il sait que les Diables ont un très gros potentiel et qu’un joueur comme Romelu Lukaku, plus que les autres encore, brûle d’envie de faire quelque chose de grand. Il n’aime pas parler d’un rôle de favori pour les Belges, ça dépend trop des adversaires qui viendront en phase d’élimination directe. »

Kevin ne fait pas tout un plat de la faute de Rüdiger, il dit que ce sont des choses qui arrivent dans le foot. »

Un proche

KDB avait fait son programme d’après-finale: une semaine de repos total dans sa maison du Limbourg. Les plans ont été chamboulés avec cet accident de jeu. Il a eu sa dose de vaccin lundi de la semaine dernière, comme les Diables casernés à Tubize. Puis quelques jours en famille avec femme, enfants, soeur, mère et père. Entre-temps, des contrôles médicaux, toujours en concertation avec les toubibs de City. Ses parents se demandent si, sans masque, il pourra aborder franchement les duels. Par contre, son entourage est tout à fait rassuré sur son état physique.

Le message posté par les réseaux sociaux par son bourreau, Antonio Rüdiger, a été apprécié par le Diable. « Kevin n’en fait pas tout un plat, il dit que ce sont des choses qui arrivent dans le foot », nous dit encore son entourage.

Hazard en plan B dans un premier temps

Eden Hazard a été prêt avant tout le monde. Il a été le tout premier Diable, lundi de la semaine dernière, à affronter les questions de la presse, tout en début de rassemblement à Tubize. Et il a fait du Eden Hazard, détendu, souriant. Et optimiste. Morceaux choisis: « Je suis content d’être ici (…) Être avec l’équipe nationale m’a manqué (…) Je suis heureux quand je suis sur le terrain. » La conclusion de cette rencontre: « Je me sens bien. On joue notre premier match le 12 juin, j’espère être totalement prêt à ce moment-là. »

Avec ce qu’il s’est passé entre cette conférence de presse et aujourd’hui, on en est moins sûr. Le lendemain, quand les Diables sont montés sur le terrain d’entraînement, il manquait à l’appel. En milieu de semaine, Martínez a affirmé qu’il ne jouerait pas contre les Grecs, mais qu’il devrait être là contre les Croates. Et là, dimanche, il a attendu la 57e minute pour partir à l’échauffement, la 82e pour monter sur la pelouse. Quelques touches de balle plus tard, le match était terminé. Sans qu’on ait pu se faire une idée de son niveau.

On imagine mal qu’il soit lancé au feu dès le match contre les Russes, ce week-end. On le voit plus dans un rôle de réserviste de luxe, que Martínez exploiterait pour faire basculer les choses. Surtout après ce que Jérémy Doku a montré face aux Grecs. Ce n’est pas comme si on n’avait pas de plan B valable. Le but est clairement de laisser Hazard monter en puissance, de lui permettre de revenir calmement à niveau, pour les rencontres qui suivront. Le dernier match complet qu’il a joué était en novembre 2019, en Liga. Une semaine plus tôt, il avait disputé sa dernière rencontre complète avec les Diables. Le retard physique est évidemment colossal.

Witsel, Hazard, De Bruyne, Martínez: le point sur ces Diables qui posent encore question

Martínez, ni oui ni non

Partira, partira pas? Ce qu’on sait: Roberto Martínez est sous contrat jusqu’à la fin du Mondial au Qatar, soit décembre 2022. Ce qu’on devine: il suscite énormément d’intérêt dans des clubs européens du top. Ce qu’on ne sait pas et qu’on aimerait savoir: a-t-il envie d’autre chose? On fait le point avec son agent, Jesse De Preter.

« Quand il a prolongé jusqu’en fin d’année prochaine, on n’a jamais pensé qu’il risquait de partir avant ça. Seulement voilà: le carrousel n’arrête pas de tourner et il est sur la short-list de plusieurs grands clubs. Encore plus dans une période où l’Inter, Tottenham et d’autres doivent choisir un nouveau coach. Je mens si je dis qu’il n’y a pas eu d’intérêt et des demandes plus ou moins concrètes depuis trois ans. Parfois, c’est allé très loin. C’est normal parce qu’il fait partie des dix coaches les plus populaires dans le monde. Il montre de quoi il est capable depuis cinq ans avec les Diables, il y a eu le parcours à la Coupe du monde, il a prouvé qu’il savait travailler avec des stars internationales et qu’il avait une grande flexibilité tactique.

On n’exclut rien, s’il y a une opportunité. Mais ça ne veut pas dire qu’il quittera l’équipe nationale après l’EURO. Le timing pour un départ n’est pas très bon non plus. Il ne décidera rien avant la fin du tournoi, et à ce moment-là, les grandes équipes qui cherchent un entraîneur auront déjà fait un choix. Point de vue préparation, ce n’est pas un souci, ces clubs pourraient attendre. Même chose en matière de transferts parce que le marché ne devrait vraiment s’ouvrir que fin juillet. Mais pour leur image, ils ne peuvent pas se permettre d’attendre, de passer une partie de l’été sans qu’on sache qui va entraîner chez eux. Donc, des décisions vont être prises avant la fin de l’EURO. »

Avec Roberto Martínez, on n’exclut rien, s’il y a une opportunité. »

Jesse De Preter, son agent

Jesse De Preter insiste beaucoup sur la situation confortable de son client. « Ce qu’on vit pour le moment, c’est une situation exceptionnelle avec deux grands tournois en un an et demi. Ça n’arrivera probablement plus jamais. Roberto Martínez a travaillé dans des bons clubs en Angleterre, mais aussi dans des moins bons. Il est conscient de la chance qu’il a d’entraîner une équipe qui est à la première place du ranking FIFA et qui sera peut-être encore numéro 1, ou au pire numéro 2, au moment de la Coupe du monde au Qatar. Il est dans une position de luxe. Il y a une énorme différence entre un joueur ou un entraîneur qui doit chercher un nouvel employeur, et un footballeur ou un coach qui est toujours sous contrat et se plaît beaucoup dans ce qu’il fait. J’ai un autre client qui est dans une position comparable: Jason Denayer a aussi des offres de grands clubs, mais il lui reste un an de contrat à Lyon, un club de haut niveau. Donc, il est tranquille, il a les cartes en mains. Quand tu es considéré comme le meilleur défenseur central de Ligue 1, tu peux te permettre d’attendre les offres, de les analyser à ton aise, et de tout refuser au final si tu estimes que ta vie à Lyon est plus intéressante. J’ai connu des situations plus compliquées avec lui! »

Eden Hazard, futur réserviste de luxe à l'EURO?
Eden Hazard, futur réserviste de luxe à l’EURO?© GETTY

Concrètement: si une grosse écurie fait une offre à Roberto Martínez après l’EURO, partira-t-il? « Il n’est pas à la recherche d’autre chose. On ne provoque rien. Mais il écoute, j’écoute aussi. S’il me dit qu’il veut se casser, je prends l’avion et je vais négocier pour lui. Mais non, il n’est pas occupé à regarder le marché. Il est pleinement focus sur l’EURO. Est-ce qu’il rêve d’entraîner un grand club européen? Oui, clairement. La presse espagnole m’a appelé récemment en me faisant remarquer que son grand ami Jordi Cruijff était conseiller du président du Barça et que ça pourrait jouer pour Martínez. Est-ce qu’il est candidat pour entraîner le Barça? Oui, mais pas avant 2022. Il ne dira jamais non au Barça ou au Real, où il y a déjà eu des discussions. Il a le profil parfait pour Tottenham, il remplit tous les critères, comme trois ou quatre autres coaches. Il est sur leur short-list, mais pour le moment, c’est Mauricio Pochettino qui négocie là-bas. Est-ce qu’il peut gagner plus ailleurs? Évidemment. Il peut avoir deux fois plus qu’à la Fédération. Mais ce n’est pas son premier critère parce qu’il est indépendant financièrement. »

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Le cas Martínez et l’impact possible sur le groupe

Partir à un tournoi avec un sélectionneur dont l’avenir est un sujet de conversation, ça rappelle la Coupe du monde 2002. On se souvient que Robert Waseige avait activé une bombe dans le car qui transportait l’équipe vers Paris, où elle allait prendre l’avion pour le Japon. Il avait alors annoncé aux joueurs qu’il quitterait l’équipe nationale dès la fin du tournoi pour retourner au Standard. Johan Walem, qui était sélectionné, se souvient de cette période particulière.

« Beaucoup de personnes avaient compris sa décision, d’autres moins et ce sont celles-là qui ont été très dures dans leurs critiques. Je garde surtout le souvenir que pour lui, c’était une libération. On voyait depuis longtemps que ça devenait difficile. Juste avant de partir, on avait gagné en préparation contre la France à Paris, ça avait un peu calmé la situation, mais globalement, c’était très compliqué à cause du traitement médiatique qu’on lui faisait vivre. Ça allait trop loin, il ne pouvait plus le supporter. Il avait envie de se retrouver dans une vie qui lui convenait sans doute mieux.

Roberto Martínez n’a jamais eu de problèmes avec la presse belge. Mais on doit se souvenir que ça n’a pas toujours été comme ça chez nous. Un coach flamand était facilement pris en grippe par la presse francophone, et inversement. Grâce à nos résultats à la Coupe du monde, on a su ramener un peu de sérénité sur cette question-là. Mais je n’ose pas imaginer comment ça se serait passé si on s’était plantés au Japon. Waseige aurait encore plus dégusté. Comme Martínez risque de prendre des attaques si les Diables foirent leur EURO. Peut-être qu’on lui reprochera alors de ne pas avoir été complètement transparent sur ses projets et son avenir.

La décision de Waseige a probablement eu un impact sur le comportement des joueurs au Japon. On voyait à ses mimiques et à son comportement en général qu’il était à cran. Tu as des gens qui savent cacher ça, tout prendre sur eux, ne pas dégager d’émotions vers l’extérieur. Lui, il n’en était pas capable. On se retrouvait au quotidien face à un entraîneur sous pression. Et un Waseige sous pression, on sait ce que ça pouvait donner. Il pouvait être très piquant, ça a toujours fait partie de sa personnalité, de ses méthodes. Certains joueurs n’étaient pas touchés, savaient prendre du recul. D’autres avaient du mal avec ses attaques. Je pense que ceux qui étaient contents de le voir partir se sont révoltés sur le terrain. Et ceux qui auraient voulu qu’ils restent ont su eux aussi se révolter. On a su faire un bon tournoi malgré une pression énorme. Aujourd’hui, les Diables sont eux aussi sous une grosse pression. Tout le monde rêve du titre, mais il faut reconnaître que les adversaires ont des qualités et qu’on est dans le dur. Je pense que l’avenir de Roberto Martínez dépendra beaucoup de notre résultat à l’EURO. »

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