Wilmots condamné à l’échec ?

Apparemment, on a sauté quelques étapes. Il y a seulement un an et huit mois, la Belgique fêtait sa qualification pour la Coupe du Monde dans une liesse telle qu’on aurait cru l’avoir gagnée. Aujourd’hui, beaucoup s’étonnent – les mêmes sûrement qui croient en la dimension scientifique du classement FIFA – que la grande Belgique ne marche pas sur son groupe et qu’elle va même devoir batailler jusqu’au bout pour valider son billet d’entrée à l’Euro. Et pourtant entre la qualif pour le Brésil, la Coupe du Monde, et aujourd’hui, rien n’a fondamentalement changé. Hormis la perception que l’on peut avoir des Diables.

Désormais, l’équipe nationale n’est plus une jeune équipe manquant de planches qui a encore tout à prouver mais bien une formation qui doit participer aux plus hautes luttes. Tout ça en moins de deux ans. La fresque de l’été brésilien a eu l’effet d’un trompe-l’oeil. La faute à ce résultat final, un quart (sans panache et sans idées face à l’Argentine) qui masquait des matches à l’issue heureuse voire chanceuse en poule. Aujourd’hui, l’opinion publique inflige quasiment l’impossible : aller jusqu’au bout en France. Mais est-ce réaliste ?

Notre génération dorée est, certes, sans aucune mesure bien plus clinquante que les précédentes mais boxe-t-elle déjà dans la même catégorie que l’Allemagne voire l’Espagne ? En redescendant de notre petit nuage, on se rappellera que Witsel n’est pas encore le métronome de la Juventus mais un titulaire du Zenit Saint-Pétersbourg, que Nainggolan enchaîne le très bon et le moins bon au coeur d’une Roma rarement souveraine, que Benteke bute depuis trois ans en Angleterre mais au coeur d’un club qui s’accroche à la Premier league, que Lukaku souffre de claustrophobie quand ça manque d’espace, que Mertens n’est trop souvent qu’un supersub chez le cinquième du Calcio, que Defour est remplacé par son remplaçant chez le troisième de la Jupiler League, que nos arrières latéraux n’en sont pas, ou que Fellaini, qui rassemblait tant de détracteurs il y a peu, est subitement indispensable.

Notons aussi qu’à l’inverse des nombreux joueurs allemands, français, italiens ou espagnols, l’absence de compatriote lors des derniers quarts de finale de la Ligue des Champions – hormis YannickFerreiraCarrasco avec l’invité surprise monégasque – devrait aussi nous mettre la puce à l’oreille. Surtout quand notre plus belle étoile ne brille pas de tout son éclat sous le maillot des Diables. Hormis un déboulé salvateur face à la Russie en Coupe du Monde, rien ou presque lors des matches couperets nous rappelle les nombreuses fulgurances outre-Manche d’EdenHazard. Malgré les effets de manche ou les tapes sur l’épaule du boss à son génie, le duo Wilmots-Hazard n’y arrive toujours pas.

MarcWilmots reste un redoutable orateur populaire qui, tout en malmenant la langue, arrive à faire passer son message. Du moins au monde extérieur. Car pour ses joueurs, qui ont beau se montrer ravis du maintien de leur général, dans les faits, le terrain, ça rigole beaucoup moins. Le discours de Wilmots manque cruellement de pertinence. Car comment expliquer le jeu figé et sans inventivité des Diables Rouges quand il s’agit de bousculer l’adversaire ? L’étiquette d’outsider à celle de favori a modifié les attentes. Mais sans résultats. Notre sélectionneur connaît mieux que quiconque la versatilité du public et des médias – certains ayant débuté depuis l’été leur chasse aux sorcières. Il sait pertinemment que les  » Willieresteavecnous  » du Stade de France pourraient très vite tourner en  » Williebuiten « . En restant par défaut à la tête des Diables, Marc Wilmots a plus à perdre qu’à gagner. Le flirt avec Schalke n’était rien d’autre qu’un exemple de realpolitik-sportive. S’exiler pour gagner plus. Et éviter aussi d’être confronté en juillet prochain à un éventuel échec kolossal.

PAR THOMAS BRICMONT

En restant par défaut à la tête des Diables, Marc Wilmots a plus à perdre qu’à gagner.

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