Vraiment plus fort que l’an dernier?

Où en est Anderlecht à l’heure d’aborder le tour préliminaire de la Ligue des Champions?

Anderlecht entame ce soir le tour préliminaire de la Ligue des Champions sans savoir très bien où il se situe. L’entre-saison a été pour le moins perturbée. L’hémorragie que l’on avait craint s’est bel et bien produite. Exposés durant une année dans la vitrine européenne où ils ont brillé de mille feux, quelques-uns de ses plus beaux joyaux ont été acquis par des acheteurs financièrement puissants. Si les caisses du Sporting se sont garnies de plusieurs centaines de millions, il a fallu reconstruire une bonne partie de l’équipe et notamment toute la ligne d’attaque, si complémentaire et si redoutée l’an passé.

Cela ne s’est pas fait sans mal. De la volte-face d’Ahmed Hossam au départ impromptu de Tomasz Radzinski, en passant par la blessure de Nenad Jestrovic, les plans échafaudés au départ ont dû être revus et corrigés à la hâte. L’effectif s’est donc constitué sur le tard, et n’a reçu sa forme définitive qu’il y a une bonne dizaine de jours, avec les engagements d’Ivica Mornar et de Gilles De Bilde.

Comme si cela ne suffisait pas, les blessures n’ont pas épargné le noyau et ont notamment touché les deux médians les plus créatifs, Walter Baseggio et Alin Stoica. Certains éléments sont donc encore à court de condition, et les automatismes n’ont guère eu le temps d’être rodés. Les deux derniers matches amicaux ont donné des résultats contradictoires: une défaite 4-2 à Metz et une victoire 1-2 aux Glasgow Rangers. Ce mercredi, les Moldaves du Sheriff Tiraspol ne devraient pas constituer un obstacle insurmontable. Le tirage au sort de vendredi s’est également montré clément, en proposant ensuite les Bohemians de Dublin ou les Suédois de Halmstad.

Prudent de nature, Aimé Anthuenis se méfie cependant. Car le calendrier, désormais, est ainsi fait que les matches les plus importants de la saison se jouent en juillet et en août.

Aimé Anthuenis: C’est la première fois que je dois ainsi naviguer à l’aveuglette. Nous avons longtemps été dans le brouillard. Mais je pense que ce ne sera pas la dernière fois. De plus en plus, avec l’évolution du football, les entraîneurs ne disposent pas de leur noyau complet au moment d’entamer la préparation. Les clubs belges -et pas uniquement Anderlecht- sont particulièrement exposés à ce genre d’avatars. Les Anglais, les Espagnols et les Italiens font leur marché plus tard. Si, demain, un club anglais frappe à la porte et met x centaines de millions sur la table pour un joueur, on peut difficilement refuser. Et l’on doit de nouveau se mettre à la recherche d’un remplaçant. La Belgique demeure un petit pays dans le contexte européen. Les grands clubs étrangers savent qu’ils peuvent réaliser de bonnes affaires chez nous.

« Tout a commencé avec le départ de Dheedene ».

Qu’est-ce qui vous a le plus ennuyé? La volte-face d’Ahmed Hossam, la blessure de Nenad Jestrovic ou le départ impromptu de Tomasz Radzinski?

Si l’on veut prendre les événements par ordre chronologique, il y a d’abord eu l’annonce du départ de Didier Dheedene, en cours de saison dernière. On en a très peu parlé, mais il ne faudrait pas le sous-estimer. Didier était un joueur précieux à tous les niveaux. Défensivement, mais aussi offensivement: il apportait des assists et des buts, et donnait parfois l’impression d’avoir quatre poumons. Puis, il y a eu le départ de Bart Goor. Ensuite, la lutte d’influence entre Fulham et Dortmund pour Jan Koller. Des points d’interrogation sont apparus au sujet de l’avenir d’Alin Stoica et de Tomasz Radzinski. Resteront-ils ou pas? Dans un premier temps, j’ai pensé pouvoir les garder tous les deux. Puis, Ahmed Hossam nous a filé entre les doigts. Nenad Jestrovic a été engagé pour compenser ce vide. Sa blessure nous a encore obligés à revoir nos plans. Finalement, Tomasz Radzinski s’en est tout de même allé. Bref, pendant six semaines, nous ne savions plus très bien à quel saint nous vouer.

Le noyau a donc mis du temps à se mettre en place…

Oui, ce sont les circonstances qui l’ont voulu ainsi. On ne savait pas avec certitude qui allait rester et qui allait partir. De toute manière -et je constate cela chaque année- on peut avoir une très bonne stratégie en matière de transferts et constater qu’en réalité, cela ne se passe pas comme on l’aurait voulu. Ce n’est pas un manque de vision, c’est le fait qu’on est dépendant de facteurs que l’on n’a pas sous contrôle.

En fin de compte, êtes-vous satisfait de l’équipe qui a été mise à votre disposition?

Je suis satisfait des efforts qui ont été consentis. Pour savoir quels résultats cela donnera sur le terrain, il faut attendre.

« Difficile d’avoir le beurre et l’argent du beurre ».

Michel Verschueren affirme que l’équipe actuelle est plus forte que celle de l’an passé…

Si c’est réellement le cas, cela signifierait que nous avons fait des miracles. Car nous aurions alors eu le beurre et l’argent du beurre: nous aurions amélioré l’aspect sportif tout en ayant enregistré une plus-value financière et en ayant permis aux joueurs qui nous ont quitté d’obtenir un meilleur contrat.

Aujourd’hui, alors que la période de préparation touche à son terme, où en est Anderlecht?

Pour diverses raisons, je n’ai pas pu aligner ce que je considère comme mon équipe-type lors des derniers matches de préparation. Les blessures ont été nombreuses, mais elles font partie des aléas d’une préparation et sont pratiquement inévitables lorsque les joueurs sont soumis à un travail intensif. Gilles De Bilde et Ivica Mornar ont été engagés sur le tard: ils n’ont pas encore eu le temps de réellement s’intégrer. Aruna Dindane et Tarek El-Saïd ont été sollicités par leur équipe nationale: je ne les ai pas souvent eu à ma disposition. Des points d’interrogation subsistent donc. Tous ces avatars n’auraient pas été bien graves si, comme les autres équipes, nous avions pu nous préparer à l’aise pour le début du championnat. Mais, dans notre cas, il y avait urgence. Nous sommes aux portes de deux rendez-vous capitaux programmés très tôt. Le PSV Eindhoven, que nous avions pourtant éliminé l’an passé, est qualifié d’office pour les poules de Ligue des Champions en tant que champion des Pays-Bas. Anderlecht doit encore toujours passer par les tours préliminaires. Ce sont ces rencontres qui nous ont rendus nerveux.

« Tout peut s’emboîter très vite ».

Les tours préliminaires de la Ligue des Champions arrivent-ils trop tôt?

Non. Tout peut parfois s’emboîter très vite. Suis-je inquiet? Oui et non. On n’a de réelles raisons de s’inquiéter que lorsque tout le monde tourne à plein rendement et que l’on constate que l’on n’est pas à la hauteur. Or, ici, trop de joueurs n’ont pas encore atteint leur meilleur niveau. Nous ne pouvons que nous améliorer. L’avenir nous apprendra si nous atteindrons le niveau requis dans les délais prescrits.

C’est surtout la constitution du duo d’attaque qui a donné des soucis. On pensait s’orienter vers un tandem Hossam-Radzinski, puis Jestrovic-Radzinski et ce sera finalement De Bilde-Mornar.

D’autres options existent. Stoica peut être le deuxième attaquant. C’est une possbilité qui avait déjà été utilisée avec succès la saison dernière. Rappelez-vous le 7-0 contre le GBA: Radzinski avait évolué en pointe avec le Roumain derrière lui. Beaucoup considèrent d’ailleurs que ce poste d’attaquant en retrait est celui qui convient le mieux à Alin Stoica. C’était, notamment, l’avis de Pär Zetterberg. Il sera important de trouver la complémentarité qui, la saison dernière, avait fait la force du duo Koller-Radzinski. Sur et en dehors du terrain. J’avais connu le même phénomène à Genk avec Branko Strupar et Souleymane Oularé. Théoriquement, De Bilde et Mornar (un gaucher et un droitier) devraient être complémentaires. En attendant que l’attaque trouve ses marques, il faudra essayer de s’appuyer sur une bonne organisation défensive et de l’entre-jeu. Des secteurs qui, eux, sont demeurés relativement stables, à l’exception du flanc gauche.

« De Bilde, on le connaît ».

Est-ce un hasard, si ces dernières années, Anderlecht a souvent opté pour des joueurs ayant brillé en championnat de Belgique plutôt que pour des éléments arrivant en droite ligne de l’étranger? Une politique qui vous avait réussi avec Koller et Radzinski et renouvelée avec Jestrovic, Mornar, Seol et Thompson.

Il est évidemment plus facile de se faire une idée précise sur un joueur lorsque celui-ci évoluait en championnat de Belgique. Pour ceux qui arrivent de l’étranger, il faut se fier aux impressions d’un ou deux matches, ou se baser sur une réputation. Les mauvaises langues affirment qu’Anderlecht engage les joueurs sur l’insistance de l’entraîneur, du président, de Jean Dockx ou d’un manager. C’est faux. Chaque cas est examiné et débattu. Pour le poste d’attaquant, notre liste ne se limitait pas à De Bilde, Alex et Helstad. Ce dernier avait l’avantage d’être assez jeune (24 ans) et d’avoir comme référence un titre de meilleur buteur en Norvège, mais on ne le connaît pas très bien. Jean Dockx l’a vu plus souvent à l’oeuvre que moi, notamment à La Manga. Lors du match où nous l’avons visionné ensemble, il n’avait pas vraiment convaincu. Nous n’avons pas voulu courir le risque de dépenser beaucoup d’argent pour un joueur au sujet duquel des doutes subsistaient. De Bilde a émergé. Il ne vient pas d’un club belge, mais on le connaît. Et il a encore joué une fort bonne rencontre avec les Diables Rouges, même si cela date d’il y a un an.

Comment comptez-vous utiliser Mornar?

Il recherche encore souvent le flanc droit, un poste où il a régulièrement évolué dans le passé, mais depuis le départ de Koller, je pense que nous avons surtout besoin d’un véritable attaquant de pointe et c’est dans ce rôle qu’en principe, je l’utiliserai. Je sais que ce n’est pas un buteur spécifique, mais il a suffisamment de qualités pour s’imposer.

« On parie sur l’avenir ».

Le noyau recèle beaucoup d’attaquants. On vous a parfois reproché d’avoir privilégié la quantité au profit de la qualité…

Thompson et Seol ont surtout été acquis en fonction de l’avenir. Ils n’ont que 20 et 21 ans. S’ils peuvent être performants tout de suite, tant mieux. Il ne faut pas oublier qu’ils viennent d’Harelbeke et de l’Antwerp, où ils n’étaient pas d’emblée titulaires et où ils ont effectué une percée fulgurante. On ne passe pas sans transition de ce niveau-là au Sporting. Ils auront besoin d’une période d’adaptation. Joris Van Hout n’a pas été acquis comme pur attaquant, plutôt comme médian ou attaquant en retrait.

Dans l’ensemble, c’est tout le noyau qui est pléthorique…

Il faut tenir compte du fait que nous espérons lutter sur trois fronts. La lutte pour le titre est un objectif incontournable pour Anderlecht. La Coupe de Belgique est le deuxième objectif. Une compétition qui n’a pas souvent souri au Sporting ces dernières années. Mais on est tributaire du tirage et de la forme du jour. Le troisième objectif, mais pas le moins important, est la Ligue des Champions. Un noyau pléthorique est indispensable. Mais tout est relatif, car parmi les joueurs que nous avons avons emmenés en stage, certains n’entreront pas directement en ligne de compte. McDonald a 16 ans, Guerk 17 et Fleur 18. Ce sont des paris sur l’avenir. Il faut aussi prévoir les absences toujours possibles des étrangers appelés par leur équipe nationale. Lorsque ce sont des Européens, ce n’est pas trop grave, mais lorsqu’on a des Egyptiens ou des Coréens, c’est plus embêtant. On prétend que je mets toujours beaucoup de pression sur la direction pour acquérir un maximum de joueurs. C’est faux. Si j’avais réellement mis la pression, j’aurais insisté pour qu’on conserve tout le monde. Mais c’était irréalisable.

Dia 1

Daniel Devos

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