» Vous devez investir dans vos jeunes ! »

Trois mois après son limogeage, l’ancien entraîneur de Bruges a décanté et retrouvé du boulot à la fédération néerlandaise.

C’est un AdrieKoster détendu et souriant qui nous a accueilli à Eindhoven. Le stress quotidien d’un entraîneur, il ne doit plus y faire face :  » J’ai toujours été très résistant au stress. Chaque entraîneur sait qu’il s’expose, à un moment donné, à un licenciement. Mon travail n’était pas terminé à Bruges et je regrette de ne pas avoir pu aller au bout mais je veux retenir le positif : deux années formidables ! Bonne chance à ChristophDaum.  »

Koster a été remercié le 1er novembre dernier, à la Toussaint. La veille, la Ligue Jupiler avait vécu un des matchs de la saison : Bruges-Genk, 4-5. La direction brugeoise n’a pas pardonné à son entraîneur d’avoir été battu alors qu’il menait 4-2. Ça faisait suite à l’élimination en Coupe, à La Gantoise : 4-4 et séance de tirs au but fatale.

Koster a-t-il été victime de la mauvaise passe traversée par le jeune gardien ColinCoosemans ?  » Il avait été très bon lors du deuxième tour de la saison 2010-2011. Je lui ai maintenu ma confiance. Lors de ce match contre Genk, j’étais confronté à de multiples blessures et suspensions et j’avais dû remanier toute ma ligne arrière. Mais je ne tiens plus à revenir là-dessus…  »

Détecter les jeunes talents néerlandais

Koster a rapidement rebondi. Depuis un mois, il est en charge des U20 néerlandais (ne pas confondre avec JongOranje, les U21) qui ne disputent pas de rencontres officielles mais font office de réservoir. Il supervise aussi les catégories inférieures.  » Ma tâche consiste à repérer les jeunes susceptibles d’entrer en ligne de compte pour JongOranje. Cela me permet de redécouvrir un football néerlandais dont je m’étais éloigné. Je me suis rendu au Portugal où les U16 et les U17 disputaient un tournoi. En mai, je coache les U20 au tournoi de Toulon. C’est MohamedAllach, qui travaille aujourd’hui à la fédération néerlandaise et que j’avais connu comme joueur à l’Excelsior Rotterdam, qui m’a contacté. J’avais d’autres propositions : du club chypriote de Larnaca ou du VVV Venlo, délaissé par GlenDeBoeck. Ce job à la fédération m’offre beaucoup de libertés et me convient parfaitement. Je me suis engagé pour six mois « .

L’occasion aussi de renouer avec sa vocation de formateur démontrée à l’Ajax Amsterdam et aussi à Bruges où il a lancé quelques jeunes.  » Ils sont un peu rentrés dans l’ombre mais lorsque les titulaires reviennent de blessure, les jeunes retournent sur le banc. JimmyDeJonghe pourrait réussir une belle carrière : bon pied gauche, bonnes montées mais placement défensif encore déficient. ThibautVanAcker aussi peut réussir : un garçon intelligent, qui affiche un bon placement en milieu de terrain. Le petit FriesDeSchilder a également des qualités, mais a été tracassé par des blessures. Ils manquent d’expérience mais ne peuvent l’acquérir qu’en jouant.  »

Aux Pays-Bas, le talent continue de germer :  » Regardez à l’AZ. Le jeune AdamMaher n’a que 18 ans : exceptionnel.  » Et ce Maarten Martens que Koster a entraîné au RKC Waalwijk comme jeune ?  » Un joueur fantastique. Je l’avais déjà à l’£il la saison précédente, alors que j’entraînais VVV Venlo, et j’avais demandé à mes dirigeants de le transférer… sans savoir que j’allais moi-même devenir l’entraîneur du RKC.  »

Koster était forcément curieux de la double confrontation AZ-Anderlecht :  » AZ joue dans un style typiquement néerlandais, avec un pressing très haut pour éloigner l’adversaire de son but et s’appuie sur ses propres forces sans s’adapter au rival. Cela lui réussit jusqu’ici « .

La Eredivisie est-elle plus forte que la Ligue Jupiler ?  » Les clubs de pointe des deux compétitions se tiennent. La différence avec les clubs de bas de classement est plus grande aux Pays-Bas. En Belgique, tous les matches sont difficiles. Peut-être parce que le jeu est plus fermé. Mais je trouve qu’il commence à s’ouvrir en Belgique également. Lors de ma première saison à Bruges, j’ai encore été confronté à des équipes qui se retranchaient à dix derrière, et évoluaient avec une défense à cinq : un libero, deux hommes en marquage et deux arrières latéraux. Je n’avais jamais connu cela, j’étais véritablement confronté au choc des cultures. C’était déjà beaucoup moins le cas lors de ma deuxième saison. Mais bon : l’équipe  » belge  » des Pays-Bas est Roda JC, quasiment la seule qui évolue en 4-4-2 au lieu du traditionnel 4-3-3 néerlandais. Peut-être parce qu’elle est entraînée par HarmvanVeldhoven et compte sept ou huit Belges…  »

Investir dans des entraîneurs de qualité

La formation aux Pays-Bas demeure un modèle.  » Cela nécessite un investissement. C’est une chose que l’on n’a pas encore comprise en Belgique, où l’essentiel du budget est consacré à l’équipe Première. Aux Pays-Bas, beaucoup d’anciens joueurs sont en charge des jeunes. A Feyenoord, on retrouve par exemple GiovannivanBronkhorst… En Belgique, on croit qu’un joueur qui a joué dix ans dans le club, se mettra quasi bénévolement à sa disposition pour entraîner les jeunes ! Les infrastructures constituent aussi un frein en Belgique. Dans certains clubs, on commence à fournir des efforts, mais on est confronté aux difficultés liées au système scolaire. Il existe bien les écoles Top Sport en Flandre ou le Foot Elites en Wallonie. Le problème, c’est que les entraîneurs y sont des gens de la fédération. J’aurais préféré que les jeunes Brugeois qui fréquentent l’école Top Sport soient entraînés par des gens du Club, pour qu’ils s’imprègnent d’une certaine philosophie. Il faudrait aussi mettre tous ces jeunes sous contrat le plus tôt possible. Lorsque je travaillais au centre de formation de l’Ajax, tous les Espoirs et les Juniors étaient sous contrat. Et ils avaient deux entraînements par jour comme les pros, entrecoupés de cours à l’école. En Belgique, dans la plupart des clubs, seuls les jeunes qui intègrent le noyau A reçoivent un contrat.  »

Koster souligne aussi la collaboration qui existe entre les clubs néerlandais au niveau des jeunes : ils s’unissent au lieu de se faire concurrence.  » Il n’est pas rare que deux clubs alignent une équipe conjointe dans les championnats de jeunes : Feyenoord et Excelsior ne forment qu’une équipe, tout comme RKC Waalwijk et Willem II Tilburg, ou Heracles Almelo et le FC Twente. Les meilleurs jeunes de chaque région sont ainsi regroupés. De la jalousie ? Non, pourquoi ? « 

La qualité des jeunes joueurs belges, pourtant, semble s’être élevée.  » Dans tous les pays, on connaît des périodes où une belle génération se révèle. En Belgique, la jeune génération a incontestablement fière allure. Mais pour réellement franchir un palier, il faudrait qu’elle parvienne à se qualifier régulièrement pour de grandes compétitions, comme l’Euro ou la Coupe du Monde. Et, sans vouloir blesser personne : on en est encore loin. « 

PAR DANIEL DEVOS – PHOTO: PROSHOTS

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