Vitesse et automatismes

Sur son site officiel http://www.danielvanbuyten.com, après quelques semaines de silence, Daniel Van Buyten nous donnait le 2 août dernier d’excellentes nouvelles de lui-même. D’une part, il y abordait sans chichi le problème de la rivalité en défense centrale au Bayern : Ottmar Hitzfeld ayant clairement signifié que Lucio serait titulaire, Big Dan dit se sentir de taille (avec son 1m97, manquerait plus que ça) à vaincre la saine concurrence de l’Argentin Martin Demichelis, milieu récupérateur recyclé par Hitzfeld. Et, confiant, il n’évoque même pas l’ex-compère attitré de Lucio : Valérien Ismaël brûle pourtant de revenir dans le parcours après une fracture de la jambe en août 2006,… fracture qui facilita l’inamovibilité de Daniel, alors nouvel arrivant en Bavière.

Mais surtout, Van Buyten nous livre un scoop de première importance, écoutons-le parler du traditionnel stage d’avant saison, et surtout du préparateur physique du Bayern :  » Il a véritablement sondé tous les aspects de notre condition physique grâce à une batterie de tests précis et pointus. Mon bilan est, selon ses dires, très bon, ce qui ne peut que me réjouir. Il a notamment pu constater que je cours aussi vite que Franck Ribéry ou que Miroslav Klose « . Ça pour une bonne nouvelle, c’est une bonne nouvelle ! Parce que, si notre Daniel, en ayant bien travaillé, est devenu aussi rapide que ces deux crevettes virevoltantes, de deux choses l’une : soit la défense belge de René Vandereycken pourra au besoin jouer haut les doigts dans le nez et sans angoisse, soit une titularisation de Daniel à la pointe de l’attaque belge est à envisager avec tout le sérieux qu’elle mérite. Dans les deux cas, ça me redonne ainsi qu’aux Diables des espoirs de miracle qualificateur ! Même si mon pote que je ne citerai pas, rabat-joie comme pas deux et même comme pas 11, tient à me préciser que c’est différent de courir aussi vite sur 50m ou sur 5m, et que la vitesse en foot se jauge davantage sur 5m que sur 50m. Et que Big Dan par rapport à Ribery et consorts, sur 5m…

Je passe au Barça pour tout autre chose. Même si sa dernière saison ne valut pas sa précédente (mais doit-on donc gagner tout le temps en foot, malgré des rivaux de valeur, pour n’être pas taxé d’échec ?), j’y apprécie le trio d’attaque formé par Lionel Messi, Samuel Eto’o et Ronaldinho. Et je doute de ce que Thierry Henry, quoique aussi bon que n’importe lequel des trois précités, apportera de supplémentaire : sinon tirer la tronche davantage que Ludovic Giuly au cas où ses fesses occuperaient le banc…

Toutes ces allées et venues de superstars dans les superclubs ne prouvent en fait qu’une chose : la notion d’automatismes n’a pas l’importance qu’on croit. Si les automatismes en foot étaient ardus à acquérir, si surtout ils étaient d’un apport capital pour multiplier les bons résultats, le trio ci-dessus serait infiniment plus performant à l’aube de 2007/08 qu’à ses débuts voici deux ans : et l’on ne prendrait pas le risque de l’exploser, de donner des envies de départ à Eto’o ou Ronaldinho, en amenant Henry dans le jeu de quilles ! Mais en foot (et en cours de saison encore davantage), le moindre renfort acquis se voit propulsé dans le onze de base à peine débarqué de l’aéroport : c’est dire toute la relativité des automatismes en regard de l’importance accordée à la valeur individuelle présumée… et au marketing/merchandising que permet l’arrivée d’une nouvelle tête !

En fait, les automatismes fonctionnent essentiellement comme arguments explicatifs en cas de résultats foireux : les clubs réclament de la patience avec les nouveaux venus qui doivent encore s’adapter, les équipes nationales déplorent le manque de temps pour peaufiner les dits automatismes… C’est souvent faire passer le foot pour bien plus compliqué, plus sophistiqué, plus élaboré qu’il ne l’est en réalité : au point d’abuser par exemple chez nous un gars comme Jean-Marie Dedecker, hier coach de notre équipe nationale de judo et aujourd’hui sénateur flamand tapageur.

Suite au beau parcours de nos Espoirs en juin dernier, Dedecker avait en effet suggéré de rassembler ceux-ci en 2007/08 sous la bannière d’un club de D1 supplémentaire, de manière à préparer vraiment les J.O. de Pékin. Candeur sympathique : car sans même parler des insurmontables obstacles d’organisation, c’était ignorer qu’au grand jeu des probabilités, le foot est infiniment moins scientifique et plus aléatoire que le judo.

par bernard jeunejean

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