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Tous les joueurs ne sont pas nécessairement coulés dans le même moule. La preuve par ces quatre cas hors normes.

De nos jours, on a souvent l’impression que les footballeurs professionnels vivent un peu en vase clos, coupés du monde et de ses réalités, à la fois simples et compliquées.

 » Qui suis-je pour faire le malin ? », nous avait humblement avoué l’un d’eux en sortie, il y a quelques années de cela.  » A ce que je sache, je suis quelqu’un de normal : je ne guéris personne, je ne résous pas des conflits mondiaux. J’essaie juste modestement de faire plaisir aux gens « . Pourtant, combien de gamins ne se sont-ils pas brûlés les ailes parce qu’ils étaient mal conseillés par un entourage aveuglé par les chimères d’une gloire éphémère ? De nos jours, les dérapages publics, du moins au plus haut niveau, demeurent assez rares parce que la communication vers le monde extérieur est extrêmement (voire excessivement) cadenassée et que les dirigeants de clubs, soucieux de l’image que leurs employés dégagent, hésitent davantage à engager de fortes têtes qu’à sanctionner ceux qui auraient l’outrecuidance de franchir la ligne blanche.

Il est donc devenu de plus en plus difficile de véritablement découvrir la face cachée des stars du ballon rond, qu’elle soit sombre ou rafraîchissante, d’ailleurs.

Dans ces quelques pages, nous avons voulu mettre en exergue certains joueurs atypiques évoluant aux quatre coins de l’Europe et du monde entier. Des gars qui sortent du moule en quelque sorte, pour diverses raisons. Des mecs, bien ou moins bien d’ailleurs, qui n’hésitent pas à prendre la parole pour défendre une cause, qui défrayent la chronique, qui donnent de la couleur et du relief au sport le plus populaire au monde. Mais aussi d’en évoquer d’autres, parce qu’ils en ont dans le ciboulot, qu’ils sont  » originaux  » par leur physique, leur vision des choses moins consensuelle, moins formatée. Des gars, enfin, qui se sont habitués aux regards inquisiteurs pour faire de leur(s) différence(s), jugée parfois comme une faiblesse, leur arme maîtresse.

Dans la caste des footeux caractériels atypiques, JoeyBarton est un champion du monde en puissance. Sa carrière, certes relativement intéressante, ne mentionne pourtant qu’une seule sélection en équipe nationale anglaise (en 2007) mais aussi des expériences enrichissantes à tous points de vue à Manchester City, Newcastle, QPR et, depuis cette saison, à Marseille, où il est en prêt. S’il avait fallu s’arrêter à ses simples qualités balle au pied, Barton n’aurait été qu’un anonyme parmi tant d’autres. Sa différence à lui, c’est par son verbe et ses poings que Joey la cultive. Depuis l’avènement des réseaux sociaux, et de Twitter en particulier, l’Anglais est devenue une véritable star de la baston verbale, de l’uppercut en moins de 140 signes. Suivi par plus de 2 millions de followers, son compte est un espace de libre expression, pas toujours châtiée d’ailleurs, où il n’hésite jamais à donner son avis sur tout et sur rien, sans pincettes ni condescendance.

Récemment, il a pris pour cible le journaliste français Pierre Menès, qu’il a notamment qualifié de  » gros sac  » et à qui il a conseillé  » d’aller faire du sport «  et de  » fermer sa gueule « . Content de son petit effet dans l’Hexagone, il a ensuitemultiplié les tacles à la carotide à l’encontre des Brésiliens Neymar ( » Il est une sorte de Justin Bieber du foot. Brillant sur YouTube. Du pipi de chat en réalité « ) puis, surtout, de ThiagoSilva. Ayant affectueusement qualifié le joueur du PSG d’ » obèse « , de  » mauviette «  puis de  » transsexuel (préop’ ou postop’ ?) « , Barton a tout de même été – gentiment – recadré par une direction de Marseille voulant à tout prix éviter une escalade d’autant plus dangereuse qu’on connaît la rivalité qui existe entre les deux clubs phares de la Ligue 1 française. L’Anglais s’est abstenu pendant quelques heures d’attaques personnelles vis-à-vis d’autres gens issus du milieu footballistique puis s’est attaqué à d’autres horizons, critiquant vertement la politique de MargaretThatcher (qualifiée de  » vieille sorcière « ) sur Twitter puis de manière plus détaillée sur son blog après l’annonce de son décès.

Physiquement, aussi, Barton a toujours voulu s’imposer : à City, il a enfoncé un cigare dans l’oeil de l’un de ses coéquipiers, il a écopé de six mois de prison avec sursis lors d’une bagarre à Liverpool puis a effectivement passé 77 jours en prison suite à une autre altercation dans un bar, il a donné des coups de poings à ses adversaires en plein match, a failli priver le Français OusmaneDabo d’un oeil, récoltant également près de quatre-vingts cartons (jaunes et rouges) au cours d’une carrière à la progression pas vraiment linéaire.  » Pourtant « , explique ce père de famille,  » je pense que certaines personnes confondent les problèmes de moralité et de violence. Tu peux être violent, presque barbare et avoir de bonnes valeurs morales !  » En même temps, c’est lui aussi qu’il s’était à une époque autoproclamé  » meilleur milieu de terrain d’Angleterre, incluant Gerrard et Lampard « . Modestie, quand tu nous tiens !

Dans la longue liste des footballeurs déjantés, Mario Balotelli fait lui aussi figure d’exception et en est parfaitement conscient, lui qui avait notamment dévoilé un T-shirt explicite en la matière sur lequel on pouvait lire un désormais légendaire  » Why always me ? « . Joueur ingérable humainement, il est, à l’inverse de Barton, un phénomène balle au pied, incontestablement l’attaquant italien le plus percutant du moment. S’il a déjà marqué des buts somptueux, aidé la Nazionale (dont il est à ce jour le premier et seul représentant de couleur), l’Inter, City ou l’AC à se sortir de situations délicates, on ne compte plus le nombre de fois où  » Balo  » est parti au clash avec ses entraîneurs, avec ses équipiers, avec la presse  » qui n’écrit souvent que des ragots à mon sujet «  comme il l’a récemment révélé.  » Je dirais qu’il y a 0,01 % de choses vraies qui sont écrites « .

Aujourd’hui avec un mannequin belge (mais c’est peut-être de l’histoire ancienne déjà…), qu’il avait récemment proposé de  » prêter  » aux joueurs du Real en cas de qualification pour la finale de la C1 suite au 4-1 du match aller, Balotelli défraye plus que régulièrement la chronique des faits divers pour le plus grand bonheur des paparazzi, pour le plus grand malheur de ses entraîneurs. Surpris en train de fumer dans les toilettes d’un train, de lancer des fléchettes sur des jeunes de City, ce jeune homme de 22 ans au look particulier et changeant capillairement parlant est fréquemment raillé pour ses qualités intellectuelles limitées.

Pourtant, Balotelli, qui a souvent été touché par le racisme en raison de la couleur de sa peau (il avait déclaré qu’il était prêt à tuer quelqu’un qui lui jetterait des bananes lors de l’Euro 2012…), c’est aussi le symbole d’une adoption et d’une adaptation pleinement réussie. L’émotion qui se dégagea quand il dédia un but inscrit à l’Euro à sa mère adoptive a touché beaucoup de monde. Comme quoi, derrière ce grand joueur en quête de notoriété à tout prix se cache sans doute aussi un homme au grand coeur, qui est d’ailleurs le parrain de plusieurs associations caritatives.

Aujourd’hui âgé de 32 balais, JeroenVerhoeven est ce qu’on peut appeler un gardien hors normes, au sens premier du terme. Formé à l’Ajax, c’est à Volendam qu’il joua la majeure partie de sa carrière (152 matchs d’Eredivisie en 6 saisons) avant de débarquer en 2009 au sein du prestigieux club amstellodamois en qualité de gardien réserviste et d’y jouer… 3 matchs de championnat. Cette histoire, comme il en existe des centaines de par le monde, ne vaudrait rien si Verhoeven n’affichait pas quelques dizaines de kilos superflus.

Avec sa bonne bouille ronde et ses… 115 kilos, on le confondrait presque avec le soldat Baleine, dans Full Metal Jacket. L’homme, raillé par les supporters adverses, qui hurlent  » Ohhhhhhhh Pizza  » à chacun de ses dégagements, a dû s’habituer à ce que sa différence physique, plus embarrassante que la grande taille de KristofVanHout (le gardien de Genk fait 2m08 pour… 110 kg) lui vaille quolibets et moqueries.  » Le pire, c’est que je n’aime pas la pizza ! « , a récemment expliqué le jeune homme, parfois amusé mais souvent lassé d’être au centre des intérêts en raison de son  » anormalité  » physique plus fréquente dans le milieu du sport corporatif.  » Si je ne mangeais que des frites et ne buvais que de la bière, je n’aurais jamais pu en arriver là où j’en suis. «  Aujourd’hui, c’est à Utrecht, en qualité de gardien réserviste, qu’il termine sa (grosse) carrière.

Même si un joueur suédois (AntonHysén) l’avait déjà tenté avant lui, RobbieRogers a défrayé la chronique, le 15 février dernier, en annonçant conjointement, sur son blog, qu’il était homosexuel et qu’il stoppait sa carrière sur-le-champ. Médian offensif international américain, Rogers était paraît-il un joueur de talent, qui n’était qu’au beau milieu de sa carrière qui l’avait vu quitter les States pour rallier Leeds, en Angleterre. Sujet tabou s’il en est dans le milieu du foot, qu’il soit professionnel ou amateur – souvenez-vous du tollé qu’avait créé la création du Paris Football Gay à l’époque -, la révélation de son homosexualité dans le sport de haut niveau reste une exception à la règle. Le basketteur américain JasonCollins a récemment suivi ses traces… et c’est tant mieux !

PAR VINCENT JOSÉPHY

Joey Barton multiplie à la fois les tacles sur le terrain et sur les réseaux sociaux.

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