Vers une dictature des sponsors?

Début avril, Wanderley Luxemburgo, ancien sélectionneur de l’équipe de football du Brésil, a témoigné devant les membres d’une commission parlementaire brésilienne chargée d’enquêter sur un certain nombre d’irrégularités présumées dans le monde du football au Brésil (contrat signé entre la fédération brésilienne et son parraineur Nike, transferts douteux, affaires de faux passeports).

Luxemburgo y reconnut notamment les pressions exercées sur lui par la firme Nike, spécialisée en articles de sport, pour qu’il sélectionne l’attaquant vedette Ronaldo pour une rencontre amicale contre l’Australie peu avant les Jeux Olympiques de Sydney. Ce récit rappelle évidemment les rumeurs qui ont jadis fait état de la titularisation forcée du même Ronaldo, sur ordre de Nike, pour disputer la finale de la dernière Coupe de Monde perdue contre la France, en 1998, alors que ce joueur aurait été victime quelques heures auparavant d’une crise d’épilepsie.

Probablement ne connaîtrons-nous jamais la vérité sur cette affaire.

Toutefois, ces rumeurs et les récents aveux de l’ancien sélectionneur brésilien mettent en avant les dérives du « sport business » d’aujourd’hui.

Le sport est devenu, pardon pour l’expression, une véritable « pompe à fric ». Les sponsors exigent de leurs stars un rendement maximum et une image de marque sans faille. Bien sûr, les Ronaldo, Zidane et autres gagnent des sommes d’argent (trop?) considérables. Mais le prix à payer est à la mesure de leur fortune. Au sortir de l’adolescence, le « pauvre » Ronaldo a des genoux cassés et reconstruits, et nul ne sait dire aujourd’hui s’il pourra encore mener à terme une vie normale. L’on se souviendra aussi que c’est contraint et forcé que le 1er mai 1994, au lendemain du décès de l’Autrichien Roland Ratzenberger, le Brésilien Ayrton Senna prit le départ du GP de Formule 1 de la République de Saint-Marin.

Plus généralement, chaque semaine, à tous niveaux, des sportifs sont par la grâce de médicaments et d’injections d’antidouleurs rendus aptes à l’exercice du sport au mépris de leur santé future.

Mais qu’importe, ce qui compte, c’est que le public puisse voir ses héros en chair et en os et que les bénéfices du merchandising construit autour de leurs images soient à la hauteur des investissements consentis. Voilà hélas la triste réalité du sport professionnel d’aujourd’hui.

A côté de ce constat, la définition du sport proposée par le Petit Larousse laisse bien songeur : « (Le sport, c’est) la pratique méthodique des exercices physiques en vue du perfectionnement non seulement du corps humain, mais encore de l’esprit, de certaines qualités telle que la loyauté, l’énergie, la persévérance, la décision ».

L’évolution des moeurs et de notre société en général a en pratique détruit l’éthique du sport, en tout cas lorsqu’il s’agit du sport pratiqué par des professionnels. L’absence d’indépendance du staff médical d’un club par rapport aux dirigeants et sponsors est manifestement nuisible à la bonne santé des compétiteurs.

Dernière remarque, sous forme d’avertissement : le Code pénal punit quiconque aura -volontairement ou non- infligé des blessures ou porté des coups à autrui. Comprenne qui pourra.

Luc Misson

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire