« Vermeersch ment ! »

L’ancien arrière droit du FC Brussels est vexé. Comme une bête blessée, il réagit.

Il est un peu plus de midi au stade Florent Beeckman. Le FC Dender vient de terminer son entraînement. Des cris s’échappent de la salle des joueurs, suivis d’applaudissements. JohanBoskamp vient-il de promettre une double prime en cas de victoire le lendemain ? Pas du tout : NovakDjokovic vient d’éliminer RogerFederer en demi-finales de l’Open d’Australie. EricDeflandre en sort, souriant :  » Voilà, c’est fini. Le Serbe a gagné. Je suis à vous « .

Le Liégeois, toujours domicilié à Lanaken au fin fond du Limbourg, sait pourquoi on vient le voir. Il n’est même pas nécessaire de lui poser une question, il parle tout seul. Il est démonté :  » Vous savez, je suis très gentil, mais lorsqu’on me vexe, je réagis au quart de tour. Et là, j’ai été blessé dans mon amour-propre. Je peux comprendre d’être prié d’aller voir ailleurs parce que je suis trop cher. Mais lorsque JohanVermeersch déclare, devant tout le groupe, que je n’ai plus envie de fournir des efforts, cela me va loin. Si, réellement, j’avais décidé de vivre une fin de carrière pépère, je ne me serais pas entraîné tous les jours sur le champdepatates de Scheut, puis sur le terrain synthétique qui jouxte le stade Edmond Machtens. Cette surface ne procure pas les mêmes sensations qu’un terrain gazonné et on y risque des blessures « .

Les compétences de  » Monsieur  » Vermeersch

Le ton est donné.  » Vermeersch n’arrête pas de mentir ! « , poursuit Deflandre.  » J’ai encore lu certaines de ses déclarations dans la presse. Il prétend qu’il a eu plusieurs rendez-vous avec moi durant lesquels on a discuté de problèmes tactiques. Cela ne s’est pas produit une seule fois ! Il a rajouté une couche, en affirmant que mon premier tour avait été catastrophique et que mon placement avait été déficient lors de tous les matches. A mon âge, et avec la carrière que j’ai derrière moi, je peux penser que si mon placement avait été déficient, mes entraîneurs précédents me l’auraient déjà signalé à maintes reprises. Si j’avais été aussi mauvais, Albert Cartier aurait été le premier à m’écarter de l’équipe. Or, il voulait me conserver à tout prix. DimitriM’Buyu m’a également défendu. Il n’a pas été davantage écouté que l’entraîneur. Je me pose donc des questions par rapport aux compétences de Monsieur Vermeersch. Je reconnais que j’ai commis une grosse erreur lors du match contre le Cercle, mais j’ai l’impression qu’elle a été entourée d’un gros rond rouge et que le président n’a retenu que cela. Il ne sait plus quoi inventer pour se justifier par rapport à ma mise à l’écart « .

On peut d’ailleurs penser que, si Vermeersch n’avait pas évincé Deflandre, le joueur serait parti de sa propre initiative, tellement il en avait gros sur le c£ur.  » Lors de la fameuse mise au point qui avait débouché sur l’affaire MatumonaZola, Vermeersch m’avait reproché de ne pas être un véritable leader. Je n’avais pas réellement pris cela pour un reproche, plutôt comme une incitation à endosser mes responsabilités. Je m’y suis efforcé, mais on ne s’improvise pas leader comme cela. Quelques semaines plus tard, après la débâcle face au Cercle, il a encore adressé des reproches à plusieurs éléments, puis s’est adressé à moi, tout à la fin. Devant tout le groupe, il a déclaré qu’il était très déçu de mes prestations, qu’il regrettait à la limite de m’avoir engagé et que je lui donnais l’impression de me foutre de tout. Ce fut la goutte qui a fait déborder le vase. Dix minutes plus tard, j’ai téléphoné à mon manager YvesBaré pour lui demander de me chercher un nouveau club « .

Avec Boskamp, il faut avoir envie

Deflandre a déménagé au FC Dender. Une promotion, finalement, puisqu’il s’est engagé dans un club mieux classé et avec un meilleur salaire !  » J’avais d’autres propositions. JoséRiga était intéressé, mais les dirigeants montois ont fait traîner les choses. J’avais aussi des propositions de l’étranger : Livourne, par l’intermédiaire de Baré qui connaissait un manager italien, et le Rapid Bucarest, par l’intermédiaire de MirceaRednic qui voulait m’engager au même titre que PhilippeLéonard. Cela aurait pu être intéressant, mais en raison de la scolarité de mes enfants, je ne pouvais plus me permettre de déménager à l’étranger. Pour quatre mois, j’aurais éventuellement pu partir seul, mais les clubs souhaitaient un engagement à plus long terme. Avec le FC Dender, tout s’est réglé très vite : j’ai discuté avec les dirigeants le mercredi, lors de la cérémonie de remise du Soulier d’Or à Ostende, et le jeudi, un contrat m’attendait. J’ai signé le vendredi. Je n’ai pas à me plaindre : j’y ai gagné au change ! Financièrement mais aussi sportivement, car cette équipe recèle, à mes yeux, beaucoup plus de potentiel que le FC Brussels « .

La présence de Boskamp a aussi joué un rôle :  » Je l’ai connu durant son bref passage au Standard. J’avais éprouvé énormément de plaisir à travailler sous sa direction. Je pense qu’il aurait pu réussir à Sclessin si on lui avait laissé le temps, même si la barrière de la langue constituait un obstacle. MichelPreud’homme avait, par rapport à lui, l’avantage de bien connaître la maison rouche et il a rapidement pu remettre le train sur les rails. En tout cas, avec Boskamp, il est inconcevable de lever le pied à l’entraînement. Sur ce que j’ai déjà pu constater après une semaine d’entraînement, tout le monde y va à fond « .

Sous-entendu : ce n’était pas toujours le cas au stade Edmond Machtens.  » Ecoutez : lorsque Cartier décrétait que la séance d’entraînement serait physique, on voyait le quart des joueurs qui baissaient la tête. Ils n’avaient pas envie de courir sans ballon. Que voulez-vous faire, dans ces conditions ? ».

Deflandre, lui, a toujours envie, contrairement à ce que prétend Vermeersch, et entend bien le démontrer. Il n’a pas encore regardé la date à laquelle est programmée la rencontre entre les néo-promus et les coalisés bruxellois. Il pense que c’est en mars. En réalité, elle est prévue le 12 avril. Mais on peut supposer que ce jour-là, il sera plus motivé que jamais.

On n’a pas écouté les anciens

Tout ce qui l’attendait dans la capitale, Deflandre ne l’avait-il pas pressenti avant de s’engager ?  » Je me suis peut-être laissé abuser par les belles paroles du président. Il m’avait expliqué qu’il voulait construire une équipe capable de jouer la première partie du classement. Je l’ai cru. J’ai peut-être été naïf, mais je dois reconnaître que les blessures ont fortement handicapé l’équipe. Ce sont des impondérables qu’on ne peut pas prévoir. A un moment donné, on comptait 11 blessés à l’infirmerie. Où serait classé le FC Brussels s’il avait pu compter pendant tous les matches sur RichardCulek, MickaëlCitony et PavelFort, pour ne citer qu’eux ? Peut-être pas dans la colonne de gauche, mais sans doute plus haut qu’actuellement. Cela dit, Vermeersch est un habitué des belles promesses non tenues. Certains anciens m’ont expliqué qu’on leur avait promis un jacuzzi depuis plus d’un an. Ils l’attendent toujours. Un bon terrain d’entraînement leur avait été promis également. Il n’est pas encore prêt non plus. Or, c’est tout de même l’outil principal d’un footballeur. On ne peut pas attendre qu’on fasse des merveilles en match, le week-end, lorsqu’on ne peut pas s’entraîner dans de bonnes conditions durant la semaine « .

Deflandre a-t-il été surpris par le limogeage de Cartier ?  » Oui et non. C’était dans l’air, on ne peut pas le nier. Lorsque les résultats ne suivent pas, l’entraîneur finit par payer la note. Mais il n’était pas le seul fautif, loin de là. Si tous les joueurs s’étaient investis autant que Cartier, le FC Brussels n’en serait pas là. Mais certains ont voulu faire leur show personnel au lieu de faire bloc « .

A entendre Deflandre, le message de Cartier ne passait donc plus. Car, réussir à ce que son équipe fasse bloc, c’était la marque de fabrique de l’entraîneur français, jusque-là.  » Je pense qu’il a essayé énormément des choses, mais petit à petit, il commençait à s’user et à lasser. Il répétait les consignes inlassablement, mais n’était plus entendu. Les joueurs expérimentés, comme AlanHaydock, ChristBruno et moi, nous nous efforcions aussi de répéter les consignes à nos jeunes partenaires, mais nous prêchions dans le désert. Combien de fois n’avons-nous pas demandé de ne pas tenter un petit pont dans une zone dangereuse ? Dix minutes plus tard, le petit pont était là. Certains étaient mauvais pendant 90 minutes, mais lorsqu’ils avaient réussi leur petit pont, ils étaient heureux parce qu’ils avaient le sentiment d’avoir réussi leur match « .

Beaucoup trop de tests

Un jour, lorsque nous avions demandé au manager de Westerlo HermanWijnants pourquoi il engageait régulièrement des joueurs assez âgés, il nous avait répondu :  » Avec des joueurs de ce type, qui connaissent toutes les ficelles du métier, on ne descend jamais !  » Roulers semble également s’engager dans cette voie. Le FC Brussels, lui, se sépare de l’un de ses rares joueurs d’expérience en défense. Est-ce la raison pour laquelle les Bruxellois… descendront ?  » Je ne souhaite pas au FC Brussels de descendre « , tempère Deflandre.  » D’abord, parce que j’ai tout de même participé à la moitié de la saison, et que si le club descendait, j’en serais partiellement responsable. Je souhaite aussi que le club se maintienne pour tous les amis que je compte encore dans le groupe et pour tous les supporters qui m’ont toujours bien accueilli. Le FC Brussels recrute énormément de jeunes joueurs, forcément inexpérimentés, et qui ne connaissent pas le championnat de Belgique. C’est une politique comme une autre. Elle a porté ses fruits dans les années antérieures, on verra si ce sera encore le cas cette fois-ci. Ce qui m’a frappé, c’est qu’il y avait toujours énormément de tests. Beaucoup trop. Certains joueurs à l’essai venaient s’entraîner deux jours, puis repartaient. A un moment donné, les tests étaient si nombreux que Cartier n’a pas eu d’autre solution que de les envoyer en salle de musculation, pour ne pas perturber l’entraînement de ceux qui étaient appelés à jouer le week-end. Comment voulez-vous stabiliser l’équipe dans ces conditions ? A mon humble avis, si un club de D1 veut réussir une belle saison, il doit disposer d’un groupe stable dès la reprise des entraînements, afin de pouvoir travailler sur une base solide. C’est rarement le cas à Molenbeek. M’Buyu fait ce qu’il peut mais ne décide rien. J’ai vu une liste de joueurs qui étaient pressentis pour rejoindre le FC Brussels. La plupart ont décliné l’invitation. Faut-il s’en étonner, lorsqu’on voit la manière dont certains joueurs sont traités ? »

Si Deflandre a été vexé par Vermeersch, il reste toutefois persuadé que ses déclarations à l’encontre de Zola n’étaient pas à caractère raciste :  » On peut reprocher beaucoup de choses au président, mais certainement pas d’être raciste. Sinon, il n’engagerait pas autant de joueurs de couleur. Simplement, il mesure rarement la portée de ses propos. Il peut vexer des joueurs africains, mais aussi des joueurs… belges. Moi, en l’occurrence « .

par daniel devos

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