VALSE À TROIS

Sebastian Vettel, Lewis Hamilton, Nico Rosberg. C’est le podium attendu en fin de saison. Mais dans quel ordre ?

La saison a commencé par une menace. C’est ainsi qu’est perçu le message de Nouvel An de Lewis Hamilton (31 ans), en route vers le triplé dont il rêve tant :  » Ne pas avoir atteint les 100 % a quelque chose de positif car ça veut dire qu’on peut encore progresser. Je suis convaincu qu’on peut se bonifier d’année en année. Pas nécessairement sur le plan humain mais au niveau sportif. J’espère y parvenir et tirer des leçons de ma faible fin de saison.  »

Nico Rosberg (30 ans), coéquipier d’Hamilton, est heureux de la manière dont la saison s’est achevée tambour battant dans son chef.  » Pour moi, la nouvelle saison peut commencer tout de suite, je n’ai pas besoin de vacances « , a-t-il déclaré après la finale à Abu Dhabi.

On verra à Melbourne, le 20 mars, s’il est resté dans cette période de haute conjoncture sportivo-mentale. Rosberg est peut-être un outsider dans le duel qu’on annonce entre Hamilton et SebastianVettel mais il joue quand même un rôle important. C’est un combat à trois !

Sebastian Vettel (28 ans), n’était pas désireux, non plus, de prendre des vacances.  » Mercedes ne doit pas sa force à sa seule propulsion mais à une combinaison de facteurs « , explique-t-il.  » Ceux qui veulent défier l’écurie doivent effectuer de gros progrès. C’est notre objectif.  »

A l’aube de la saison la plus longue de l’histoire, presque toutes les personnes impliquées rêvent d’une véritable lutte à trois, dont deux brillants Allemands. Le trio s’est déjà souvent vu sur le podium mais Ferrari veut maintenant en modifier la hiérarchie.

LA DERNIÈRE CHANCE DE ROSBERG

Alain Prost, quadruple champion du monde, spécialiste des combats les plus impitoyables, espère qu’il y aura plus d’action en tête.  » Je pense que Lewis est à nouveau favori mais il serait bon pour la compétition que la lutte soit plus intense entre lui et Rosberg. Il serait encore mieux que Vettel se glisse parmi eux.  »

Prost n’est pas un rêveur. Il connaît les faits : le troisième du classement mondial accusait 103 points de retard sur Hamilton, le champion et, à Abu Dhabi, il était à vingt secondes du lauréat, Rosberg.  » Nous pourrons mesurer à Melbourne l’ampleur des progrès de Ferrari. Je ne suis pas tout à fait certain que les Italiens puissent vraiment être à égalité avec Mercedes « , explique Prost.

Les experts ne sont pas unanimes : il est possible que l’écurie de Stuttgart, sûre de sa supériorité, n’ait pas tout mis en oeuvre pour conserver son hégémonie. Ou que les réserves, qui roulent dans le concept hybride d’Andy Cowell, ne soient pas assez mûrs. Nul ne sait si la course-poursuite de la Scuderia est comparable à la renaissance pré-hivernale. Mais si tous les signaux ne trompent pas, la concurrence s’intensifiera en tête.

Jusqu’à présent, Mercedes a été très coulant, laissant toute liberté à ses deux pilotes. Mais l’écurie doit sans doute revoir sa position, même si son patron, TotoWolff, refuse d’instaurer une hiérarchie. Hamilton brûle d’entrer dans le club exclusif des pilotes comptant plus de trois titres – seuls Schumacher, Fangio, Prost et Vettel y sont parvenus. Sa conviction a déjà plus d’une fois coupé le souffle à Rosberg.

Celui-ci dispute sa dernière carte. S’il échoue, il va se retrouver dans le rôle de DavidCoulthard. Une fois de plus, il est face à sa dernière chance. Le citoyen de Wiesbaden paraît très proche du sommet mais il manque de constance et, parfois, de force, dans les contres brutaux d’Hamilton.

HAMILTON DE PLUS EN PLUS FORT

Le Britannique affiche une assurance sans faille.  » Il ne fait que progresser et il gagne en puissance « , dit son père, Anthony Hamilton.

 » En même temps, il est encore assez jeune pour rouler encore dix ans. Il roulera tant que son esprit de compétition est intact. Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour ses concurrents.  »

L’ancien manager reconnaît également que son fils espère avoir plus de rivaux que les deux dernières saisons. Ce n’est pas de l’arrogance mais une des raisons pour lesquelles Hamilton n’apprécie pas les entraînements sur simulateur : il n’y a pas de concurrent direct à battre.

Le tenant du titre veut marquer une ère. Lewis Hamilton se meut sur le fil du rasoir, au contraire de ses rivaux allemands. Il aime ça. Il savoure la vie à pleines dents en dehors du circuit. Il puise motivation, créativité et confirmation de son talent dans les soirées de la jet-set.

Il n’y décèle pas la moindre contradiction. Au contraire, ses voyages réguliers en Amérique du Nord consolident son bouclier mental et l’aident à ne pas se laisser déstabiliser par Rosberg, au désespoir de celui-ci.

Hamilton n’est pas seulement un passionné de musique. Il est aussi un athlète accompli. Il étudie attentivement la manière dont ses rivaux se préparent afin d’ajouter certains aspects à son entraînement, pour autant que ce soit possible.

Un champion doit rester sur ses gardes car ce sont les détails qui déterminent les positions respectives en fin de saison.

PRESSION SUR LA SCUDERIA

Intuition, intelligence et passion au carré sont les principaux atouts de Vettel dans sa tentative de replacer Ferrari au sommet de la hiérarchie, comme son ami et modèle MichaelSchumacher y était parvenu avant lui. Schumi reste omniprésent.

 » Partout, il y a des photos de Michael et beaucoup de membres de son staff travaillent toujours pour Ferrari. Michael continue donc à faire partie de Ferrari.  » D’emblée, Vettel s’est plu à Maranello. Le fait qu’il parle presque couramment italien est très apprécié dans la Botte.

Ses trois victoires la saison passée ont rendu la foi à une troupe en mal d’assurance, tout comme à la nouvelle direction. L’écurie est unie et elle a de l’appétit.

Sergio Marchionne, le nouveau président de Ferrari, accorde, officiellement du moins, deux ans à ses hommes pour remporter le titre, mais c’est très théorique car il vient d’accroître la pression sur la Scuderia.  » Une série de victoires ferait du bien à notre marque car rester une décennie sans titre serait une tragédie.  » Kimi Räikkönen a été le dernier, en 2007, à remporter le championnat du monde des pilotes. Maranello a encore gagné le titre des constructeurs en 2008.

Après une année de transition, il devrait être plus facile à Vettel de formuler des objectifs concrets. Non seulement il peut procéder à des comparaisons directes mais il a été impliqué dès le début dans la conception du nouveau bolide.

Pourtant, il ne se départit pas de sa prudence habituelle, affirmant ne pas connaître l’ampleur des progrès des autres, tout en laissant échapper une note d’optimisme :  » Je ne sais que ce que nous faisons derrière les portes de Maranello et ça me semble vraiment très prometteur.  »

KIMI RÄIKKÖNEN EN EMBUSCADE ?

Son objectif est de vaincre grâce à son talent. Discipline et précision sont des qualités typiquement allemandes, qu’il apporte à l’écurie, conformément au souhait de Marchionne. Un trio génial s’est réuni à la Scuderia : aux qualités de Vettel s’ajoutent la passion de Maurizio Arrivabene et l’expertise de James Allison.

Vettel ne tarit pas d’éloges sur Ferrari. Quand il évoque sa première saison en rouge, il la qualifie de  » fantastique. Un rêve. Jamais je n’aurais imaginé que tout se déroulerait aussi bien.  » La passion, la fascination, l’enthousiasme et le dévouement de tous les membres du staff l’ont particulièrement impressionné, comme la passion des supporters.

 » Cette expérience n’a pas modifié ma conception de mon métier car je me suis toujours livré à 100 % mais cette passion que suscite la marque Ferrari constitue une source d’inspiration supplémentaire.  »

Interrogé sur le regain de concurrence, il ne cite ni Hamilton ni Rosberg mais son coéquipier :  » J’espère que Kimi Räikkönen va rouler au premier plan car ça voudrait dire que nous avons une formidable auto et que nous pouvons tous deux lutter pour le titre.  »

PAR ELMAR BRÛMMER – PHOTOS GETTY IMAGES

Lewis Hamilton brûle d’entrer dans le club exclusif des pilotes comptant plus de trois titres aux côtés de Schumacher, Fangio, Prost et Vettel.

 » Une décennie sans titre, ce serait une tragédie.  » – SERGIO MARCHIONNE, PRÉSIDENT DE FERRARI.

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