Vagabonds

Du blanc à perte de vue, du jaune qui agresse ma vue tout en berçant ma vie. Je suis bien. Je cours dans mes campagnes. Il fait froid, très froid. Il fait beau, très beau. C’est bon, très bon.

De la neige et du soleil. Duo magique parce qu’improbable et forcement éphémère. Le froid aurait pu me faire rester chez moi mais non, l’appel du corps, de l’esprit qui dit :  » mec, faut parfois oser…  »

Pendant que je me tapais mes 10 kilomètres, je pensais que ce sentiment était aussi celui que j’avais par rapport au foot actuel. C’est pas très tentant. Il pue plus le flouze que la pelouse. Il désespère, tellement il devient de la géopolitique un peu puante. Mais bon, on y va quand même.

Et on aime ça. Et puis, il reste l’autre foot. Celui qui sent encore bon. Celui dont les effluves de l’amour se mélangent aux senteurs de l’herbe. Plus verte ici qu’ailleurs, d’ailleurs. Parce qu’on y vient pour les bonnes raisons. Celle d’un projet basé sur l’amour du jeu et des hommes. Ça existe toujours. Même dans le foot professionnel.

Exemple avec ce havre de braves nommé Wycombe Wanderers, club professionnel de…. League 2 anglaise. Certes l’équivalent de notre division… 4, mais pro quand même. Wycombe est situé à 50 kilomètres à l’ouest de Londres mais c’est notre capitale à nous. Ce club revient de loin, très loin. Il évite la division 5 lors de la dernière journée de la saison 2013/14. Il reste donc dans le foot pro anglais. Enfin pro…

L’entraîneur est un certain Gareth Ainsworth. Il confesse :  » Le club n’avait à l’époque même pas les moyens de me virer. Et moi le courage de partir « . Quatre ans plus tard, personne ne le regrette. Le club joue, maintenant, pour la montée en League One.

Pourtant, la carte de visite n’est guère alléchante. Le club n’a plus d’école de jeunes. Pas d’équipe réserve. Pas d’entraîneur de gardien. Le staff se compose de deux coachs. Dont le N°1, notre ami Gareth est aussi, à mi-temps, chanteur dans un groupe de rock and roll.

Souvent, la camionnette du groupe chauffe sur le parking du stade. À peine le match fini, direction le concert. Ça ne gêne personne. Quand ce même entraîneur doit parler contrat, primes, projets avec ses propriétaires, il se retrouve devant ses….supporters qui sont aussi actionnaires du club. Mais pas mécènes.

Cet été, lors de la reprise des entraînements, le coach se rend compte que les buts n’ont même pas de filets. C’est lui qui doit les acheter sur ebay. Même les joueurs, on ne les achète pas. Ils viennent gratuitement ou en location. Pourtant, il y a quelques beaux spécimens.

Le capitaine est un ancien international égyptien. Du temps où c’était un Américain ( BobBradley) qui en était le coach. Si, si c’est arrivé. Le plus original ? Le jeune Luke O’Nien. Formé à Watford, il y avait même signé un contrat pro. Lui, c’est pas encore la star de l’équipe mais bien celle des réseaux sociaux.

Sa spécialité ? Jongler avec tout ce qui bouge. Fils d’un ancien joueur de golf pro, il commence avec des balles de golf, puis de tennis, puis des volants de badminton, même des chaussettes de foot enroulées et pour finir, avec un ballon de rugby. Tous les sports mènent à Wycombe et son surréalisme salvateur.

Et beaucoup de destins ont suivi son chemin. Comme celui d’un gars bien de chez nous, Yves Ma-Kalambay. Un colosse d’1m98. Qui a même représenté notre pays aux Jeux olympiques. Un gars formé à Anderlecht, au PSV et à Chelsea. Un gars qui a affronté le Barca en Ligue des Champions. Si, si. Bon ok, c’était du banc, certes, mais il y était. Une soirée à l’image de son parcours un peu bancal.

 » Préformé  » dans les rues de Bruxelles aux côtés de ses potes d’enfance que sont les Kompany, VandenBorre, Haroun et autres, il s’est laissé porter par les hasards de la vie en quête de certitudes.

Après Chelsea, il y eu l’Ecosse, le Pays de Galles, Malines, l’Antwerp, la Roumanie et enfin les Wycombe Wanderers.  » Wanderers  » veut dire  » Vagabond « . Le destin de Yves devait passer par Wycombe car son destin avant d’être une carrière fut un parcours de vie extraordinaire. Et c’est aussi pour ça qu’on aimera toujours le foot.

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