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US Open: un tournant pour le tennis féminin?

Emma Raducanu et Leylah Fernandez, les surprenantes finalistes de l’US Open, représentent-elles l’avenir du tennis féminin ou leur étoile va-t-elle pâlir (trop) rapidement?

En l’absence de Serena Williams, Rafael Nadal et Roger Federer, l’US Open 2021 allait se résumer à la quête du Grand Chelem calendaire de Novak Djokovic. Personne, même pas les observateurs les plus chevronnés, n’aurait osé prédire que deux jeunes femmes, Leylah Fernandez (19 ans) et Emma Raducanu (18 ans), allaient passionner le milieu du tennis. Et pour cause, les deux adolescentes étaient encore inconnues au début du tournoi.

Certes, Raducanu avait déjà déclenché une Emmamania en Grande-Bretagne, mais elle avait dû déclarer forfait au quatrième tour de Wimbledon suite à des problèmes respiratoires. Pas plus que Fernandez, elle n’avait encore signé de résultats marquants. Elle avait même dû passer par les qualifications à Flushing Meadows. Ce qui ne l’a pas empêchée de devenir le premier qualifier (hommes et femmes confondus) à s’adjuger un premier titre du Grand Chelem, le tout sans perdre le moindre set, alors qu’elle n’en était qu’à son deuxième tournoi dans la catégorie. Depuis la finale de l’US Open 1999, qui s’était jouée entre Martina Hingis et Serena Williams, respectivement âgées de 18 et 17 ans, c’était la première finale opposant deux ados, à une nuance près: à l’époque, Hingis et Williams étaient déjà numéro 1 et numéro 6 mondiales alors qu’avant l’US Open, Fernandez et Raducanu étaient 73e et 150e au classement WTA.

Il y a beaucoup de concurrence en tennis féminin, mais le circuit manque de véritable patronne.

L’émergence de joueuses nées après 2000 est assez fréquente depuis quelques années: en 2019, Bianca Andreescu a enlevé l’US Open à 19 ans. Un an plus tard, au même âge, Iga Swiatek s’est adjugé Roland-Garros. Le contraste avec les hommes ne pourrait être plus saisissant. Jusqu’à présent, seuls deux joueurs nés après 1989 ont remporté un Grand Chelem: Dominic Thiem (27 ans) a gagné l’US Open 2020 et… Daniil Medvedev (25 ans) a privé Djokovic de son exploit historique ce dimanche.

Pourquoi les jeunes filles émergent-elles plus tôt? Parce que si la concurrence est forte, le circuit manque de véritable patronne. Nul n’occupe le terrain depuis que Serena Williams est sur la pente descendante. Depuis 2017, les 19 derniers Grands Chelems sont revenus à quatorze femmes différentes. Naomi Osaka est la seule à en avoir gagné plus que deux – quatre – mais elle en paie le prix sur le plan mental. Le plateau des dix finalistes de cette année, dans les quatre épreuves majeures et les Jeux Olympiques, est encore plus surprenant: il comporte dix noms différents. Et depuis cinq ans, chaque grand tournoi assiste au triomphe d’une autre joueuse. Il en va tout autrement chez les hommes, où le Big Three, et surtout Djokovic ces dernières années, freinent les jeunes talents, en raflant soixante victoires dans les 74 derniers Grands Chelems. Il est de toute façon plus difficile pour les jeunes hommes de se frayer un chemin vers le sommet, surtout dans les quatre tournois les plus importants, qui se jouent toujours en trois sets gagnants. L’expérience, la maturité tactique et le bagage physique sont des éléments cruciaux dans les quatrième et cinquième manches, encore plus face aux ténors et dans les ultimes phases du tournoi. Lors du dernier US Open, des jeunes prometteurs comme Carlos Alcaraz (18 ans), Jason Brooksby (vingt ans) et le demi-finaliste Félix Auger- Aliassime (vingt ans lui aussi) en ont fait l’amère expérience.

Leylah Fernandez et Emma Raducanu doivent maintenant démontrer qu’elle ne sont pas des étoiles filantes, mais sont capables de perdurer au firmament. Elles semblent en tout cas gérer la pression avec beaucoup de maturité, sur le court comme en dehors. Raducanu, aussi gracieuse que puissante, en a certainement les moyens. Elle possède de nombreuses qualités, parmi lesquelles un coup droit dévastateur. Elle devra supporter la pression et le stress, elle qui est soutenue par un bon entourage. Avec son charisme, son apparence et ses racines multiculturelles, la Britannique peut briguer le statut de superstar, ainsi que les millions qui l’accompagnent. Mais pour combien de temps? Posez donc la question à Naomi Osaka…

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