Malgré les problèmes actuels, le Brésilien trouve le groupe carolo bien plus resserré que l’an passé.

Il y a un peu plus de deux ans, fin septembre 2000, Eduardo débarquait à Charleroi. « Il faisait plus froid que maintenant et je me rappelle que Manu Ferrera m’a dit que l’hiver n’avait pas encore commencé », grelotte-t-il encore.

Le nom de l’entraîneur qui fut le premier à lui faire confiance au Sporting est lancé. Ferrera ne voulait pas spécialement d’Eduardo, imposé par Lucien Gallinella, mais il en fit rapidement un titulaire. Et c’est lorsqu’on le substitua par Enzo Scifo que les choses commencèrent à se gâter pour le Brésilien. On lui fit bien comprendre qu’on voulait plus fort que lui et, outre Rojas, le Sporting acquit encore Pivaljevic.

« Du coup, je n’ai plus joué à ma place mais beaucoup plus en retrait, sur la gauche », dit-il. « On affirmait que Charleroi jouait avec trois attaquants mais c’était faux. Moi, j’avais des consignes plus strictes à respecter et le public ne comprenait pas pourquoi je ne marquais plus autant. Simplement, j’étais plus loin du but. Et puis, comme j’avais très bien débuté, on attendait peut-être trop de moi. Mais c’est dans les moments difficiles qu’on apprend le plus et je pense être sorti plus fort de cette période difficile ».

D’ailleurs, comme l’Argentin et le Serbe ne sont plus là, le Sporting est tout heureux d’encore pouvoir se reposer sur Eduardo qui, plus que Kolotilko, s’est mis en évidence depuis le début de la saison. Au point d’être en tête du classement du Zèbre du Net, le sondage du meilleur joueur sur internet. Même à Mons, lorsque son équipe fut en dessous de tout pendant une bonne partie du match, il fut encore considéré comme le meilleur carolo sur le terrain. Alors, est-ce Charleroi qui a régressé tant que cela ou Eduardo qui a progressé?

« Je pense que, depuis que je rejoue devant, j’ai beaucoup progressé. Il est vrai que le Sporting a beaucoup perdu avec Rojas et Pivaljevic mais Kolotilko et moi n’avons rien à leur envier et l’entraîneur a confiance en nous, notamment parce qu’il voit que nous sommes très volontaires. Nous n’avons pas disputé les matches de préparation, moi parce que j’étais blessé et Alex parce qu’il est arrivé juste avant le début du championnat. J’étais soulagé de le voir débarquer parce que je n’avais pas envie de jouer seul en pointe. Cependant, il est vrai qu’il joue dans un tout autre registre que Sergio Rojas, qui campait davantage dans le rectangle. Par moments, Alex et moi sommes trop écartés l’un de l’autre parce que nous bougeons tous les deux ensemble. Cela va s’arranger au fil du temps ».

Pas un pacha

Volonté, course… Tout le monde est bien d’accord là-dessus: Eduardo n’est pas un pacha. Mais un Brésilien n’aimerait-il pas être reconnu pour d’autres qualités?

« Ici, celui qui se bat est très apprécié. Je le sens bien au contact que j’ai avec les supporters. Savoir courir, se battre, cela n’a rien de péjoratif, tout de même. Au Brésil, je jouais déjà comme cela. Les gens ont une fausse image du football brésilien, celle de la sélection, championne du monde, des artistes qui caressent le ballon. Ceux qui ont vu des matches de notre championnat savent qu’ils sont plus engagés qu’ici. Simplement, il y a plus de techniciens dans chaque équipe, des mecs capables de faire la différence à eux seuls. Alors, d’un coup, l’étincelle jaillit. C’est pour cela que j’aime bien Baseggio, par exemple: lui, il court, saute, s’engage dans les duels mais, en plus, il sait donner un bon ballon ».

Comme la plupart des étrangers, Eduardo a débarqué chez nous avec, dans la tête, un autre billet d’avion pour une destination plus attractive comme l’Espagne, l’Italie, le Portugal. Aujourd’hui que Charleroi se débat dans les tréfonds du classement, ne craint-il pas de devoir rester éternellement dans ce pays dont il ne maîtrise pas encore la langue? D’autant que, contrairement à la plupart de ses compatriotes, il ne s’est pas encore trouvé d’aïeul pouvant lui servir à l’obtention d’un passeport européen.

« Pas même l’oncle d’un oncle », rigole-t-il. « Mais pour le moment, mon premier souci est de m’imposer définitivement ici. Bien sûr, il est plus facile de se faire remarquer quand on joue à Anderlecht que lorsqu’on est dernier du classement avec Charleroi mais j’imagine que nous n’allons pas rester là. Ce que réussissent Mons et La Louvière, nous sommes capables de le faire aussi. Seulement, nous devons absolument nous mettre en tête que, pour nous en sortir, 20 minutes par match ne suffisent pas. Dans des rencontres comme à Mons, où nous revenons bien au score avant de nous faire prendre de façon stupide, je deviens fou. Tellement d’efforts pour rien. Nous devons donc être plus concentrés sur notre tâche. Malheureusement, nous n’avons pas de patron, de leader, de gars capable de mettre le pied sur le ballon dans les moments chauds. Cela, je l’ai remarqué dès les matches de préparation, dans la tribune. Et sur le terrain, c’est encore pire. Parfois, je suis épuisé à la fin du match mais je m’aperçois que je n’ai pratiquement pas touché le ballon, parce que nous avons manqué de patience, nous avons balancé vers l’avant. Et alors, on fait le double d’efforts: on va au duel, on court vers un ballon insaisissable et on doit encore sprinter pour se replacer parce que la passe est venue trop tôt ou trop tard ».

« Dante voulait partir »

Avant, Brogno savait faire cela. N’est-ce pas le groupe qui l’a chassé au moment des disputes entre le clan Scifo-Gallinella et le reste du club? Des péripéties dont Eduardo aurait pu être victime également puisque c’est l’ancien manager qui l’avait transféré.

« Je ne pense pas que le groupe ait mis Dante à l’écart. .C’est lui qui a décidé de partir parce qu’il y avait des problèmes au sein de la direction. Pareil pour moi: je n’ai jamais senti d’animosité parce que Gallinella croyait en moi. Le moment difficile que j’ai connu n’a rien à voir avec cela. Je savais que cela pouvait m’arriver et je me suis accroché, c’est tout »

Aujourd’hui, les divergences concernent plutôt le nombre de langues étrangères parlées au sein du noyau et la position d’ Etienne Delangre, fragilisée depuis qu’un confrère a parlé de sabotage au sein du groupe.

« Il ne faut pas nécessairement parler la même langue pour bien s’entendre sur le terrain », corrige Eduardo.  » Yazdani et moi ne savons pratiquement pas discuter ensemble mais il est l’un de mes principaux fournisseurs. Je m’entends aussi très bien avec Badou Kere, bien que mon français soit toujours très approximatif. Quant à l’entraîneur, je pense qu’on a suffisamment répété ces derniers temps que le groupe était derrière lui. Ce qui est dommage, c’est que depuis la parution de cet article, le doute s’est installé dans l’esprit des gens et, chaque fois que nous perdons, on reparle de cela. C’est vrai que, quand on prend des buts comme à Mouscron et à Mons, on peut se poser des questions mais il ne faut pas confondre erreurs et mauvaise volonté. Personne n’a été montré du doigt dans les vestiaires. Aurions-nous dû le faire, désigner des responsables? Je ne pense pas. D’ailleurs, c’est un des principes que l’entraîneur a imposé dès son arrivée: on ne discute pas les phases de jeu après un match. Sinon, c’est la dispute assurée. On part d’une phase et on refait tout le match. Quand l’entraîneur a quelque chose à dire à un joueur, il le prend à part et le lui explique, sans faire de bruit, sans ridiculiser personne. Car la confiance est un de nos moteurs essentiels. Et le groupe est bien plus uni qu’il ne l’était la saison dernière. C’est un cliché: nous sommes tous sur le même bateau: et s’il coule, nous coulerons tous avec lui ».

Patrice Sintzen

« Delangre nous a appris comment éviter les disputes »

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