© BELGAIMAGE - KOEN BLANCKAERT

Union Bhoys on Tour

Sport/Foot Magazine s’est fondu parmi les supporters de l’Union Saint-Gilloise pour le déplacement en car au Standard. Bienvenue à bord.

Le foot bruxellois se porte bien, merci. Alors qu’Anderlecht trône en tête des play-offs 1 et que le RWDM a été sacré champion de D3A Amateurs le week-end dernier (voir pages actu), l’Union Saint-Gilloise continue son petit bonhomme de chemin dans ces PO2 inattendus pour les pensionnaires de la Butte. Après un inespéré 9 sur 12 lors des quatre premières rencontres, les hommes de Marc Grosjean ont subi leur première défaite milieu de semaine dernière en s’inclinant face au Lierse (1-3) au Stade Roi Baudouin. Un revers qui n’a pas tempéré l’enthousiasme des supporters unionistes, impatients à l’heure d’aller se frotter à un Standard malade dans son antre de Sclessin en ouverture de la sixième journée des play-offs. Une excitation compréhensible quand on sait que les Saint-Gillois ne se sont plus déplacés en terre liégeoise en championnat depuis la saison 1972-1973 (1-1).

Départ depuis Duden

 » Attention : RDV à 17 h pour un départ à 17h30 maximum. Vu la forte demande, passé 17h15 nous ne pourrons malheureusement plus garantir la réservation des places dans le Bhus « . Le message posté sur la page Facebook des Union Bhoys, le groupe de supporters les plus chauds de l’Union, est clair : il ne s’agit pas d’être en retard. De fait, à l’heure dite, ça s’agite déjà dans le Club House et aux alentours du stade Joseph Marien. Chacun doit confirmer sa présence, s’acquitter des 30 euros prévus (transport + ticket) et découvrir dans lequel des trois Union Bhus il fera le voyage.

Pour nous, ce sera le trois. Alors que les pompes à bière fonctionnent déjà à plein régime, les discussions s’orientent naturellement vers le match du jour et on espère que les fans rouches seront plus nombreux que face à Waasland-Beveren où seulement 5000 supporters garnissaient les travées du Stade Maurice Dufrasne. Dehors, la chaussée de Bruxelles se pare de jaune et de bleu et est de plus en plus encombrée. Les voitures peinent à se frayer un passage : deux des trois Union Bhus ainsi que les deux cars des Fidèles, un autre groupe de supporters unionistes, attendent leurs passagers.

17h45, on entre avec un peu de retard sur l’horaire prévu dans le Bhus n°3. Le temps de charger quelques bacs de bière (1 euro la bouteille), de laisser les fumeurs profiter d’une dernière clope, et d’entamer l’un ou l’autre chant, il est passé 18 h quand nous quittons enfin Forest. À l’intérieur du car, la moyenne d’âge doit tout juste dépasser la trentaine et ça sent la testostérone : sur la soixantaine de sièges, tous occupés, seulement deux demoiselles représentent le contingent féminin. Alors que les conversations en anglais, néerlandais et français se superposent, un petit groupe à l’arrière se fait entendre plus que les autres. Ça parle beaucoup d’Anderlecht et le tatouage  » RSCA  » de l’un d’eux ne trompe pas : ceux-là sont Mauves et probablement attirés par l’idée d’aller défier leur ennemi historique.

 » Il n’y a pas de vraie rivalité entre Anderlechtois et Saint-Gillois » , nous explique d’ailleurs Fabrizio, le responsable de notre Bhus.  » C’est assez logique puisque les deux clubs ont assez peu longtemps évolué dans la même division : le véritable essor d’Anderlecht correspond à peu de choses près au déclin de l’Union. Il y a d’ailleurs pas mal de Mauves qui ne se retrouvent plus trop dans l’ambiance du Parc Astrid qui viennent régulièrement à l’Union « .

 » On est en retaaard…  »

 » On reste au bar, on tient ce putain de comptoir. Et on va continuer à boire…  » Pendant que certains font des allers et retours vers l’avant du car pour approvisionner leurs camarades en houblon, les autres s’époumonent sur l’air du  » Don’t take me home  » popularisé pendant l’EURO. On n’est parti que depuis une quarantaine de minutes à peine quand les cris de  » pipi  » se font de plus en plus pressants et une odeur de cigarette commence à envahir l’espace. Message reçu cinq sur cinq par le chauffeur qui s’arrête à la première aire de repos. Certains sprintent vers les buissons et, tandis que les moins rapides terminent leur petite affaire, un second Bhus vide son chargement de vessies pleines. Les chants reprennent de plus belle :  » Bruuuu…xelles, ma ville, je t’aime… « . Les derniers mégots s’écrasent et on remonte à bord, il ne faut pas traîner.  » Ça fait du bien. Quand j’en bois une, j’en pisse deux. Et là j’en ai bu cinq ! « , nous confie un Unioniste en grande forme.

De nouveau sur l’autoroute, les Bhus se dépassent à plusieurs reprises et à chaque fois des  » Muppet Show  » envers les autres supporters s’élèvent dans les cars. Pour éviter le ring bruxellois, encombré à cette heure-là, notre chauffeur a pris l’E19 direction Nivelles et prend le chemin de Liège via l’E42 au lieu de la traditionnelle E40 qui passe par Louvain. Ça en inquiète certains qui redoutent d’arriver en retard :  » On est plus loin de Sclessin maintenant que quand on est parti du stade Marien !  » Il faut dire que le temps passe et le trajet n’est pas des plus rapides. Alors qu’on s’est arrêté il y a seulement une vingtaine de minutes, des  » Pipi, Pipi, c’est Saint-Gilles  » sur l’air du célèbre  » Ici, ici, c’est Saint-Gilles  » se font déjà entendre. Deuxième arrêt sur une aire d’autoroute, avec magasin cette fois : grossière erreur ! Les bacs embarqués à Forest sont vides et certains en profitent pour se ravitailler en plus de se soulager. Impossible de repartir tant que tout le monde n’est pas à bord et un retardataire se fait longtemps attendre. Il sera finalement accueilli par des  » Shame on you !  »

Ça n’entame heureusement pas la bonne humeur générale et l’on réclame Robert, l’une des figures des supporters saint-gillois, au chant :  » Réservez-vous pour le stade, je suis pas un juke-box !  »

20h02, le match commence dans 28 minutes et Google Maps prévoit encore 23 minutes de trajet, ça va être tout juste mais ça donne des idées à certains qui lancent un  » On est en retaaard, on est dans ce putain de caaar, et on va continuer à boire…  » suivi d’un inspiré  » On est en retaaard, c’est Jonathan Legear, qui conduit notre autocar… « .

20h08, on se rend compte que l’horloge du Bhus avance de huit minutes : soulagement, on devrait être là pour le coup d’envoi ! À l’arrivée sur les hauteurs de Liège, quelques  » Liège, c’est moche  » se font entendre et un  » Standard, Standard, on t’enc…  » est lancé depuis l’arrière. C’en est trop pour Robert qui s’énerve :  » Ça, tu dis pas au stade, OK !  » À l’Union, on encourage les siens, on ne chante pas contre les adversaires.

20h23, nous voilà enfin dans le parking. La porte arrière est bloquée et on sort au compte-gouttes par l’avant. Le temps d’un dernier pipi et de la traditionnelle fouille des stewards et nous pénétrons dans Sclessin au son du décompte qui accueille les joueurs :  » Dix, neuf, huit…  »

 » Allez Standard, chante avec nous  »

Les 600 tickets du bloc B4 dévolu aux supporters adverses ont été vendus et quelques dizaines de Saint-Gillois doivent même prendre place en C4, au deuxième étage. Le temps de se frayer un chemin jusqu’à un espace vide où nous installer et Vincent Vandiepenbeeck enflamme déjà les Bruxellois par une tête qui lèche le poteau. Une effervescence de courte durée puisque trois minutes plus tard, Orlando Sá ouvre déjà le score pour le Standard (1-0). Ça ne refroidit pas pour autant les ardeurs des fans jaune et bleu emmenés par Dylan, leur kapo, et le classique  » Je t’aime plus que la cocaïne, je t’aime plus que prendre l’apéro, je t’aime plus qu’une belle coquine, je t’aime toi l’Union Saint-Gilloise !  » résonne dans un stade de Sclessin fort peu garni : seulement 8000 spectateurs.

Tandis que les Standardmen adressent des messages à leur dirigeants via deux banderoles ( » VenanziRenard : voilà le résultat de votre incompétence  » et  » Rendez ces chèvres à leur berger « ), les  » Ici, ici, c’est Saint-Gilles !  » redoublent d’intensité. Sur le terrain par contre, ce sont les Liégeois qui sont à leur avantage : alors que Gertjan Martens doit sortir sur blessure et que Nicolas Rajsel tente timidement d’inquiéter Jean-François Gillet, c’est finalement Christian Luyindama qui double le score pour les siens peu avant la demi-heure (2-0). Les Unionistes restent tout de même en voix et tentent un  » Allez Standard, chante avec nous  » suivi de peu d’effet si ce n’est sur la pelouse où les hommes de José Jeunechamps continuent à dominer bien que la mi-temps s’achève sur une ultime tentative de Rajsel.

Le repos passe bien vite : un tour au bar (qui ferme 15 minutes après le début de la deuxième mi-temps), aux toilettes et au stand des hamburgers plus tard, le jeu a déjà repris quand nous regagnons nos places. L’Union semble mieux en jambes et elle confirme rapidement cette impression via Rajsel, encore lui, qui prend son opposant direct de vitesse avant de placer hors de portée de Gillet à la 52e (2-1). Les gobelets de bière volent, le bloc B4 est en liesse et le suspense est relancé. On recommence à y croire.

Un espoir malheureusement de courte durée pour les Saint-Gillois. À la 69e, Ishak Belfodil, déjà bien à son avantage jusque-là, profite d’un cafouillage dans le rectangle suite à un corner pour propulser le ballon dans les cages d’Adrien Saussez (3-1). Les supporters unionistes accusent un temps le coup d’autant qu’on semble plus proche du 4-1 que du 3-2. Entré au jeu à la 75e, Mohamed Aoulad tente bien d’alerter Gillet mais sans succès et la dernière occasion franche revient à Orlando Sà qui place sa reprise de volée à côté du but. Coup de sifflet final, l’Union s’incline pour la deuxième fois consécutive dans ces PO2. Une défaite logique qui n’empêche pas les fidèles jaune et bleu d’applaudir longuement leurs joueurs venus les saluer. Des  » FC Liège olé olé  » sont scandés tant pour narguer les Standardmen que pour rendre hommage aux quelques supporters du matricule 4 venus soutenir leur club ami.

Retour au Parc

23h04, tous les Bhoys ont rejoint le Bhus et c’est escorté par une moto de la police que nous reprenons la direction de Bruxelles. Le retour est forcément plus calme. Quelques-uns en profitent pour faire une sieste tandis que la plupart refont le match tranquillement. Un peu avant minuit, le dernier arrêt station-service prend un peu plus de temps que prévu. Alors que tous les occupants du Bhus 3 ont regagné leur siège, le car est immobilisé et les lumières de fourgons de police apparaissent près d’un des autres Bhus. Certains suggèrent que quelques supporters n’auraient pas eu la patience de faire la file à la seule caisse du magasin. Nous n’en saurons pas plus. Après une petite demi-heure à l’arrêt sans qu’il ne se passe rien, on repart enfin. En arrivant sur le ring, une poignée d’occupants du car paraît de plus en plus blême : leur vessie leur joue à nouveau des tours.

1h15 : nous arrivons enfin au Parc Duden ou d’autres Unionistes ont déjà débarqué. Certains sont encore en voix et vont visiblement continuer la soirée. Ce ne sera pas notre cas : les play-offs sont encore longs !

PAR JULES MONNIER – PHOTOS BELGAIMAGE – KOEN BLANCKAERT

Dans le car, les  » Pipi, pipi, c’est Saint-Gilles  » remplacent le traditionnel  » Ici, ici, c’est Saint-Gilles.  »

 » Je t’aime plus que la cocaïne, je t’aime plus que prendre l’apéro, je t’aime plus qu’une belle coquine, je t’aime toi l’Union Saint-Gilloise !  » résonne dans un stade de Sclessin fort peu garni.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire