UNE FINALE SUR FOND DE POLÉMIQUE

Il fallait apprécier la valeur émotionnelle de l’apothéose de la Ligue des Champions.

Malgré le nul vierge

Est-ce à dire que ce nul vierge se sera réellement assimilé à un navet ? Personnellement, je ne suis pas de cet avis. Si le football-spectacle se mesure au nombre de buts inscrits, c’est sûr que cette manche ultime nous aura laissés sur notre faim. Mais si la valeur d’une rencontre se juge en occasions, émotion et suspense, je ne pense pas qu’il y ait eu, dans ce cas, de quoi bouder son plaisir. Car ces trois ingrédients furent bel et bien présents avec, pour couronner le tout, une épreuve des tirs au but à couper le souffle. Fallait-il en arriver là ? Des voix se sont à nouveau élevées pour dénoncer cette formule. Je persiste à croire, pourtant, qu’elle n’est pas mauvaise, dans la mesure où chacun des protagonistes a 50 % de chances de tirer la couverture à soi dans cet exercice particulier. Je préfère en tout cas cet épilogue à un replay, tant il est vrai qu’une finale doit se disputer, à mes yeux, en une seule joute.

19 matches pour Milan

Si les tirs au but ne recueillent pas l’adhésion de tous, peut-être faudra-t-il alors plancher sur une autre solution. Comme comptabiliser le nombre de coups de coin de chacun des adversaires, par exemple. Mais je ne pense pas que ce soit la panacée. En principe, 120 minutes devraient suffire à dégager un vainqueur. Ici, on avait affaire à un cas particulier avec deux phalanges d’une même nation qui se connaissaient évidemment sur le bout des doigts. Encore une fois, beaucoup s’insurgent en prétextant qu’une Ligue des Champions ne devrait pas opposer deux formations d’un même pays. Mais pourquoi pas, s’ils ont accompli, chacun de leur côté, leur parcours du combattant. Milan a quand même dû se farcir 19 matches pour arriver à décrocher la timbale. Même si certains esprits chagrins remarqueront qu’il n’a plus gagné le moindre match lors de ses sept dernières confrontations dans cette épreuve.

La technique a toujours droit de cité

L’avenir dira sûrement si cette finale 100 % italienne marquera un tournant dans l’histoire du football. En réalité, celle-ci repasse toujours allégrement les plats. Pendant les années 70, la dominante était essentiellement physique avec l’émergence des footballs allemand et anglais, symbolisés par le Bayern Munich et Liverpool. Au cours de la décennie suivante, la technique a pris le pas sur l’engagement avec, comme porte-drapeaux, le grand Barcelone de Johan Cruyff ainsi que l’AC Milan d’Arrigo Sacchi. A présent, on en est peut-être revenu à un jeu plus athlétique. Je ne prétends pas que la technique n’a plus droit de cité. Au contraire, car elle était ni plus ni moins présente dans cette finale entre la Juventus et l’AC Milan. Mais, contrairement à ce qui se passait jadis, elle est mise en valeur, aujourd’hui, dans un contexte de travail physique. Cette option ne plaît peut-être pas à tout le monde et je peux comprendre que Johan Cruyff, apôtre du football offensif, n’apprécie guère la manière des clubs italiens. Même si l’affiche de la finale de la Ligue des Champions atteste que ce football-là peut être très performant aussi. Je pense que le Hollandais a surtout voulu lancer un appel aux coaches afin qu’ils se prononcent pour un style moins calculateur. Y arrivera-t-on ? Tout dépendra de l’évolution et de l’identité de ceux qui serviront de modèles dans les mois à venir. Car ce sont eux, le plus souvent, qui servent de locomotives à ce niveau.

par Emilio Ferrera

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