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Un risque calculé

Peut-être était-il devenu trop rapidement entraîneur principal, nous confiait Ivan Leko il y a un an. Il était alors sur le point d’entamer son aventure à Saint-Trond et avait notamment parlé de Louvain, qui l’avait limogé après neuf mois. Leko, qui avait raccroché ses studs depuis peu, était trop proche des joueurs et privilégiait certains d’entre eux, d’après le club louvaniste. Le Croate avait balayé ces arguments, expliquant qu’il avait immédiatement imposé de la discipline à un vestiaire rempli d’egos et qu’après son renvoi, il avait reçu 18 sms de joueurs souhaitant le remercier.

Ivan Leko a toujours cru en lui-même. Joueur, il était déjà entraîneur, un homme qui ne cessait de réfléchir au jeu. Un jour, il avait dit qu’il réussirait une plus belle carrière au poste d’entraîneur. L’engager pour succéder à Michel Preud’homme est un risque mais un risque calculé. Ivan Leko connaît la maison. Il se distingue par sa passion. Son amour du football transpire par tous les pores de sa peau et il va diriger son équipe avec feu, de la ligne. C’est nécessaire car si le Club a un besoin, c’est bien de plus de grinta. L’absence de rage de vaincre sur le terrain énervait terriblement Michel Preud’homme, qui passait son temps à se répéter et à driller l’équipe.

Ivan Leko n’est évidemment pas le premier choix du Club Bruges, pas plus que René Weiler n’était celui d’Anderlecht. Le temps où les bons entraîneurs étrangers souhaitaient travailler en Belgique semble révolu, comme le démontre la longue quête du Standard, qui s’est finalement rabattu sur Ricardo Sa Pinto. L’ancien joueur portugais des Rouches en est à son neuvième club en huit ans. Le Standard n’a pas été plus stable durant cette période : depuis l’été 2010, il a usé douze entraîneurs.

Le Club Bruges s’est également heurté à la réservé des coaches étrangers. Il a ainsi eu une seule conversation avec Frank de Boer. Le Néerlandais n’était pas intéressé. Le Norvégien Stale Solbakken, qui n’émarge quand même pas à l’élite mondiale, n’a pas davantage accroché. Le Club s’est donc rabattu sur le marché belge, au sein duquel Felice Mazzù et Francky Dury n’ont jamais été de réelles options.

Ivan Leko a toujours été un leader. Il a enfilé le brassard au Hajduk Split très jeune. Il a toujours paru plus intelligent que les autres. Il ne lui a manqué qu’une pointe de vitesse pour réussir une grande carrière dans l’entrejeu. Après des débuts difficiles, il a accompli un excellent travail à Saint-Trond, même si la prolongation de son contrat a tardé. Leko est un adepte de la collectivité. Il apprécie l’approche des entraîneurs italiens, les meilleurs du monde, à ses yeux. Il a souvent loué la tactique d’Antonio Conte, qui a mué l’Italie en grande équipe à l’EURO, alors qu’il n’avait pas de vedettes.

Le tempérament de Leko convient bien au Club. Il lui arrive d’exagérer et de se disputer avec le corps arbitral mais il n’est pas le seul en Belgique. Leko est malgré tout propulsé dans un autre univers. Il subira plus de pression de sa hiérarchie mais quelqu’un qui a travaillé sous les ordres de Roland Duchâtelet doit pouvoir gérer ce genre de situation.

Ivan Leko doit former une équipe qui porte chaque semaine les valeurs du Club. Il sait ce qu’il veut : un football passionné, de la vitesse, des actions, le sens du but. Il entraîne les automatismes, veillant à générer trois ou quatre solutions. Il peut parler de football avec passion. Il le fait plus loin dans ce magazine. Il n’attend pas, il opère avec un bloc : il attaque avec six, défend avec dix. Reste à transposer tout ça au Club Bruges. Et à prouver qu’il possède le bagage requis pour entraîner au plus haut niveau.

par JACQUES SYS

Le tempérament d’Ivan Leko convient bien au Club Bruges.

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