Un « petit club » qui monte

Le distributeur de Malaga va disputer sa deuxième finale de Coupe Korac et peut devenir le premier belge à la remporter.

Jean-Marc Jaumin disputera, ces 11 et 18 avril, la finale de la Coupe Korac face à Vrsac, les tombeurs d’Ypres. La demi-finale face à Amsterdam n’a été qu’une formalité pour l’équipe espagnole. Déjà victorieuse 46-59 aux Pays-Bas voici quinze jours, elle s’est encore imposée 86-55 à domicile mercredi passé. Pour notre compatriote émigré en Andalousie, ce sera la deuxième finale européenne d’affilée. Celle de la saison dernière, perdue face à Limoges, lui laisse un goût amer.

Jean-Marc Jaumin: Lors du match aller en France, nous avions malheureusement livré notre plus mauvaise prestation de la saison. C’était un off-day et il a fallu qu’il survienne ce jour-là. L’écart de 22 points concédé dans le Limousin s’est avéré insurmontable lors du match retour, malgré le soutien de nos supporters. Au repos, nous avions pourtant refait une partie de notre retard. Nous menions de 14 points. Mais Limoges est une équipe intelligente qui sait gérer ce genre de matches. Ce qui m’incite à l’optimisme, c’est de constater que je progresse. Chaque année, je franchis un palier. Voici deux ans, j’avais échoué en demi-finale avec Ostende. L’an passé, j’ai échoué en finale. La logique voudrait que, cette année, je remporte la finale. Mais je ne veux pas le crier trop haut.

Vous pourriez devenir le premier Belge vainqueur d’une coupe européenne?

N’anticipons pas. Chaque match est à jouer. Mais ce serait super qu’un Belge remporte enfin une coupe européenne, non?

Malaga est-il plus fort que la saison dernière?

Beaucoup plus fort. Les douze joueurs qui composent l’effectif sont tous des titulaires potentiels. Le club est sponsorisé par Unicaja, la plus grande banque d’Andalousie, et possède le troisième budget d’Espagne. Une nouvelle salle de 9.000 places a été construite. Mais la pression est énorme. Si l’on a engagé Frédéric Weiss, Mustapha Sonko et Kenny Miller, ce n’est pas pour faire de la figuration. Il y a aussi de jeunes Espagnols qui pointent le bout du nez. Berni Rodriguez commence pratiquement tous les matches. Carlos Cabezas affiche ses prétentions au poste de distributeur. Il y a donc trois distributeurs et c’est une concurrence avec laquelle je dois composer. Il faut chaque jour mériter sa place par son travail à l’entraînement.

Pour Malaga, la Coupe du Roi – qui était organisée dans votre salle cette saison – constituait l’un des grands objectifs de la saison. Raté: vous avez été éliminé dès le premier match.

Nous n’avons pas eu de chance au tirage au sort. La Coupe du Roi est disputée par huit équipes: les sept mieux classées à la mi-championnat, plus le club organisateur. Lors du tirage au sort, les équipes sont réparties dans deux chapeaux: les quatre premiers d’un côté, les quatre autres de l’autre côté. Par malchance, nous étions 5e à ce moment-là alors qu’actuellement, nous sommes 2e. Nous avons hérité du Real Madrid dès le premier match. Nous avons perdu de trois points alors que nous menions encore à l’entrée du money-time. C’était notre première défaite après dix victoires d’affilée, toutes compétitions confondues, mais elle est très mal tombée. Cet échec en quart de finale de la Coupe du Roi a accentué la pression sur les épaules des joueurs, car le club a beaucoup investi et veut à tout prix remporter un trophée. A défaut de la Coupe du Roi, il lui faut la Coupe Korac.

Ce serait donc un trophée de consolation?

En quelque sorte, oui.

Et le championnat?

L’objectif, pour Malaga, est de participer aux demi-finales des playoffs afin de participer à l’Euroligue la saison prochaine. C’est réalisable, mais pour le titre, il ne faut pas se faire trop d’illusions. Le titre est très difficile à conquérir en Espagne. La saison dernière, nous menions 2-1 en quart de finale des playoffs face à Barcelone, avec quatrième match à suivre chez nous. Nous avons perdu nettement les 4e et 5e matches, avec un arbitrage que je juge tendencieux. Parfois, j’ai l’impression que le Real Madrid et Barcelone doivent à tout prix se retrouver en finale. Ce n’est pas de bon ton qu’un « petit club » qui monte, comme Malaga, vienne bousculer la hiérarchie établie. Cette saison encore, j’ai l’impression que ce sera plus facile de remporter la Coupe Korac que le championnat d’Espagne. Outre les favoris traditionnels que sont le Real Madrid et Barcelone, on trouve pas mal d’autres formations aux dents longues, comme Valence, Taugrès Vitoria ou Estudiantes Madrid.

La Coupe Korac est-elle dévaluée cette saison?

Si je la remporte, j’aimerais répondre que non, mais objectivement, le niveau a baissé par rapport à la saison dernière. La scission entre la FIBA et l’ULEB a privé les coupes européennes de quelques équipes-phares. Cette saison, après la poule qualificative où nous avons affronté Ypres, Le Mans et Strasbourg, nous avons éliminé Dijon, Ramat Gan et Amsterdam. Et, avec tout le respect que je dois à Vrsac: ce n’est pas Limoges. La compétition de cette année n’avait plus de Coupe Korac que le nom. Mais, si je la remporte, je ne cracherai évidemment pas dessus.

Bozidar Maljkovic non plus?

Certainement pas. Elle lui tient d’autant plus à coeur que c’est la seule compétition européenne qui manque encore à son palmarès.

Un entraîneur à la carte de visite impressionnante…

Assurément. Je suis surtout impressionné par l’Euroligue qu’il a remportée avec Limoges en 1993. C’était un véritable exploit, car l’équipe française était loin d’être la favorite. Remporter l’Euroligue avec Panathinaikos, c’est un exploit aussi, mais avec les moyens dont dispose le club grec, c’est plus facile.

C’est votre deuxième saison en Espagne. Satisfait de cette expérience?

Certainement. J’ai beaucoup progressé depuis que je joue en Espagne et je pense l’avoir démontré chaque fois que je suis revenu défendre les couleurs de l’équipe nationale. Je dispute chaque semaine des rencontres de haut niveau. Un match de championnat d’Espagne équivaut à une demi-finale de Coupe Korac avec Ostende. Chaque semaine, il faut monter sur le terrain le couteau entre les dents. La saison dernière, Maljkovic m’avait confié pas mal de responsabilités. Je dois les avoir assumées assez bien, puisqu’il m’a repris dans son effectif. Cette saison, j’avais très bien débuté, mais j’ai connu une baisse de régime.

L’arrivée de Mustapha Sonko vous a-t-elle fait de l’ombre?

Au début, j’avais craint qu’il ne soit un concurrent direct et que mon temps de jeu en subisse les conséquences. Mais, très vite, Maljkovic a trouvé les moyens de nous faire jouer ensemble. Le problème, pour moi, ne réside pas là.

Ces dernières semaines, vos statistiques semblent en baisse.

C’est la réalité. Cela allait très bien jusqu’au mois de novembre. Puis, l’équipe nationale a brisé mon élan. Pendant dix jours, je ne me suis plus entraîné aussi intensivement qu’en Espagne. Là-bas, on s’entraîne deux fois par jour, durant deux heures, à fond. Avec les Belgian Lions, c’étaient plutôt des mises au point tactiques. L’équipe nationale belge évolue également à un rythme plus lent que Malaga et je l’ai ressenti lorsque je suis retourné en Espagne après les trois matches de novembre. Par la suite, les deux blessures dont j’ai été victime, coup sur coup, n’ont rien arrangé. Je suis resté trois semaines inactif et cela s’est payé. Aujourd’hui encore, j’essaye de retrouver le rythme qui était le mien en début de saison. Je manque de confiance également. Il me faudrait un grand match pour me relancer. Mais ce n’est pas facile. Maljkovic est impitoyable. Seul le rendement compte: il ne fait pas de sentiments.

Serez-vous toujours à Malaga la saison prochaine?

C’est le grand point d’interrogation. Malaga possède une option sur moi qu’il n’a pas encore levée. J’attends. Si le club lève l’option, je reste. En cas contraire, mon agent se chargera de me trouver un nouveau club. J’aimerais rester en Espagne, et si Malaga ne compte plus sur moi, je n’éprouverai pas trop de mal à me recaser ailleurs. Lorsque je vois les autres distributeurs du championnat espagnol, j’ai l’impression que je parviendrais sans peine à jouer 30 minutes dans une équipe moins ambitieuse que Malaga. L’Italie me plairait aussi. Mais j’ai encore le temps d’y songer.

Daniel Devos

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire