» Un parcours pour PHILIPPE GILBERT « 

 » Pour un spectateur neutre, le championnat du monde n’est pas une course très spectaculaire « , dit Johan Museeuw. Le vainqueur du maillot-arc-en-ciel 1996 à Lugano se réjouit pourtant d’être dimanche.  » Boonen ne doit pas spéculer sur un sprint, il doit attaquer.  »

« Partout où je vais, on me présente encore comme le champion du monde « , dit Johan Museeuw (48).  » C’est un titre qu’on garde toute sa vie. Beaucoup de coureurs bien meilleurs que moi ne l’ont jamais été.  »

C’est un peu malgré lui qu’il a rompu les ponts avec le peloton ( » A cause de cette affaire de dopage, on ne m’a jamais proposé de place de directeur sportif « ) mais il ne continue pas moins à s’intéresser au cyclisme. Et s’il n’ira pas à Ponferrada, c’est parce que son fils Stefano (16) dispute un cyclo-cross ce week-end.

 » Cette distance me permet de donner mon avis librement « , dit-il.  » Et je m’inquiète pour l’avenir de notre cyclisme. Les formations étrangères ne viennent déjà plus ici pour apprendre, nous sommes opposés à toute évolution, nos coureurs ne s’entraînent pas assez de façon spécifique et de plus en plus d’équipes de jeunes arrêtent, même celle de Patrick Lefevere.  »

Il lance donc un appel :  » Il est urgent que des gens expérimentés se réunissent, qu’on dégage des budgets pour partir en stage à l’étranger, pour créer des centres d’entraînement en Ardenne et en France, histoire de former aussi des grimpeurs.  »

De la clarté avant toute chose

Heureusement, le circuit de Ponferrada convient davantage aux coureurs de classiques.

Johan Museeuw : Nous avons sans doute une chance de l’emporter mais nous ne sommes pas favoris. Le parcours semble taillé sur mesure pour PhilippeGilbert mais je n’ai pas vu un grand Gilbert à la Vuelta. Pareil pour TomBoonen. Ceci dit, je peux me tromper : avec leur statut, ils n’ont pas besoin de se montrer avant un championnat du monde. Moi-même, je prenais part à des semi-classiques puis j’allais encore rouler jusqu’à 300 km pour être sûr d’être prêt. Et Boonen a été champion du monde en 2005 sans avoir gagné une seule étape de la Vuelta. C’est donc avant tout leur sensation qui compte. S’ils n’étaient pas bien, ils ne prendraient pas le départ.

D’aucuns pensent que Carlo Bomans devrait jouer la carte de Greg Van Avermaet, qui est en grande forme.

Je vois mal Carlo dire à deux ex-champions du monde qu’il va jouer la carte d’un gars qui n’a pas encore gagné une seule grande course. Je pense que les rôles sont bien répartis et Tom n’hésitera pas à rouler pour VanAvermaet si le besoin s’en fait sentir.

Boonen a-t-il une chance sur un parcours avec 4284 m de dénivelé ? A Madrid, il n’y en avait que 2.900.

Tom ne le saura qu’après plusieurs tours mais c’est vrai que c’est beaucoup. Selon SepVanmarcke, on peut comparer ce circuit à celui du championnat de Belgique à La Roche. Et là, Tom n’avait pas été à la hauteur.

Boonen peut-il battre Degenkolb ou Gerrans au sprint ?

Je crains que non. A sa place, j’attaquerais, comme je l’avais fait à Lugano, sur un circuit qu’on disait trop dur pour moi aussi.

Ça risque de provoquer des conflits d’intérêt.

Les choses doivent être claires dès le départ. Pas comme en 2010, quand Gilbert est allé rechercher Van Avermaet. Mais plutôt comme en 2005, quand VanPetegem a bouché le trou pour Tom.

La pression sur l’Espagne et l’Italie

A l’époque, le sélectionneur, c’était José De Cauwer, dont on dit qu’il avait plus d’autorité naturelle que Bomans.

Je me suis posé la question aussi mais Carlo a beaucoup évolué, il est moins timide. Et surtout, il ne se laisse influencer par personne, même pas par Lefevere. Même si, à sa place, j’aurais sélectionné JasperStuyven pour qu’il prenne de la bouteille.

Et vous, ce job ne vous dit rien ?

Si mais Carlo est en place. De plus, les meilleurs directeurs sportifs sont souvent d’anciens coureurs plus modestes. Les stars sont trop tournées vers leur nombril.

Quelle est la mission principale d’un sélectionneur ?

Communiquer, prendre le pouls et déterminer une tactique à suivre. Ce groupe est expérimenté, cela ne devrait pas poser de problème.

Et l’aspect financier ?

Les médias exagèrent toujours. A mon époque, la fédération promettait une prime et celui qui pensait pouvoir être champion du monde ajoutait la même somme à partager entre tous ses équipiers. Je suppose que cette fois, ils seront quatre à le faire.

Comment le leader doit-il se comporter ?

Il doit être comme le coach : relax. Parler de tout et de rien avec les équipiers mais pas trop de la course.

Cette année, la pression sera plutôt sur les épaules des Latins ?

C’est notre plus gros atout. Laissons faire la course aux Espagnols et aux Italiens, qui n’ont pas de sprinters, et tentons de profiter de leurs attaques. Ceci dit, il ne sera pas facile de décrocher Degenkolb et Gerrans. Ça risque de se jouer sur la fin, peut-être même dans le tout dernier tour.

Belle mais ennuyeuse

Il risque donc d’y avoir peu de spectacle.

Le championnat du monde, c’est la plus belle course pour celui qui la gagne mais c’est aussi la plus ennuyeuse et la plus simple sur le plan tactique. Les meilleurs gardent leurs forces pour la dernière ascension. Pour le spectateur neutre, ce n’est pas très spectaculaire.

Qu’est-ce qui différencie un championnat du monde d’une classique ?

Le fait de rouler en circuit rend la course plus facile à contrôler. Les favoris peuvent se cacher pendant cinq heures en queue de peloton, ce qui n’est pas possible au Tour des Flandres ou à Liège-Bastogne-Liège. OscarFreire n’avait pas son pareil pour faire cela : on ne le voyait pas pendant 250 km puis il surgissait comme un diable de sa boîte.

PAR JONAS CRETEUR – PHOTOS: BELGAIMAGE

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