UN MILIEU POUR PEP

L’été 2013 vient à peine de poser ses valises sur la Säbener Strasse. Débarqué en même temps que Pep Guardiola, le soleil est de la partie pour admirer le technicien catalan distribuer les consignes à Toni Kroos. Lors de leur première rencontre, le plus beau pied droit d’Allemagne est encore un numéro 10 au style vintage, champion d’Europe en titre sous les ordres de Jupp Heynckes, mais trop mal à l’aise sous la pression permanente de défenseurs qui ne le laissent pas respirer entre les lignes. Puisque Kroos passe son temps à décrocher, Guardiola l’installe un échelon plus bas. Il travaille minutieusement la position de son corps et son placement pour être toujours une solution de triangle dans la possession bavaroise. L’intelligence de l’Allemand complète la métamorphose. Quand Kroos quitte Pep, douze mois plus tard, c’est pour devenir le milieu le plus reculé du triangle axial de Carlo Ancelotti à Madrid.

Deux étés passent encore, jusqu’à celui de 2016. Guardiola s’installe alors sur le banc de Manchester City, et donc sur la route de Kevin De Bruyne. Le Belge sort d’une saison à 17 buts, toutes compétitions confondues, sous les ordres de Manuel Pellegrini, qui n’hésite pas au moment de réciter la définition de son key-player :  » Kevin peut jouer à trois postes : derrière l’attaquant ou sur les deux flancs. Il est très dynamique et son football est très direct.  » Le premier KDB des Citizens est plus un attaquant qu’un milieu de terrain. Mal à l’aise sous pression, il la fuit sur le côté ou dans la profondeur, et agrémente son style électrique d’un goût du risque permanent : 5,2 occasions par match et 78 % de passes réussies.

 » Avec le ballon, Kevin voit tout. Il prend toujours la bonne décision « , pose Guardiola. Un diagnostic qu’il avait déjà établi pour le football de Toni Kroos, ajoutant ainsi De Bruyne à la catégorie des joueurs con criterio, capables de multiplier les bons choix. Le genre d’homme que Pep veut absolument au coeur de son jeu. Alors, KDB recule. Une évolution qu’il va jusqu’à expliquer lui-même :  » J’ai toujours dit que plus ma carrière avancerait, plus je jouerais bas.  » Ou encore :  » Les joueurs qui m’entourent sont si bons en un-contre-un, moi je suis plutôt un passeur.  »

Guardiola préfère offrir la zone de vérité aux dribbles de Raheem Sterling ou de Leroy Sané, et place son Belge un cran derrière eux, parce qu’il fait partie de ces rares joueurs capables de les servir dans des conditions optimales.  » Il voit les espaces que d’autres ne voient pas, et il donne la bonne passe en une fraction de seconde « , confirme le coach des Skyblues.

Les chiffres appuient la thèse d’une métamorphose. De 45,1 passes par match sous Pellegrini, De Bruyne est passé à 73,5, tout en augmentant significativement sa précision (de 78 à 84 % de passes réussies) et l’impact sur le jeu des siens (il effectue 11 % des passes de City, contre 8 % avant l’arrivée de Guardiola). L’attaquant hyperactif débarqué de Wolfsburg est en train de devenir un milieu de terrain.

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