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Un hand à Visé en vaut deux

Qualifié pour les quarts de finale de la Challenge Cup, le HC Visé BM est occupé à écrire l’une des plus belles pages du handball wallon. Mais, à Visé, le HC n’est pas seul et doit partager l’affiche avec le Femina.

Historique ! Voilà comment décrire la soirée du 17 février 2019 pour le Handball Club Visé Basse-Meuse. Ce soir-là, sur les hauteurs de la cité mosane, le sept visétois est venu à bout du HC Masheka (36-34), confirmant la victoire obtenue sur le fil en Biélorussie (31-32) une semaine auparavant. Avec cette qualification, le club belge atteint les quarts de finale de la Challenge Cup, la plus petite des Coupes d’Europe de handball (C3), pour la première fois.

En BeNe League, la saison des Mosans épouse la même courbe de réussite puisqu’ils sont assurés de terminer à la 2e place et de participer au Final Four fin mars au Sportpaleis d’Anvers. En Coupe de Belgique, le parcours des Visétois s’est arrêté en demi-finale, face à Bocholt… principal concurrent au titre tant en BeNe League qu’en championnat de Belgique.

 » Nous sommes dans la dernière ligne droite « , lance Korneel Douven, le coach du club.  » C’est maintenant qu’il faut se montrer performant. Le titre se jouera sur un week-end alors, tout est possible. La forme du moment sera très importante. On manque encore un peu d’expérience, mais on a un groupe solide.  »

Dans l’ombre des hommes cette saison, l’équipe du Fémina Visé sait ce que rafler des titres veut dire. Avec ses 12 championnats de Belgique et ses 13 Coupes de Belgique, le Fémina est, en effet, un poids lourd du handball belge.

Porte-drapeaux

Aussi bien chez les femmes que chez les hommes, le handball visétois fait office de locomotive liégeoise et même wallonne. En BeNe League, le HC Visé BM est le seul club wallon tandis que chez les dames, Raeren-Eynatten est l’autre équipe de D1 issue du sud du pays.

Alors que le football a longtemps été le sport numéro 1 dans la Cité de l’Oie, la faillite du CS Visé a laissé un vide que l’URSL Visé et Richelle n’ont pas encore réussi à combler. Depuis, c’est donc le handball qui est devenu le sport roi avec ses deux clubs évoluant au plus haut niveau belge. Et là où les deux clubs de foot évoluent dans un stade plus souvent vide que plein, les deux clubs de hand font eux salle comble régulièrement.

 » C’est vrai qu’on est les deux meilleurs clubs de la ville, sans oublier le rugby « , reconnaît Yves Vancosen, le capitaine de l’équipe masculine.  » On fait pas mal parler de la ville avec nos résultats et on sent qu’il y a plus de public qu’avant. Comparativement au passé, il y a nettement plus d’engouement. Pour nous, cela ne change pas grand-chose si ce n’est qu’il y a plus d’attentes. Et donc, aussi, un peu plus de pression.  »

Si, cette année, ce sont surtout les hommes qui font les gros titres des journaux avec leurs résultats en championnat et en Challenge Cup, pas question d’une quelconque jalousie de la part des femmes.  » On est même contentes pour eux « , affirme avec conviction VéroniqueLensen, la présidente du Fémina.

Esprit de famille

 » Cela reste le même sport, donc on est super fières ! Il y a une vraie bonne entente entre nous. Les filles vont voir les garçons jouer, et vice-versa. Le hand, à Visé, c’est un esprit de famille. On organise des choses ensemble pour souder les liens. D’ailleurs, il y a même des couples qui se forment « , sourit-elle.

L’entraide, notamment en Coupe d’Europe, est bien réelle et quelque chose est en train de se mettre en place entre les deux clubs. Chez les jeunes, une cellule commune permet d’optimiser la formation, le Fémina ne possédant pas d’équipes d’âge. Mais si les deux clubs partagent une histoire commune, pas question d’envisager de reformer un seul et même club.

 » On veut garder ce qu’on a mis en place, notamment par respect pour notre ancien président, Marcel Neven, qui a longtemps porté le club à bout de bras « , lâche la présidente du Fémina.  » C’est déjà compliqué de gérer un gros club, alors s’il fallait encore l’agrandir en s’unissant aux femmes, je ne sais pas comment on ferait « , s’interroge de son côté ArthurHoge, le président du HC Visé BM.

En revanche, là où les relations peuvent parfois un peu coincer, c’est dans le partage des infrastructures. Visé ne possède qu’une seule salle omnisports et les deux clubs de handball doivent donc la partager du mieux qu’ils le peuvent.

Les dirigeants masculins regrettent également la vétusté des installations.  » Le sol n’est pas bon et on a souvent des blessures à cause de cela. La lumière n’est pas terrible non plus. Et puis, en ce qui concerne la capacité, avec nos 400-500 places, on est loin de ce qui se fait dans le Limbourg avec plusieurs salles à 1000 places.  »

Hégémonie limbourgeoise

Le Limbourg. Le nom est lancé. Depuis 2002 et le troisième titre consécutif du HC Eynatten-Raeren, c’est cette province qui domine largement la compétition belge masculine et même la BeNe League depuis 2012. Tongres, Hasselt, Neerpelt et Bocholt ont, plus qu’une domination, installé une véritable hégémonie provinciale.

En cause, des budgets plus importants et la proximité avec les Pays-Bas qui ont permis aux clubs limbourgeois d’enrôler de nombreux joueurs néerlandais mais aussi les meilleurs francophones.

 » Le Limbourg a une vraie tradition de handball « , ajoute Korneel Douven, lui-même Limbourgeois.  » Dans le nord de la province, où il n’y a pas de grands clubs de foot, c’est le sport n°1 aussi, parce que beaucoup de prof de sports le font découvrir à leurs élèves.  »

Chez les femmes, c’est aussi le Limbourg qui a imposé sa domination sur le championnat. Mais par rapport aux hommes, le rapport de force entre Liégeoises et Limbourgeoises s’est inversé il y a moins longtemps, le Fémina Visé coiffant encore les lauriers en 2014 (son 12e titre depuis 1997).

 » Plus qu’une question de moyens et de sponsors plus généreux, je pense que c’est surtout une question de transferts « , analyse Véronique Lensen.  » Ce n’est jamais la même équipe qui a été championne. De notre côté, nous avons misé sur les jeunes en ne faisant pas un seul transfert et plusieurs blessures de très bonnes joueuses nous ont freinées. Nous n’avons plus des gros noyaux et nos seules étrangères sont des étudiantes françaises qui jouent avec les Espoirs.  »

Loin d’accepter cette omniprésence limbourgeoise aux premières places, le Fémina entend bien retrouver les sommets.  » Notre but est simple : refaire le doublé championnat-coupe « , lance la présidente. Un souhait qui ne se réalisera pas en 2019, ses filles ayant été sorties en demi-finale de la Coupe.

Statut amateur

La qualification du HC Visé BM pour les quarts de la C3, où il rencontrera Saint-Pétersbourg, est d’autant plus incroyable que le club de la Basse-Meuse a toujours le statut amateur.  » Devenir professionnel, ce serait ingérable. Nous n’avons pas les moyens pour cela « , réplique le président, Arthur Hoge.  » En revanche, on essaye de professionnaliser notre organisation, notre manière de gérer le club.  »

Reste que le groupe visétois compte déjà quelques  » pros  » en ses rangs. Plusieurs étrangers ont ainsi été engagés par le club en tant qu’animateur des équipes de jeunes. Ils s’entraînent six fois par semaine contre quatre aux autres joueurs, axant leurs séances supplémentaires sur le physique. Pour autant, les dirigeants visétois estiment avoir atteint la limite à ce niveau.  » Davantage de joueurs étrangers, cela demanderait un plus gros budget et nous ne l’avons pas.  »

Chez les femmes, le Fémina a lui aussi toujours le statut amateur et ne compte pas en changer de sitôt.  » Le handball n’est pas encore assez développé en Belgique pour cela « , juge la présidente.  » Financièrement, ce ne serait pas possible. Et puis, ce n’est tout simplement pas ce que nous recherchons. On tient à notre esprit de club et, avec la professionnalisation, cela risque d’amener des chamboulements chaque année dans l’effectif.  »

Du côté de la fédération aussi, on reste parfois amateur dans l’organisation et le HC Visé BM est bien placé pour le savoir à la suite de sa qualification en quarts de finale de la Challenge Cup. En handball, les matchs européens se jouent les week-ends et ce sont les rencontres de championnat qui sont décalées. Or, le quart de finale retour face à Saint-Pétersbourg tombe le week-end du Final Four de BeNe League.

Visas pour Saint-Pétersbourg

 » Visiblement, à la fédération, personne n’avait imaginé qu’un club belge ou néerlandais pourrait arriver à ce stade de la compétition… « , soupire-t-on à Visé. Avec un noyau de 28 joueurs, les Oies pourraient donc faire le choix de jouer les deux matchs… en même temps, le dimanche 31.

 » Selon le résultat au match aller, on choisirait quel noyau irait en Russie et lequel jouerait le Final Four. En attendant, pour être sûr, il faut préparer les visas pour 28 joueurs.  »

Plus que jamais auparavant, le HC Visé BM peut croire en sa bonne étoile dont la lumière pourrait bien le faire sortir définitivement de l’ombre du Femina Visé.  » Nous sommes là pour gagner des prix « , assure Korneel Douven…

Korneel Douven, le coach du HC Visé BM.
Korneel Douven, le coach du HC Visé BM.© BELGAIMAGE

Une longue tradition liégeoise

Au siècle passé, le handball est arrivé en Belgique via un Liégeois, Jules Devlieger. Pas étonnant, dès lors, que le plus vieux club encore en activité, Beyne, soit situé dans la région liégeoise. Avec 3 coupes à son actif, il fait partie de la famille nombreuse des clubs principautaires à avoir mis en avant le hand sur notre sol.

Outre Beyne, on retrouve des entités comme Flémalle (11 titres, dont 8 d’affilée entre 1958 et 1965 et 3 coupes), deuxième club le plus titré de Belgique, Herstal dont 3 clubs ont déjà joué en D1 (2 titres et 3 coupes), Seraing (2 titres et 2 coupes) et Raeren-Eynatten (3 titres et 1 coupe).

A Visé, le handball est introduit à l’Athénée local par deux professeurs, au milieu des années 50 : l’Amicale Visé est ainsi lancée. En 1975, la section féminine se sépare des hommes et c’est en 1986 qu’elle prend le nom de Fémina Visé.

Il faut attendre 1994 pour que la formation mosane commence à gagner des titres : 12 sacres et 13 coupes. A ce jour, elle reste la seule équipe wallonne féminine à avoir remporté tant le championnat que la coupe.

Le Français Vincent Bello fait partie des renforts étrangers du club bassi-mosan.
Le Français Vincent Bello fait partie des renforts étrangers du club bassi-mosan.© BELGAIMAGE

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