Un excité et des taiseux

Le Club a effectué un bon stage à Marbella. Juan Carlos Garrido n’a pas accueilli beaucoup de joueurs mais il a clarifié ses objectifs par des entretiens individuels.

Arnar Gretarsson l’avait annoncé : le mercato hivernal est tout sauf évident. Il semblait ainsi prévenir Juan Carlos Garrido de l’impossibilité de répondre immédiatement à sa demande de renforts. De fait, si on a associé des nouveaux noms au Club Bruges, jour après jour, le nouveau coach des Gazelles ne s’est entraîné qu’avec deux nouveaux arrières, dont un ne semble pas en mesure de jouer dans l’immédiat.

Les noms de renforts cités – DarrenKeet, le gardien de Courtrai, LaurensDe Bock, le défenseur de Lokeren, Junior Malanda, le médian de Zulte Waregem et EidurGudjohnsen, attaquant chez les voisins du Cercle, concernaient tous des joueurs de notre élite. Et de Flandre plus particulièrement. Il ne fallait donc pas aller très loin pour les débaucher. Est-ce à dire que la direction Bleu et Noir ne voyait pas plus loin que son nez ?

Pas du tout. Le nouveau DT islandais du Club savait pertinemment que pour obtenir un rendement immédiat, il devait transférer des joueurs qui connaissent notre championnat. Ce quatuor répondait à ce critère mais, au moment de boucler le présent reportage, seuls deux dossiers avaient été finalisés : celui du néo-Diable Rouge de Daknam ainsi que celui du voisin.

Un passage qui aura fait des remous dans la Venise du Nord, les partisans du Cercle arguant que les voisins voulaient ni plus ni moins leur mort en optant pour leur buteur providentiel. En haut lieu, ceux-ci ripostaient en faisant remarquer que businessisbusiness. Et c’est justement parce que la barre était parfois placée très haut qu’un coup comme le gars du Gaverbeek, cité pour 5 millions d’euros en Angleterre, devenait subitement injouable.

A mi-chemin du mercato, le Club doit donc se contenter, pour l’heure, de De Bock et d’Oscar Duarte, un défenseur costaricain de 23 ans. A priori, l’international n’est pas encore suffisamment armé pour prétendre à une place de titulaire. Lors de son premier match, il n’a pas pris la moindre initiative et paraît fort lent à la relance. Le garçon a une marge de progression, c’est sûr, mais il constitue plutôt un investissement à terme, comme Carlos Bacca l’année dernière. Il a d’ailleurs réalisé que la vie dans un grand club européen n’est pas toujours rose : mercredi dernier, après le match contre Nuremberg, Garrido a donné congé au groupe le reste de l’après-midi et le soir. Duarte est resté tout seul à l’hôtel, personne n’ayant pensé à lui.

Le lapin Duracell

Le stage a été instructif et positif : le Club a battu Nuremberg et Feyenoord et sans une bourde de dernière minute contre le FSV Mainz 05, il aurait arraché le nul. Le Marbella Football Center offre des conditions d’entraînement remarquables et a accueilli des équipes de tous horizons, ce qui a permis de découvrir différentes approches. Ainsi, Gianny De Vos, l’entraîneur des gardiens de Zulte Waregem, a mis une matinée de liberté à profit pour observer ses collègues. Les Allemands continuent à attacher beaucoup d’importance à la course et à la puissance. Après leur match contre le Club, les joueurs mayençais ont dû abattre quatre fois mille mètres à une vitesse moyenne de 14 km/h. Le lundi matin, les footballeurs du Fortuna Düsseldorf ont été astreints à un parcours du combattant.

Ceux qui ont assisté au stage précédent du Club savent de quoi nous parlons. Christoph Daum avait ignoré toutes les données scientifiques, les tests de lactate etc. pour driller les joueurs. Garrido aussi mais autrement. Chaque séance débute par des exercices de stabilisation et de souplesse. Ensuite, place au travail avec ballon. Garrido contraint les joueurs à affûter leur technique en les faisant jouer dans des espaces restreints. Les gardiens ayant participé à ces exercices, Philippe Vande Walle a souvent été réduit au chômage technique. Le Club a constamment eu recours à deux terrains, les joueurs passant de l’un à l’autre, non sans quelque nervosité quand ils n’allaient pas assez vite au gré de Garrido.

Celui-ci attache de l’importance à l’esprit de groupe : il a donc emmené en stage les blessés, Jim Larsen, MaximeLestienne et JonathanBlondel, de même que l’ensemble du staff, y compris le psychologue Rudy Heylen, l’interprète Dévy Rigaux et même le scout Stephan Van der Heyden. Arnar Gretarsson et le président Bart Verhaeghe sont venus à deux reprises.

Deux personnes ont assumé la majeure partie du travail de terrain : Garrido et son adjoint Jorge Simo, un homme taiseux et renfermé qui bouge sans arrêt et rappelle le lapin Duracell. Si les joueurs sont sous la douche, il se glisse au fitness pour quelques exercices de musculation. Entre deux entraînements, nous avons vu l’ancien professeur de gym de Garrido effectuer un footing. Simo regorge d’expérience : ce fanatique a travaillé pour Valence et le Real. Les joueurs racontent en riant qu’il fait des abdos à table, en mangeant. Ce n’est pas impossible…

Un taiseux de plus

À part ça ? Maxime Lestienne va mieux. Le quatrième jour, il a pu… marcher. Victor Vazquez, tracassé par plusieurs maux, a raté quelques entraînements, comme Thomas Meunier. Lior Refaelov, lui, n’a pas toujours fait preuve de concentration dans les exercices sans ballon et la stabilité n’est pas vraiment la tasse de thé de Vadis Odjidja.

Le coach du Club a également profité du stage pour avoir plusieurs entretiens individuels avec Ryan Donk, qu’il aligne dans l’entrejeu. On a pu remarquer aussi que le groupe est calme, dépourvu de coaches. C’est frappant lors des matches : Niki Zimling, Donk, Odjidja, qui sont quand même les leaders, se taisent. Carl Hoefkens crie, comme les gardiens VladanKujovic et SvenDhoest. BojanJorgacevic, très sollicité et brillant contre le FSV, est, lui, d’un naturel placide aussi.

Laurens De Bock, aligné à gauche dans la défense centrale et non à l’arrière gauche, a été très réservé, voire taiseux.  » Je préfère me tenir en retrait. Un nouveau venu ne doit pas trop parler.  »

Mercredi, nous avons rendu visite à Lokeren, en stage à Benahavis. Peter Maes nous a parlé de son ex-joueur.  » Laurens a énormément gagné en maturité. On le voit dans sa manière de diriger les autres, de les entraîner, même à l’entraînement. Dès qu’il sera titulaire au Club Bruges et qu’il aura trouvé ses marques, il va poursuivre sur sa lancée. Il ne peut se contenter de défendre. D’ailleurs, je ne l’ai pas formé ainsi mais Laurens n’est pas de ceux qui s’imposent. Il survit grâce à ses qualités.  »

De Bock sourit quand nous lui rapportons les propos de Peter Maes.  » Il faut être bien dans sa tête pour jouer sous ses ordres. Il a une grande part dans mon transfert car il m’a remonté quand il le fallait et il m’a toujours beaucoup parlé.  »

Selon Maes, De Bock ne restera pas au coeur de la défense brugeoise.  » Il est un pur arrière gauche, même s’il est capable de jouer dans l’axe.  » D’autres partagent son avis car De Bock est fort dans les duels, il est rapide et attaque bien mais son jeu de tête est perfectible. De Bock nuance :  » Tout le monde ne partage pas cet avis.  »

Où que ce soit, il doit avant tout gagner ses galons de titulaire. Bruges a déjà deux arrières gauches, FredrikStenman et l’amuseur de service, Bart Buysse. Dans l’axe, il reste une place, puisque Michael Almebäck a été renvoyé, que Jordi Figueras a rejoint le Rayo Vallecano et que Larsen n’est pas encore rétabli. De Bock :  » Mes objectifs ? Être titulaire. Ensuite, j’espère que nous lutterons jusqu’au bout pour le titre. Si je me distingue avec le Club, j’attirerai peut-être l’attention du sélectionneur.  »

Peut-être cette perspective l’a-t-elle dissuadé d’émigrer.  » J’ai plus de chances de jouer ici qu’à Reading. Je ne veux pas sauter d’étapes. Je ne pense pas que se retrouver en Angleterre à vingt ans soit idéal. « 

PAR PETER T’KINT À MARBELLA (ESPAGNE)

Le Club n’a pas de coaches sur le terrain.

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