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Un entraîneur pour 52 jours

Les entraîneurs allemands redeviennent à la mode en Belgique. Dans le passé, Anderlecht a également jeté son dévolu sur un technicien teuton, mais ça n’a pas duré.

Aux Pays-Bas, avec Vitesse, il avait réalisé de l’excellent boulot. Et donc, pendant l’été 1995, Anderlecht a mis la main sur l’Allemand Herbert Neumann pour succéder à Jan Boskamp. Avec ses idées novatrices, il devait bousculer la hiérarchie établie dans le foot belge. C’était, du moins, le discours qui prévalait lors de son engagement. C’était un choix surprenant.

Au début, tout se passait bien. Neumann, qui avait 42 ans à l’époque, était loué pour son approche rafraîchissante. Mais l’idylle n’a pas duré. Car l’Allemand n’a pas réussi à mettre l’équipe sur ses rails, et lors d’une mission de scouting à Budapest, où il devait visionner le prochain adversaire européen, Ferencvaros, tout a dérapé. À la rédaction, nous nous sommes dit que le temps était venu de réaliser une interview du gaillard. D’autant que, d’après les rumeurs, l’Allemand se comportait de manière hautaine vis-à-vis des joueurs. Sa tendance à toujours insister sur les aspects négatifs commençait à irriter.

 » Une interview d’une heure ? C’est long ! « , avait répondu Neumann lorsque nous l’avions contacté.  » En réalité, dans la situation actuelle, je ferais mieux de me taire. Mais vous êtes évidemment le bienvenu.  » Neumann, qui avait été un artiste dans l’entrejeu du FC Cologne lorsqu’il était joueur, apparaissait très tendu derrière son bureau, par un jeudi étouffant. Il allumait régulièrement une cigarette, éludait beaucoup de questions, en laissait d’autres sans réponse, mais clarifiait tout de même certains aspects. Il voulait discuter avec les joueurs, trouver des solutions, mais il se heurtait souvent à un mur. Il savait que beaucoup se retournaient contre lui, que les résultats ne plaidaient pas en sa faveur, mais un licenciement était la dernière chose qui lui venait à l’esprit.

C’est ainsi que l’interview se déroulait dans une ambiance bizarre. Neumann savait, par exemple, que certains joueurs n’appréciaient guère le fait qu’il arrête régulièrement l’entraînement pour apporter des corrections. Il se défendait de ces remarques avec un certain flair :  » C’est tout de même l’un des principaux aspects du métier d’entraîneur, non ?  » Il avait aussi entendu qu’on lui reprochait un manque de communication, mais concernant cela aussi, il avait sa réponse :  » J’ai toujours dit que si quelqu’un avait quelque chose à me reprocher, il pouvait venir me trouver. Mais ce n’est jamais arrivé. Je n’ai jamais entendu un joueur avouer qu’il évoluait en-dessous de son niveau. C’est plus facile de chercher des excuses.  »

Herbert Neumann discutait pendant une heure. Pendant l’entretien, il avait reçu un coup de téléphone de Michel Verschueren, mais avait répondu qu’il était occupé. Il avait expliqué qu’il essayait d’améliorer l’équipe en adaptant les entraînements et en créant des situations où chacun entrait souvent en possession du ballon. Il n’avait pas voulu évoquer les prestations individuelles des joueurs, car il estimait que c’était contre-productif. Il répétait encore que les joueurs pouvaient venir le trouver s’ils avaient des questions. Et qui était venu le voir ?  » Personne « , reconnaissait Neumann. Il soupirait, en ajoutant qu’il s’était attendu à plus de force mentale de la part d’une équipe qui avait remporté trois titres d’affilée.

Le soir, Herbert Neumann recevait un nouveau coup de téléphone de Michel Verschueren. D’une voix informelle, il lui faisait savoir que la collaboration avec lui prenait fin. Au total, l’Allemand était resté au service d’Anderlecht pendant 52 jours. C’est Raymond Goethals qui prenait le relais. À la question de savoir ce qui devait changer,  » le Mage  » répondait :  » Tout.  » Les joueurs, cependant, ne partageaient pas tous cet avis. Marc Degryse, par exemple, trouvait que Neumann était un très bon entraîneur et qu’il aurait volontiers travaillé avec lui. Quant à Manu Karagiannis, il rejetait la responsabilité du malaise sur les épaules des joueurs.  » Si nous avions exécuté ce que l’entraîneur demandait, nous n’aurions pas rencontré autant de problèmes.  »

Lors du premier match sans Neumann, à domicile contre Saint-Trond, le Sporting avait mieux joué et Roger Vanden Stock déclarait après le coup de sifflet final que l’équipe était clairement mieux organisée. À ce moment-là, Herbert Neumann était chez lui, à Grimbergen. Il a gardé des séquelles de cet épisode. Par la suite, il a encore entraîné le NAC Breda, Vitesse et VVV Venlo. Mais il n’est jamais resté plus d’un an.

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