» TU NE RÉUSSIRAS JAMAIS « 

Qui est Mamadou Diallo, l’attaquant de Tubize, meilleur buteur de D2 ? De son bled au Mali jusqu’au Stade Leburton : zoom sur une carrière rythmée par les goals.

« Footballeur, ce n’est pas un métier « , lui disait sa maîtresse à l’école.  » Tu ne réussiras jamais « , lui avait sèchement lancé un de ses oncles au domicile familial après une dispute.  » Ça m’a doublement motivé « , raconte Mamadou Diallo (33 ans).  » Cette phrase me revient quand je le revois. On n’en rigole pas. Je lui montre juste qu’il s’est trompé.  »

Pour preuve, le Malien est professionnel depuis 2000 et compte près de 200 buts à son actif. L’ancien international a réalisé son rêve : Jeux olympiques, Coupe d’Afrique des Nations, Ligue 1, Moyen-Orient et maintenant Tubize : des aventures cultivées par une haine de l’ennui et la passion du ballon rond.

Déterminé et réservé. Voilà deux adjectifs qui collent au personnage. C’est déjà le cas quand il intègre le Centre de formation Salif Keita, l’ex-star malienne de Saint-Etienne récompensée du premier Ballon d’Or africain en 1970.

 » J’ai rapidement su que je voulais vivre du foot alors que d’autres rêvaient d’être pompiers ou médecins. Pour ça, il fallait que j’intègre ce centre puisque je n’avais pas été repéré dans le quartier par les recruteurs. J’ai donc payé l’inscription moi-même.

Je demandais des sous à mes parents pour m’acheter des chaussures. Je les gardais précieusement pour obtenir ma carte de membre. Quand j’ai commencé le football, mes parents n’étaient même pas au courant.  »

C’est plutôt sa grand-mère qui prendra une place considérable dans sa réussite.  » Elle m’a élevé car mes deux parents étaient plutôt absents. Une femme généreuse qui ne se laissait pas marcher sur les pieds. Notre relation était tellement fusionnelle que, plus grand, j’ai même pensé que c’était ma mère. Elle m’a appris à être à l’écoute et à observer.  »

HÉROS DU FC NANTES

Sur et en dehors du terrain, l’athlète est devenu indispensable à l’AFC Tubize. Pour sa personnalité, son expérience et son charisme. Et évidemment pour ses buts, sa facilité à les empiler. On a du mal à croire qu’il n’a jamais reçu de formation d’attaquant de pointe.

 » J’ai commencé comme box-to-box car j’avais un bon physique. Puis, en sélection nationale de jeunes, on m’a décalé sur le côté droit pour ma vitesse. En équipe première, j’ai joué en 10 et je marquais beaucoup. J’adorais partir de loin et combiner. Je n’aimais par contre pas jouer devant. Mes adversaires étaient toujours très durs et évoluer dos au rectangle ne me plaisait pas.  »

Garder le ballon, prendre des coups et marquer : un job qui rythme pourtant son quotidien depuis son premier transfert. Car c’est comme avant-centre que l’USM Alger le recrute en décembre 2003. Auteur de six mois de feu, le Malien peut compter sur l’intérêt du FC Nantes. Finalement la découverte de l’Europe aura lieu un an après son arrivée dans le Maghreb. Le début d’une aventure fantastique. Le 28 mai 2005 restera à jamais gravé dans la mémoire des supporters du FC Nantes. Grâce à un incroyable scénario lors de l’ultime journée de Ligue 1, le but de Diallo face à Metz permet aux Canaris de gagner et d’éviter la relégation.

 » Mamadou était arrivé sur la pointe des pieds « , raconte Grégory Pujol, l’ancien attaquant d’Anderlecht qui l’a côtoyé au FCNA.  » Mais finalement, il a fait son trou. Notamment grâce à ce goal très important.  »

 » Le lendemain, je partais en sélection « , embraye le sauveur des Canaris.  » Je n’ai pas vraiment réalisé l’impact du but le plus important de ma carrière. Quand les journalistes de RMC ou de Canal + ont essayé de me joindre, je me suis dit que quelque chose de grand avait commencé.  »

Diallo continue à se distinguer la saison suivante mais Nantes bascule en L2 à l’issue de l’exercice 2006/2007. Cette descente sera un tournant. Après la vie au coeur d’une ville de football, il met le cap sur le SC Qatar qui allonge 2,5 millions d’euros.

 » Le président de Nantes comptait sur moi pour remonter mais avait aussi besoin d’argent. Ça a été une décision difficile. Sportivement, ça a mis un coup d’arrêt à mon évolution même si financièrement c’était intéressant. Les gens m’ont d’ailleurs beaucoup critiqué. Mais je ne regrette rien.  »

SURTOUT NE PAS S’ENNUYER

Deux clubs en un an dans deux pays du golfe Persique. Puis Le Havre, Sedan et enfin Laval. Des aventures qui n’ont jamais duré plus de 3 ans. Le voilà désormais à Tubize où il revit.

 » Si j’avais connu une saison comme l’an passé à Laval, j’aurais arrêté ma carrière. J’avais perdu le goût de l’effort et le plaisir de me lever chaque matin. Aujourd’hui, je sais que je vais me régaler à l’entraînement. Je voulais aller là où personne ne me connaissait et où j’aurais de nouveaux défis. C’était un peu la routine après 10 saisons en France. Le jeu était trop physique et tactique. On ne parlait plus de technique. La priorité n’était pas de produire du beau football. Je m’ennuyais. Or, je déteste ça. Après un an ou deux dans un club, j’ai l’impression d’avoir tout vu. J’aime voyager, découvrir de nouvelles choses. À 33 ans, je fonctionne encore comme ça. Et ce n’est pas un message pour Tubize « , rigole-t-il.

Plus proche de la retraite que de sa prime jeunesse, le vedette des Sang et Or pourra se consacrer alors pleinement à sa femme et ses deux enfants, ses plus grandes fiertés. Il repensera aussi à son parcours très éclectique : les Jeux olympiques 2004, avec un Mali sorti par l’Italie d’AndreaPirlo en quart. Deux CAN (2008 et 2010) dont il n’a jamais passé le premier tour.

Des coéquipiers de renom comme Fabien Barthez (Nantes) ou Phillip Cocu (Dubaï). Sans oublier ceux qui l’ont amené au plus haut niveau.  » Mes deux premiers éducateurs, à présent décédés, qui m’ont formé en tant qu’homme puis m’ont donné le goût de l’effort. Ensuite, les sportifs qui ont échoué là où j’ai réussi. Durant toute ma carrière, ces athlètes m’ont toujours rappelé que j’ai eu de la chance.  »

PAR VALENTIN THIÉRY – PHOTO BELGAIMAGE

 » J’aime voyager, découvrir de nouvelles choses. À 33 ans, je fonctionne encore comme ça.  » MAMADOU DIALLO

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