TREMBLER AVEC LES GRANDS

Nous ne sommes pas les seuls à appréhender les barrages qui vont décerner les derniers billets pour la prochaine Coupe du Monde. Dimanche dernier, le gigantesque stade des Aztèques de Mexico était comble pour le match décisif entre la formation locale et le Honduras. Ce jeudi, on attend plus de 100.000 personnes au complexe sportif Shahid Keshvari de Téhéran: l’Iran doit y refaire un retard de 2-0 contre la République d’Irlande. Les femmes iraniennes ne sont pas admises dans l’enceinte, les ladies irlandaises accompagnées bien.

Avant que ce match, l’avant-dernier des qualifications, ne débute, les Diables Rouges seront fixés sur leur sort. Comme l’Allemagne, le Brésil, la Roumanie, autant de nations qui ont joué un rôle particulier dans l’histoire de la Coupe du Monde. Jamais encore les Allemands et les Brésiliens n’ont raté de Mondial. Ils sont à la merci de ce précédent, en cette première année du troisième millénaire. L’Allemagne est rentrée de Kiev avec un avantage substantiel (1-1), mais une équipe qui s’est inclinée 1-5 à domicile face à l’Angleterre il y a quelques mois ne peut se reposer sur ce résultat.

Le match qui s’est déroulé en Ukraine a été marqué par un boycott de la presse. Le fait que Valeri Lobanovski, le sélectionneur ukrainien, ait appelé à ce boycott ne nous surprend pas le moins du monde. L’homme qui dirige également le Dynamo Kiev tente de vaincre le stress du banc en grillant des dizaines de cigarettes et en rinçant son gosier rauque à coups de vodka. A la fin du match, il est tellement vidé qu’il doit déléguer son adjoint, l’ancien international Nikonenko, à la conférence de presse. Cette fois, celui-ci n’a rien trouvé d’autre à dire que c’était parce que les Allemands avaient refusé à la presse l’accès à leur camp d’entraînement.

Rudi Völler sait ce que représenterait l’absence de la Mannschaft à une phase finale, surtout quatre ans avant que le plus grand et le plus médiatique événement sportif n’ait lieu zu Hause, en Allemagne. L’ancien attaquant vit sur un volcan. A Kiev, en outre, il était privé de Scholl, Jeremies et Deisler. Ces trois hommes représentent à eux seuls la moitié de la créativité de l’équipe, alors qu’il n’a encore trouvé aucun joueur susceptible d’assumer le rôle de meneur de jeu, que ne veut plus endosser Stefan Effenberg. A juste titre, Völler redoutait l’explosivité de Chevchenko. Celui-ci a marqué, sur un ballon dévié par Subov. Il suffit maintenant à l’Allemagne de réaliser un nul blanc pour se qualifier. Mais ce même score eût été suffisant face à l’Angleterre aussi…

L’élimination éventuelle de l’Allemagne constituerait un événement, quand même moindre que celle du Brésil. Celui-ci a essuyé une quatrième défaite à La Paz, à plus de 3.000 mètres d’altitude, face à une Bolivie déjà éliminée. Les « Européens » n’ont pas eu le temps de s’acclimater à cette altitude. Pour en diminuer les effets, Scolari et ses joueurs ne sont arrivés que deux heures avant le coup d’envoi. Ça n’a servi à rien. Pour se convaincre de ce que représente le football aussi haut, il faut avoir vu le deuxième but des Boliviens: porté par l’air, le ballon a surmonté tout le monde, gardien y compris, pour se loger dans la lucarne.

Sachant qu’autrefois, le Brésil et l’Argentine préparaient leurs matches importants en effectuant des stages de plusieurs semaines, on peut en conclure que l’exode massif des étoiles brésiliennes vers l’Europe a eu un effet néfaste sur les prestations de leur équipe nationale. Il ne faut donc pas mettre tout sur le dos de Scolari et de sa tactique plutôt défensive. C’est clair: le football actuel offre trop d’argent et pas assez de temps aux meilleurs joueurs. Espérons quand même que le Brésil s’impose face au Paraguay ce mercredi. Une Coupe du Monde sans les héritiers de Pelé perdrait beaucoup de son lustre. Les vrais amateurs de football tremblent avec les Grands.

Mick Michels

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