» Tout est allé trop vite « 

Parti plein d’espoirs, il n’a effectué qu’une seule apparition en Premier League.

Voici tout juste un an, JonathanBlondel (qui avait 18 ans à l’époque) signait pour Tottenham Hotspur. Son départ pour l’étranger était dans l’air depuis un certain temps. Depuis qu’il militait dans les équipes nationales de jeunes, les clubs européens le suivaient à la trace. Durant l’été 2001, il avait déjà sauté d’un stage de reconnaissance à l’autre : l’espace d’une semaine, il avait posé ses bagages, tantôt à Manchester United, tantôt à Schalke 04. Jusqu’à ce qu’ HugoBroos mette un frein à ces incessants voyages. L’actuel entraîneur d’Anderlecht le lança en équipe Première de Mouscron, où il joua 18 matches de D1 durant la saison 2001-2002. Cette campagne fut couronnée par une finale de Coupe de Belgique au cours de laquelle le petit Jo inscrivit ce qui demeure son seul but sous le maillot des Hurlus, 14 secondes après être monté au jeu. Ce fut aussi son dernier match en rouge.

En signant pour les Spurs de White Hart Lane, il pensait s’envoler vers de plus hautes destinées. Les premières semaines semblèrent lui donner raison. En août 2002, AiméAnthuenis le convoqua pour le déplacement des Diables Rouges à Szczecin, dans le cadre d’un match amical contre la Pologne. Cela reste à ce jour sa seule et unique cap. Avec Tottenham, cela semblait bien parti aussi. Il fut régulièrement aligné lors des matches de préparation, contre de grosses équipes comme le Celtic Glasgow ou la Lazio Rome, et fut même titularisé à l’occasion d’une rencontre à Feyenoord. Mais, précisément, ce n’était encore que la période de préparation, et le manager GlennHoddle voulait passer en revue la totalité de son effectif. En septembre 2002, il entra pour la première fois au jeu en Premier League, face à Southampton (voir encadré). Il ne se doutait pas encore que cette première apparition serait aussi sa dernière. Car la suite fut moins drôle : à trois reprises, il prit encore place sur le banc, mais sans monter au jeu. Dans les autres cas, il était au mieux 17e ou 18e homme, ce qui signifie qu’il était du voyage mais devait suivre le match de la tribune. Au pire, il n’était pas repris du tout. En fin de compte, le bilan est maigre. Alors, si c’était à refaire ?

 » Je crois que je ne partirais pas à l’étranger si tôt « , avoue-t-il.  » J’attendrais encore quelques années, histoire d’être mieux préparé et d’être davantage assuré d’une place de titulaire dans le club où je débarquerais. Mais il faut dire, aussi, que Mouscron n’a rien fait pour me retenir, au contraire « .

Le plus dur est passé

Son transfert rapporta une somme d’argent bienvenue dans les caisses de l’Excelsior. Les Hurlus avaient compté sur le départ des frères Zewlakow après la Coupe du Monde, mais la Pologne n’avait pas brillé outre mesure en Asie et les offres n’affluèrent pas. Alors, puisque Tottenham insistait, autant vendre l’un des rares éléments pour lesquels un acheteur était disposé à mettre le prix…

 » De toute façon, quand un club comme Tottenham vous veut, c’est difficile de résister « , affirme Jonathan.  » J’ai vécu une saison assez difficile, mais je m’y attendais, car il s’agissait pour moi d’une saison de transition. La différence est grande entre la Premier League et le championnat de Belgique. Je devais m’intégrer dans le groupe, faire la connaissance de nouveaux partenaires, apprendre à vivre dans un nouvel environnement. Tout est allé très vite pour moi. Trop vite, peut-être. Je pense que, la saison prochaine, cela ira déjà mieux. Le plus dur est derrière moi « .

Le pire, c’était au tout début du séjour, lorsqu’il débarqua dans une grande métropole dont il ignorait tout et dans un pays dont il ne maîtrisait pas la langue.  » Pendant les deux premiers mois, je logeais seul dans une chambre d’hôtel. J’avais le blues. Cela a été mieux lorsque j’ai pris possession de mon appartement et, surtout, lorsque ma copine Priscilia est venue vivre avec moi pour les sept derniers mois de la saison. Mon moral est remonté et elle m’a encouragé à mordre sur ma chique « .

Jonathan Blondel avait-il d’autres choix que de s’accrocher ? Désormais sous contrat avec Tottenham, il ne peut pas se libérer quand et comme il le voudrait. Il est passé à un statut supérieur, que ce soit au niveau du salaire ou de la somme de transfert à acquitter, et n’est plus à la portée de n’importe quel club. Il avait envisagé un départ au c£ur de l’hiver, mais ses envies ne se sont pas concrétisées.  » J’ai eu des propositions, mais elles n’émanaient pas vraiment de clubs qui m’intéressaient « .

Jonathan Blondel s’apprête donc à rempiler pour une nouvelle saison à White Hart Lane, où il est attendu le 10 juillet pour la reprise des entraînements.  » Je n’irai pas jusqu’à dire que j’ai obtenu des garanties, mais beaucoup de gens me disent que ce sera plus facile pour moi, désormais. Dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi je devrais partir. Mais il est clair que la saison qui vient sera importante. Si, à Noël, je constate que ma situation n’a pas évolué, j’envisagerai de trouver autre chose. Je ne peux pas me permettre de vivre une deuxième saison consécutive sur le banc « .

Un but contre Ferrer et Babayaro

Car le jeune homme, qui vient à peine d’avoir 19 ans, n’est pas parti en Angleterre pour jouer avec les réservistes. Même si…  » Ce sont des matches où l’engagement est total. C’est plus dur que le championnat de Belgique. Il faut vraiment mettre le pied. Et on rencontre parfois de solides clients. Je me souviens d’un match de Réserve contre Arsenal, où j’ai croisé le fer avec Edu et Luzhny, et surtout d’un autre contre Chelsea où le quatre arrière de notre adversaire était constitué de JohnTerry, AlbertFerrer, WinstonBogarde et CelestineBabayaro. Nous avons gagné 2-0 et j’ai inscrit l’un des buts, mon premier sous les couleurs des Spurs. Au total, j’ai scoré à trois reprises avec les réservistes « .

Jonathan Blondel s’est vu attribuer le numéro 20.  » Ce n’est pas moi qui l’ai choisi, on me l’a décerné d’office et je l’ai accepté : je ne suis pas superstitieux « . Outre-Manche, il jouait comme… demi défensif.  » A Tottenham, il n’y a pas de véritable numéro 10. On évolue avec deux demis défensifs, et j’occupais la position à gauche, puisque je suis gaucher. Ce rôle me convenait assez bien. C’est à cette place que j’ai disputé mes meilleurs matches. Je touchais beaucoup de ballons et j’avais généralement le jeu devant moi, alors que comme demi offensif, le cuir me parvenait le plus souvent lorsque j’étais dos au but « .

Mais il conserve un goût de trop peu.  » Le plus décevant, c’est lorsqu’on se retrouve 17e ou 18e homme. On part au stade plein d’espoir, et une heure et demie avant le coup d’envoi, on découvre sur le tableau qu’on n’est pas retenu dans les 16. On n’a d’autre solution que de suivre le match de la tribune. Cela m’est arrivé une dizaine de fois. Sur le coup, c’est dur, mais à la longue, on apprend à relativiser en se disant que ce genre de mésaventure est survenue à des joueurs plus réputés et plus expérimentés « .

Et puis, même de la tribune, le championnat d’Angleterre vaut la peine d’être vécu.  » Il y a de véritables stars. Lorsqu’on voit ThierryHenry et RuudvanNistelrooij, on se dit qu’on a encore beaucoup de chemin à parcourir, mais en même temps, on est fier de disputer le même championnat qu’eux. Ce serait encore mieux si j’avais pu réellement les affronter sur le terrain. La plus belle ambiance, je l’ai vécue à Old Trafford. Je connaissais le stade, puisque je l’avais visité lorsque j’avais effectué un stage à Manchester United en août 2001, mais lorsqu’il est plein le jour du match, c’est encore plus impressionnant. Le titre des RedDevils m’a surpris. Quelques semaines avant l’épilogue, Arsenal était encore largement en tête. Puis, toute la défense s’est retrouvée à l’infirmerie et les Gunners se sont écroulés. Tottenham, lui, a terminé en milieu de tableau. L’équipe a alterné les hauts et les bas. RobbieKeane, un ancien équipier de CédricRoussel à Coventry, a été l’homme de la saison dans nos rangs. Technique, rapidité, sens du but : il a tout. Le match que je garde en mémoire est celui contre Everton. Un match fou. Nous avons mené à trois reprises, mais Everton est chaque fois revenu. TomaszRadzinski a été impressionnant. Finalement, nous avons gagné 4-3. J’étais sur le banc, ce jour-là « .

Des entraînements assez cools

Jonathan Blondel avoue avoir eu très peu de contacts avec les autres joueurs belges du championnat d’Angleterre. Et avec ses partenaires ?  » Je n’ai eu de problèmes avec personne, mais c’est avec l’Uruguayen GustavoPoyet que je conversais le plus. Il parle français. Je ne peux pas me plaindre de l’accueil que j’ai reçu. Personne ne m’a snobé, pas même les plus grands, comme TeddySheringham. La plupart des joueurs m’ont conseillé d’être patient. La première année, m’ont-ils dit, je devais surtout observer. A moins de s’appeler MichaelOwen, ce n’était pas anormal, trouvaient-ils, d’être souvent réserviste à 18 ans « .

Les entraînements, curieusement, sont décrits comme assez cools.  » En pleine saison, on joue énormément, parfois tous les trois jours, c’est donc plutôt de l’entretien. Mais, même en période de préparation, la plupart des exercices s’effectuaient avec ballon. A Mouscron, ce n’était pas toujours le cas. J’ai connu au Canonnier des séances plus exigeantes qu’à Tottenham. Je n’ai jamais vraiment souffert, physiquement. Je me suis toujours entraîné avec le noyau A, ce qui est positif. Glenn Hoddle, qui est en fait le manager, se contentait la plupart du temps d’observer. Ce sont les trainers, JohnGorman et ChrisHughton, qui dispensaient les séances « .

Un soulagement pour Jonathan Blondel : bien qu’il n’ait quasiment jamais évolué en Premier League, JeanFrançoisdeSart ne l’a jamais oublié et l’a toujours retenu pour l’équipe nationale Espoirs.  » Cela m’a fait du bien de revenir en Belgique et de pouvoir jouer. Je n’ai pas eu trop de mal à retrouver mes sensations. J’espère pouvoir participer au Championnat d’Europe, l’an prochain. Ce serait mon troisième d’affilée, après les û17 ans en Irlande et les û19 ans en Norvège. Jusqu’à présent, je n’ai jamais réussi à franchir le premier tour. Le défi est donc lancé. Mais ce n’est pas évident, car les adversaires sont de qualité. L’Allemagne, par exemple, s’est toujours retrouvée en travers de ma route « .

Jonathan Blondel a-t-il progressé pendant cette saison en Angleterre ?  » Je l’espère, mais ce n’est pas à moi de me juger. J’ai en tout cas pris deux kilos de muscles, car on fait beaucoup de musculation là-bas, et je tiens plus facilement les 90 minutes que lorsque j’étais à Mouscron. Sur le plan footballistique, je parviens toujours à tirer mon épingle du jeu lorsque je rejoins les Espoirs. Ce serait malheureux si j’avais stagné, ce n’était pas le but en partant là-bas « .

Jonathan Blondel repartira la semaine prochaine dans les îles avec de meilleurs atouts. La langue de Shakespeare n’a plus de secrets pour lui, isn’tit ?  » J’ai suivi trois mois de cours en arrivant. Je comprends l’anglais, lorsqu’on ne parle pas trop vite, et je peux me débrouiller pour m’exprimer, mais dire que je parle couramment la langue serait exagéré « .

Et puis, il connaît désormais Londres comme sa poche. Enfin, certains quartiers surtout…  » Ma copine adore faire du shopping, alors je connais surtout les grands magasins et les rues commerçantes. Cela grouille de monde… et la vie est horriblement chère. Mon endroit préféré ? C’est encore mon… appartement, dans la campagne, au nord de la ville, à cinq minutes du centre d’entraînement et un quart d’heure de White Hart Lane. Il est situé dans un centre privé, avec piscine couverte et salle de musculation à l’intérieur. L’entrée est gardée, il faut montrer patte blanche pour y pénétrer « .

Enfin, il pourra bientôt se déplacer librement.  » Je possède déjà mon permis de conduire provisoire en Angleterre. Je l’ai passé avec le volant à droite, forcément, et avec les cours théoriques en anglais. Cela n’a pas été trop compliqué. Jusqu’ici, je me rendais à l’entraînement soit en taxi, soit en compagnie de MilenkoAcimovic « .

Goodluck, Jo.

 » Si c’était à refaire, je partirais un peu plus tard  »

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