TOUR DE CONTRÔLE

L’ancien gardien de Villarreal a supplanté Jerzy Dudek, blessé, dans les buts des champions d’Europe.

Son excellente saison 2004-2005 lui a valu une belle récompense. Pepe Reina a quitté l’Espagne, et Villarreal pour être plus précis, afin de rejoindre les rangs du champion d’Europe en titre : Liverpool. Le jeune gardien de but de 23 ans, qui figure déjà dans le noyau de Luis Aragonés en équipe nationale, a entamé son aventure anglaise plein d’illusions, en sachant qu’il pouvait compter sur le soutien de son entraîneur, Rafael Benitez, qui a fortement insisté pour pouvoir l’engager.

Signer pour une équipe comme Liverpool, c’est un peu comme atteindre le nirvana ?

José Manuel Reina : En tout cas, c’est un pas important que j’ai franchi en rejoignant un club qui a une histoire aussi prestigieuse. J’espère que cela me servira pour progresser encore davantage.

La présence de Rafael Benitez à Anfield Road fut-elle déterminante dans votre choix ?

Ce fut un élément très important, c’est clair. Il me voulait absolument, et savoir que l’on bénéficiera du soutien de l’entraîneur est toujours un avantage lorsqu’on débarque dans un nouveau club. Après avoir discuté avec Rafael Benitez, je n’ai plus guère hésité à apposer ma signature au bas du contrat que les Reds me proposaient.

Pour un gardien de but, en particulier, la confiance est un élément primordial. Vous en avez bénéficié dès que vous avez posé vos bagages sur le sol anglais.

Peut-être, mais je l’ai déjà dit et je ne cesserai jamais de le répéter : la confiance de l’entraîneur, il faut la mériter par ses prestations sur le terrain. Dans une certaine mesure, je trouve logique d’avoir commencé la saison comme titulaire, puisque je suis un transfert onéreux et que le club n’a pas dépensé tout cet argent pour me laisser sur le banc. Mais, à partir de là, je dois me montrer digne de cette confiance lors de chaque sortie.

Quitter Barcelone était la meilleure solution

Vous avez connu une ascension fulgurante malgré votre jeunesse.

J’ai eu la chance de pouvoir jouer ces trois dernières années dans un grand club et d’être épargné par les blessures. Touchons du bois, j’espère que cela se poursuivra ainsi. Grâce à mon travail, j’ai beaucoup progressé et j’espère ne pas m’arrêter en si bon chemin.

Quels clubs portez-vous particulièrement dans votre c£ur ?

Deux clubs me sont très chers, parce qu’ils sont liés au parcours de mon père, Miguel : l’Atletico Madrid et Cordoue. Avec le FC Barcelone, ce sont mes clubs préférés. J’espère avoir, un jour, l’occasion de défendre leurs couleurs.

Vous avez déjà porté le maillot du FC Barcelone, mais c’est lorsque vous avez quitté le club catalan que votre carrière a pris son envol.

Si je n’avais pas quitté le Camp Nou, je ne sais pas où je me trouverais actuellement. J’ai pris la meilleure décision possible en choisissant de partir. Je préfère être premier dans un village que deuxième ou troisième dans une métropole. A 20 ans, j’avais surtout besoin de jouer et le FC Barcelone ne m’en offrait pas la possibilité.

Votre destination fut Villarreal…

D’emblée, ce club s’est montré très intéressé et je dois encore remercier les entraîneurs, les joueurs et les supporters qui, là-bas, m’ont si bien accueilli et m’ont permis de gravir les échelons.

Avez-vous hésité lorsque Liverpool s’est présenté, surtout au vu de la magnifique prestation livrée par Jerzy Dudek en finale de la Ligue des Champions ?

On ne peut pas résumer la carrière d’un gardien de but à un seul match. Jerzy Dudek a connu des hauts et de bas, mais j’ai été agréablement surpris lorsque j’ai débarqué à Anfield Road. Visiblement, il a les faveurs des supporters. Personnellement, je dois encore gagner leur respect, mais c’est l’unique avantage qu’il a sur moi.

A propos d’avantage : le vôtre est d’évoluer dans une équipe mi-anglaise, mi-espagnole.

Ce fut aussi un élément important au moment de prendre ma décision. Avoir des compatriotes dans l’effectif facilite grandement l’intégration. Néanmoins, il faut éviter que des groupes se forment.

Le football espagnol est au sommet

Aimeriez-vous rester de nombreuses années à Liverpool ou préféreriez-vous revenir en Espagne par la grande porte, en signant pour un club prestigieux de la Liga ?

Je n’en sais rien. A l’heure actuelle, je ne sais même pas si j’aurai le choix. Ce dont je suis sûr, par contre, c’est que le football espagnol se situe actuellement au-dessus de tous les autres. Nulle part ailleurs, je ne serai aussi bien. Le destin m’a orienté vers Liverpool mais j’ignore ce que me réserve l’avenir.

Avez-vous été surpris par le football britannique ou l’avez-vous découvert tel que vous vous l’étiez imaginé ?

Ce qui m’est apparu dès le premier jour, c’est qu’il s’agit d’un football très compétitif, disputé à un rythme très élevé ; d’un football très physique, où les contacts sont nombreux et où les arbitres permettent beaucoup plus de choses qu’en Espagne.

Le jeu aérien pratiqué dans les Iles doit bien vous convenir, non ?

En effet. En Angleterre, on demande prioritairement aux gardiens d’être maître dans les airs, car cela aide énormément l’équipe. Néanmoins, ce n’est pas facile. Il y a des joueurs de grande taille, et sur les corners, l’équipe qui attaque place trois mastodontes dans le petit rectangle. La marge de man£uvre est très étroite. Il faut s’y habituer et s’imposer soi-même.

Anfield Road est-il réellement très impressionnant, comme on le pense vu de l’extérieur ?

Oui, l’ambiance qui y règne est, avec celle du Celtic Glasgow, la meilleure qu’il m’ait été donné de vivre dans ma carrière. Le stade est toujours plein et les supporters chantent pendant 90 minutes.

Vous avez quitté Villarreal alors que ce club s’est qualifié pour la première fois pour la Ligue des Champions. Quelle est la clef du succès de cette équipe ?

La solidarité et l’humilité de tous les joueurs. La sérénité, aussi : les dirigeants ne nous ont jamais fixé le moindre objectif. Nous savions qu’en progressant pas à pas, nous irions loin. Jusqu’à la Ligue des Champions, effectivement. Le noyau est de qualité et le président Fernando Roig est à la hauteur.

Est-ce là que vous avez mûri, à la fois comme footballeur et comme être humain ?

C’est à La Masia, le centre de formation du FC Barcelone, que j’ai mûri en tant qu’être humain et que j’ai appris les rudiments du métier de footballeur, mais c’est à Villarreal que j’ai réellement découvert le haut niveau et que j’ai réellement percé dans la Liga.

Lorsque vous avez débarqué très jeune au centre de formation du FC Barcelone, imaginiez-vous que vous arriveriez aussi loin ?

Oui, absolument. Et j’espère que je ferai encore beaucoup de chemin. Lorsqu’on est jeune, on rêve toujours d’arriver le plus loin possible. Encore faut-il réaliser ces rêves. Certains le font, d’autres pas.

Conservez-vous un souvenir amer de ces années passées en Catalogne ?

Pas du tout. Beaucoup de personnes m’ont demandé si j’avais gardé une certaine ranc£ur envers le club catalan et j’ai toujours répondu par la négative. L’éducation qu’on vous donne à la Masia et le respect qu’on vous apprend à avoir envers vos équipiers vous aident énormément à mûrir, alors que vous n’êtes encore qu’un adolescent. Cette maturité, je l’aurais peut-être acquise également grâce à mes parents, qui m’ont donné une très bonne éducation, mais footballistiquement, les années passées à Barcelone m’ont apporté beaucoup. Seulement, jouer en équipe Première à Barcelone est très difficile. J’en ai fait l’expérience, mais malgré tout, j’ai disputé 50 matches officiels sous le maillot blaugrana. Ce n’est pas négligeable.

Etes-vous sincère ?

Tout à fait. Je ne peux que remercier le FC Barcelone pour tout ce qu’il m’a apporté. Mais, lorsqu’un entraîneur estime que vous n’avez pas les qualités voulues pour faire partie de l’équipe, il faut accepter sa décision et tenter sa chance ailleurs. C’est le football.

N°2 en équipe nationale

Cela vous gêne lorsqu’on compare votre carrière à celle de Victor Valdés ?

Non, c’est normal. Victor Valdés et moi avons tous les deux le même âge, et notre trajectoire est fort similaire. Nous avons joué ensemble dans quasiment toutes les catégories d’âge. J’ai eu la chance de rejoindre le noyau professionnel un peu plus tôt. Lui a eu la chance de pouvoir jouer plusieurs matches d’affilée en équipe Première et d’être dans les buts à une période où de bons résultats ont été enregistrés. Cela lui a permis de conserver son poste de titulaire. C’est la principale différence entre nous.

En équipe nationale, vous avez déjà supplanté Santiago Canizares dans la hiérarchie. Pensez-vous pouvoir prendre le meilleur sur l’intouchable Iker Casillas ?

Je dois progresser pas à pas. Et j’estime n’avoir supplanté personne. Simplement, le sélectionneur a décidé que je serais le n°2, lors des dernières convocations. Devant Santiago Canizares ou un autre, peu importe. Tout le monde essaie de faire son travail le mieux possible, et le jour où l’on est convoqué en équipe nationale, il faut essayer d’aller encore plus haut. De jouer, pas simplement de s’asseoir sur le banc.

Qui est, pour vous, le meilleur gardien du monde à l’heure actuelle ?

En Espagne, il y a beaucoup de jeunes qui sont promis à un bel avenir. En Europe, il y a beaucoup de gardiens expérimentés qui peuvent être considérés comme des valeurs sûres et dont le niveau est fort proche. Avec, parfois, des qualités différentes. Parmi les meilleurs, je citerai Iker Casillas, Petr Cech, Gianluigi Buffon. La liste n’est pas exhaustive.

L’entourage des footballeurs est très important. La famille Reina a toujours donné l’impression d’être très unie.

C’est le cas. Il y a cinq garçons dans la famille et des liens très forts nous unissent. Etre bien entouré, cela aide. A Liverpool, je vis avec ma fiancée Yolanda. Elle est à mes côtés dans les bons comme dans les mauvais moments, et c’est très important.

Ce qui différencie les gardiens, c’est le jeu aérien

L’une de vos spécialités est l’arrêt des penalties. Quel est votre secret ?

J’ai toujours dit qu’un penalty bien tiré est imparable. Des gardiens spécialisés dans l’arrêt des penalties, pour moi, cela n’existe pas. Certes, on peut se documenter, se renseigner sur la manière dont le joueur adverse tire les penalties. J’adore le football, je regarde beaucoup de reportages et je connais la plupart des attaquants adverses. Mais deviner où le joueur va tirer est un élément fondamental pour essayer de repousser l’envoi.

Quelles sont les qualités que doit réunir un bon gardien ?

Il est indispensable d’arrêter ce qui est arrêtable, mais je crois qu’aujourd’hui, les principales différences se marquent dans le trafic aérien. Un gardien qui est maître dans son petit rectangle rassure ses défenseurs.

Avez-vous toujours des idoles ?

Les gardiens que je considérais autrefois comme des références le sont toujours aujourd’hui, à mes yeux. J’essaierai toujours d’être comme eux. Deux gardiens ont, de tout temps, occupé mes pensées : Andoni Zubizarreta autrefois et José Molina plus récemment. Je me suis inspiré d’eux dans ma manière de jouer.

ALFREDO MARTINEZ, ESM

 » JE JOUE MAIS JE N’AI PAS ENCORE LE RESPECT DES FANS COMME L’A jerzy dudek  »

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