Thriller de mauvais goût

Thomas Bricmont

Egypte-Algérie : qui au tapis ?

L’Algérie s’y voyait déjà. L’Afrique du Sud lui tendait les bras. Jusqu’à une 93e minute fatidique et une tête d’ Emad Meteab venu inscrire le 2-0 d’Egypte-Algérie. Un but qui a mis en larmes des dizaines de milliers d’Algériens et brisé le rêve de millions d’entre eux. Enfin, ce rêve n’est pas totalement éteint, puisque ce mercredi à Omdurman (Soudan), les deux formations jouent la belle, le test-match, le match d’appui, c’est comme vous voulez, après avoir terminé les qualifs avec le même nombre de points (13), le même goal-average (+5) et le même total dans les confrontations directes. Mais le moral est atteint et les bookmakers ont choisi leur camp. L’Egypte, qui n’a plus connu de Coupe du Monde depuis celle de 90 en Italie, part avec les faveurs des pronostics après avoir renversé la tendance samedi dernier au Caire dans une ambiance électrique… C’est le moins qu’on puisse écrire. Ce match sentait le souffre et a malheureusement tenu promesse. Car au-delà du moral, c’est l’intégrité physique des joueurs algériens qui a préalablement été touchée.

A son arrivée au Caire, jeudi soir, le bus des Fennecs s’est fait caillasser alors qu’il traversait la ville pour rejoindre l’hôtel. Un guet-apens (dixit les médias algériens) extrêmement violent qui a ensanglanté les joueurs Kaled Lemmouchia (trois points de suture à la tête), Rafik Halliche (ouvert au-dessus de l’£il) et Rafik Saïfi (blessé au bras) et commotionné l’entraîneur des gardiens. Les images des vitres brisées par d’imposants pavés et la descente des joueurs choqués voire surexcités par ce qui venaient de leur arriver ont fait le tour du monde. Durant le match, plusieurs joueurs portaient encore les pansements de cette attaque. Difficile, dès lors, de préparer au mieux un match capital, synonyme de participation à la Coupe du Monde qui échappe à l’Algérie depuis 1986. La veille de la rencontre, les représentants de la FIFA ont évoqué un instant son annulation, mais ont finalement préféré la maintenir, de peur de faire face à des émeutes bien plus violentes encore.

Les 70.000 supporters (dont 2.000 algériens qui avaient fait le déplacement) auront finalement assisté un thriller avec un but en tout début de rencontre et un autre à sa toute fin. Mais un thriller de mauvais goût qui s’est poursuivi après la rencontre avec l’agression de plusieurs bus de fans algériens par des  » supporters égyptiens « . Le duel s’est même exporté hors frontières : tant à Marseille qu’à Lyon, de violents affrontements ont opposé des jeunes d’origine algérienne aux forces de l’ordre. La presse, la blogosphère et les forums en tous genres n’avaient cessé de mettre de l’huile sur le feu les jours précédant la rencontre. Le président égyptien Hosni Moubarak et son homologue Abdelaziz Bouteflika se sont même entretenus avant la rencontre pour appeler au calme. Quand le foot dépasse ses prérogatives…

THOMAS BRICMONT

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