Taxi et immobilier

Le ciel s’est éclairci au-dessus de ce nouveau quartier de Dilsen, aux confins du Limbourg. Comme s’il l’avait senti, le petit Yentl (4 ans) se réveille promptement du divan où il s’est assoupi: « Papa, football, basket! » Harold Meyssen (29 ans) ne résistera pas longtemps à la demande son fils. Les Meyssen ont un ballon dans le sang.

Harold Meyssen: Je ferais un bon babysitter! Je m’occupe beaucoup de Yentl. D’où vient son nom? D’un film de Barbara Streisand. Pas que nous en soyions des inconditionnels mais nous recherchions un prénom sortant du commun. Yentl est fou de ballon. J’adore m’occuper de lui. Sinon, le jardinage est une des rares tâches dont je m’acquitte dans notre nouvelle maison. Le jardin n’est pas très grand et regardez comme l’herbe est verte: je ne la tonds jamais trop court pour qu’on ne voit pas les racines. Ce n’est pas par manque de bonne volonté mais je ne sais pas faire grand-chose. Ah oui, je passe l’aspirateur, quand même. Oui, Ilse, une fois par semaine!

Quels sont vos loisirs?

Les joueurs en ont beaucoup! Ilse et moi aimons faire du shopping avec le petit. Mais en fait, tout tourne autour de Yentl. Nous l’emmenons dans des parcs d’attraction. Nous ne sommes pas loin des parcs du Limbourg, comme Bokrijk. J’aime le tennis, aussi. Il ne va à l’école qu’une demi-journée. Nous en profitons donc. Sinon, nous n’avons pas vraiment de loisirs personnels. Nous écoutons de la musique en voiture, mais sans avoir de préférence. A la maison, nous regardons beaucoup plus la télévision. Un peu de tout, et des programmes pour enfants quand Yentl est éveillé. En juin, nous partons en vacances en Turquie, au soleil. J’en ai marre du climat belge! Même en Autriche, en été, il faisait plus chaud qu’ici… Il neige jusqu’en avril mais le soleil tape plus fort. D’ailleurs, après ma carrière, j’aimerais aller dans un pays chaud, comme l’Espagne. Toutefois, je souhaite rester dans le milieu du football. Je pourrais m’occuper des jeunes, par exemple. Je ne pense pas devenir entraîneur mais Michel Preud’homme ne voulait pas non plus. D’ailleurs, ce matin, il m’a encore dit que je deviendrais entraîneur.

Comment avez-vous rencontré Ilse?

Oh, je la connais depuis l’école maternelle! Nous sommes nés dans le même village, Dilsen-Stokkem, nous y avons grandi. Le déclic s’est produit dans une discothèque. A cette époque, j’évoluais à Tongres, en D2. Nous avions 18 ans tous les deux.

Vous ne prenez jamais le volant…

Non, Ilse me conduit partout. J’ai la phobie de la conduite, un peu comme Bergkamp a celle de l’avion. J’ai peur de conduire. Toutefois, notre Jeep a un boîtier automatique et peut-être que ça me conviendrait. Je vais essayer de m’y mettre car ça nous faciliterait vraiment la vie.

Vous avez vécu six mois à Salzbourg. Une expérience intéressante?

La ville est superbe, comme les alentours. J’ai eu l’occasion de visiter des tas de jolis coins. Pour moi, la vie y était assez agréable car je ne manquais pas de contacts grâce à l’équipe. Nous mangions et sortions après chaque match. Les femmes étaient invitées de temps en temps à se joindre à nous mais le problème était la longueur des déplacements. Nous partions toujours la veille du match pour revenir le lendemain de celui-ci. Or, à la fin, nous disputions deux matches par semaine. Ilse se retrouvait pieds et poings liés à la maison avec le petit. Pour elle, ce n’était pas facile, surtout qu’elle a besoin de voir régulièrement sa famille. Lorsque le Standard s’est manifesté, je n’ai pas dû réfléchir deux fois.

Avez-vous un rêve particulier, dans la vie?

Non. Nous avons acheté cette maison à notre retour d’Autriche. Le gros-oeuvre était achevé. Nous n’avons donc pas pu choisir la disposition des pièces. Seule la finition pouvait être modifiée. Nous possédons un terrain à bâtir à As, à une quinzaine de kilomètres d’ici. Nous pouvons y construire la maison de nos rêves. Ilse adore l’immobilier. Elle dévore tous les journaux locaux, compare les prix… Mais ce n’est pas urgent. Notre quartier est paisible, sauf le week-end: les Hollandais défilent pour repérer les maisons à vendre (il rit)!

Si Harold est d’un naturel plutôt tranquille, Ilse Palmans (29 ans) pétille d’enthousiasme. Un brin ironique, elle jette un coup d’oeil à Harold: « S’il le pouvait, il resterait allongé dans le divan toute la journée! Il paraît que le club demande aux joueurs de faire une sieste d’une heure en rentrant de l’entraînement. Dans le cas d’Harold, il peut être rassuré: il respecte la consigne… » Sa vie est plutôt chahutée par les navettes et sa vie de « taxi » mais elle ne semble pas lasse. Comme son compagnon, elle a arrêté ses études très tôt. Elle a travaillé comme vendeuse jusqu’à la naissance de son fils. Elle n’envisage pas de reprendre une activité professionnelle pour l’instant.

Ilse Palmans : Je dois m’occuper de mes deux hommes. Une vendeuse ne gagne pas beaucoup. Si je travaillais à mi-temps, mon salaire serait englouti par les frais de gardiennage. N’oubliez pas que je fais le taxi, en plus! Toutefois, un jour, l’immobilier me tenterait vraiment…

Quand Yentl aura-t-il une petite soeur?

Si ça ne dépendait que de moi… J’aimerais avoir une fille. Harold ne veut pas de second enfant. Il est lui-même fils unique et il s’en porte très bien. Nous souhaitions tous deux un garçon. Si nous avions eu une fille, je pense qu’il serait plus enclin à désirer un autre enfant. C’est le moment ou jamais: Yentl est suffisamment grand pour tout comprendre, il acquiert une certaine autonomie sans que la différence d’âge soit trop importante. Une mère peut tisser un lien particulier avec sa fille. Un garçon est différent et puis, il m’amènera un jour une belle-fille et qui sait si le courant passera?

Etes-vous sportive?

Moi? pas du tout! Toutefois, je suis tous les matches d’Harold, même en déplacement, depuis douze ans. Il faut vraiment que Yentl soit malade pour que j’y renonce. Auparavant, je n’étais pas supporter d’un club mais il était naturel que je m’intéresse à son travail. Nous vivons en fonction de sa carrière et pendant les trêves, je me surprends à espérer que le championnat reprenne ses droits! Je n’analyse pas les matches avec Harold car il sait très bien quand il a bien ou mal joué et il n’est pas nécessaire d’y revenir à la maison. De toute façon, vous l’entendez: d’après lui, il faut avoir joué pour comprendre un match dans ses détails.

Ramène-t-il ses problèmes à la maison?

Non, sauf après le match contre l’Antwerp. Il s’était d’ailleurs fendu d’une belle sortie dans la salle de presse. Ça ne lui ressemble pas du tout et ça a dû marquer les esprits. Ce jour-là, il était vraiment excédé. Il a vraiment le sentiment que le Standard est victime d’injustices tout au long de la saison.

Les femmes des joueurs s’entendent-elles bien?

Oui. L’ambiance est assez amicale mais comme je ne parle pas un mot de français et qu’elles ne comprennent pas le néerlandais, mes contacts restent très limités. Un bonjour, un sourire, c’est tout. Les Yougoslaves ont d’ailleurs le même problème. Elles discutent entre elles, dans leur langue. Moi, je reste généralement avec la femme de David Brocken et celle d’Ole-Martin Aarst, qui parle anglais.

Vivre avec un joueur ne vous cause pas de problèmes?

Je ne suis pas du tout jalouse. Ma maternité a changé beaucoup de choses et puis Harold n’est pas un sorteur. Il est calme, tout le monde le sait, peu enclin à vadrouiller. S’il sortait plusieurs fois par semaine, je me poserais des questions mais il n’est pas vraiment accessible. Toutefois, notre vie a beaucoup changé depuis qu’il a quitté Alost. Au Standard, chacun a sa famille et rentre très vite après les matches et les entraînements. Mais prenez ce fameux match contre l’Antwerp. La veille, le vendredi, il ne fait rien. Le samedi, il joue, et le dimanche après-midi, il s’est rendu à une fête de supporters à Tirlemont. Il le fait de bon coeur mais moi, j’ai fait le taxi tout le week-end sans profiter de sa présence.

Pascale Piérard

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