Jef Van Baelen
Jef Van Baelen Journaliste Knack

En devenant champion du monde l’an dernier, le coureur dit avoir réussi sa carrière mais demeure un tueur.

Pijnacker, 2004. Sven Nys est leader de la Coupe du Monde de cyclocross. Richard Groenendaal, son coéquipier néerlandais, domine la course. Il peut prétendre à la victoire en Coupe du Monde si Nys ne termine pas parmi les six premiers. Tous les Belges signent la course de leur vie pour vaincre Sven Nys. Celui-ci termine septième et voit les visages de ses compatriotes s’illuminer de joie. Le champion serre les poings :  » Ils n’ont pas réalisé que leur mesquinerie m’avait en fait sublimé. Ce cross est une période charnière de ma carrière. Je me suis dit : Vous ne m’aurez plus. Ce changement devait aussi se traduire par un titre mondial. Un an plus tard, j’avais atteint mon objectif « .

Pendant des années, Sven Nys paraissait trop gentil pour s’imposer au plus haut niveau. Il était également poursuivi par le doute. Ainsi, lorsqu’il découvrait un parcours trop plat, trop roulant, il s’avouait vaincu avant même de prendre le départ. Il traînait un autre fardeau : son talent inné, qui le condamnait à la victoire, notamment au championnat du monde. Sven Nys reconnaît que son triomphe à Sankt-Wendel l’an dernier l’a libéré :  » Jour après jour, j’étais confronté à un constat. Vous pouvez gagner toutes les épreuves possibles, votre palmarès est incomplet sans titre mondial. Avant, j’étais souvent envahi par la peur de l’échec. Tous les observateurs me pointaient comme favori mais quand toutes les conditions n’étaient pas réunies pour mon plan de course, je sombrais. Les gens en ont conclu que j’étais incapable de résister à la pression mais je devais gagner un Mondial pour me libérer. Je doutais tellement que j’enviais l’audace et la sérénité de Bart Wellens… Après St-Wendel, j’ai retrouvé le plaisir de courir. Même quand j’ai de la poisse, comme à Hofstade l’année dernière, je ne me laisse plus décourager. Je me bats jusqu’au bout. Qu’il pleuve, qu’il vente, que le parcours soit boueux ou venteux, peu importe, dorénavant. Je sais que je suis le meilleur, que ma condition physique me permettra de dominer la course. Dans le passé, je m’appuyais beaucoup trop sur ma technique « .

On peut l’insulter

Nys a vécu un autre moment-clef. Au Mondial 2000 en Hollande, Groenendaal a profité de la zizanie qui dévastait le camp belge pour filer vers la victoire et Sven a été la cible des critiques. Aujourd’hui encore, il se fait parfois traiter de… Hollandais :  » Cela me fait mal mais j’ai appris à vivre avec. Ce jour-là, j’ai compris la nature humaine. Je reste persuadé d’avoir pris la bonne décision « .

Le coureur s’est récemment épanché dans une autobiographie réalisée avec sa nièce, Wendy Galicia. Agé de 30 ans, il a gagné tous les titres possibles et un Mondial de plus ou de moins ne changera pas grand-chose. Pourtant, il reste insatiable. Il n’imagine pas raccrocher son vélo avant cinq ans au moins. Il survole la saison actuelle sans laisser paraître la moindre lassitude :  » Je continue de progresser. Je n’ai pas le sentiment d’avoir atteint mon apogée, de dominer ma discipline comme je pourrais le faire. Jamais je ne me suis senti aussi bien, aussi fort. Pas question d’arrêter avant 35 ans. Ensuite, j’aviserai, saison après saison « .

Le champion du monde a fait quelques infidélités au cyclocross. Il s’est ainsi tourné vers le VTT et aimerait participer aux Jeux Olympiques :  » Recommencer au bas de l’échelle ne me pose pas le moindre problème. Je n’ai pas de complexe de supériorité. S’il faut aller chercher moi-même mon dossard, j’y vais. Pareil si je dois me laver au bord de la route. Au fond, c’est un retour aux sources !  »

Sven a travaillé deux ans dans le domaine de la construction, au sein de l’entreprise de son père, électricien. Après sa journée de travail, il enfourchait son vélo et a tout misé sur le sport qu’après un titre mondial en Espoirs :  » Mon père a compris que je pouvais gagner ma vie à vélo et m’a permis de m’y consacrer. Je dois beaucoup à Erik De Vlaeminck, qui m’a appris toutes les ficelles du métier « . L’ancien champion a trouvé un terreau fertile en Nys. Gamin, il ne pensait qu’à l’entraînement, au point d’emmener son vélo aux… sports d’hiver. Il sourit :  » Un jour, excédé, mon père m’a ramené d’Autriche et est reparti. Il a roulé 1.600 kilomètres en une journée. Je gâchais les vacances familiales avec mes entraînements… « .

JEF VAN BAELEN

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