Bientôt rétabli de son opération au tendon d’Achille, il veut redevenir un athlète.

Depuis, les bonnes nouvelles s’amoncellent à Londres, où le Limbourgeois s’entraîne avec Mike McFarlane. Sa blessure n’est plus qu’un mauvais souvenir. Il vit avec Denise Lewis, championne olympique de l’heptathlon. Le premier avril, ils ont fêté la naissance de Lauryn. Le 5 mai, Patrick Stevens renouera avec la compétition.

Patrick Stevens: 2002 est déjà une réussite, grâce à Lauryn. Nous nous sommes rapidement adaptés à notre nouvelle vie. La première fois que j’ai couru, après sa naissance, j’avais envie de casser la baraque. Je me sens plus responsable. Et très fier.

Etes-vous guéri de vos blessures?

Je ne souffre plus depuis l’opération, fin juillet. Ce tendon devrait être plus solide qu’avant. On a constaté qu’une jambe était plus courte que l’autre et je porte des semelles. J’ai travaillé d’arrache-pied pendant la rééducation. Je me rendais six jours par semaine à Anvers. Suivre le Mondial à la télévision n’a pas été facile. J’ai aussi raté l’EURO indoor de Vienne: il venait un rien trop tôt. Mais l’essentiel est que je vais renouer avec la compétition. Le chapitre est clos.

Cinq athlètes vous avaient précédé aux championnats de Belgique.

Je voulais voir si je devais continuer à me préparer pour le Mondial. Dans la tribune, on a dû rire de moi mais ça m’est égal. Il faut s’immuniser contre ce genre de réaction. Je savais que je courais sur une jambe et demie. Je souffrais du tendon gauche depuis Atlanta mais la douleur n’était pas permanente et ne m’a pas empêché de signer de bons chronos. C’était un effet du surmenage. J’ai couru entre 40 et 50 compétitions par an sans jamais être sérieusement blessé ni prendre le temps de laisser mon corps récupérer. Il m’a envoyé un signal et j’ai probablement été naïf de ne pas prendre plusieurs avis. Je croyais aussi que cette opération signifiait la fin d’une carrière de sprint mais il y a plusieurs degrés dans cette affection.

Un gars pas facile

Le COIB ne semble plus compter sur vous mais le BLOSO vous soutient toujours.

Le BLOSO a prolongé mon contrat après quelques hésitations. Ma blessure, mon âge, ma situation familiale ont engendré des doutes mais j’ai resigné pour deux ans. Le COIB m’a rayé après quatre Jeux Olympiques. Je ne suis pas facile: j’ai souvent critiqué le Comité Olympique. Il doit être soulagé: -Stevens a 34 ans, il a subi une loude opération, est devenu père. Il est fini.

Allez-vous vous réconcilier?

Mes critiques se voulaient constructives. Je dénonçais des aberrations. Dorénavant, je consacrerai mon énergie à mes seules performances. Je ferai parler mes jambes. Je reviens de loin. Si j’atteins la finale de l’EURO de Munich, je rigolerai bien.

Vous estimez-vous soutenu par la Belgique?

On ne reconnaît ses amis que dans l’adversité. Mais il est normal qu’on ne s’occupe plus de vous quand vous ne faites plus partie de l’élite. J’ai disputé toutes les finales possibles et imaginables, j’ai gagné quelques médailles. Avec un palmarès pareil, allais-je mendier?

Vous vous êtes isolé en vous entraînant à Londres, non?

Je voulais vivre quelque chose de différent. Mon suivi me préoccupait depuis longtemps. Après Sydney, j’ai fait le point. J’ai toujours gaspillé beaucoup d’énergie: tout organiser moi-même, me déplacer pour m’entraîner, etc. Au moment suprême, je manquais de fraîcheur. Avant, je passais deux heures dans l’auto pour aller à Amsterdam; maintenant, je suis à un quart d’heure de la piste. Tout est parfaitement réglé. L’approche de Mike McFarlane, lui-même un brillant sprinter en son temps, n’est pas tellement différente mais je me trouve dans un environnement plus compétitif, avec des gens de l’accabit de Dwain Chambers qui a déjà couru cinq fois en dessous des dix secondes.

Pour réussir en sprint, il faut s’expatrier. La plupart des athlètes belges pensent tout savoir ou croient que c’est le cas de leur entraîneur. Après le Mondial, Kim Gevaert a discuté avec moi. Elle s’entraîne régulièrement à Londres, maintenant. Prendre une telle initiative à 23 ans, c’est formidable! Ça prouve qu’elle vise plus haut que le niveau belge. Son sacre européen en salle sur 60 mètres est important, surtout mentalement. Nous saurons mieux ce qu’elle vaut vraiment au terme de l’été.

Nsenga a craqué

Jonathan Nsenga n’a pas tenu longtemps en Angleterre.

Il a eu des problèmes avec la Ligue francophone et se réentraîne avec son ancien coach. Je crois qu’il est sur une voie de garage. Un athlète doit assumer ses responsabilités. Il est payé pour vivre professionnellement, 24 heures sur 24, sept jours sur sept. C’est une mentalité qui se travaille. Il s’est entraîné ici jusqu’en mars. En mai et en juin, deux mois pourtant cruciaux, on ne l’a guère vu. McFarlane n’était pas content. Certaines obligations, comme les interclubs belges, ne sont pas aussi importantes quand on vise haut.

Et vos objectifs?

L’EURO, le Mondial et les Jeux Olympiques. Beaucoup de gens me pensent fini. Je veux rectifier le tir. Ceux qui me voient m’entraîner me demandent parfois si on m’a implanté un tendon bionique! Je réponds toujours que l’année prochaine, je me fais refaire l’autre.

De quoi êtes-vous encore capable à 34 ans?

Depuis deux ans, le 200 accuse le coup sur le plan mondial. Je vais essayer de retrouver mon meilleur niveau et voir ce que j’atteins avec mes 20.19. Les athlètes sont plus costauds qu’avant mais aussi plus lents. Michael Johnson ou Frankie Fredericks c’était autre chose que Maurice Greene ou Ato Boldon. Si l’évolution actuelle se poursuit un an et que je retrouve tous mes moyens, je serai mieux classé qu’avant.

Avez-vous atteint vos limites?

Aucune idée. Merlene Ottey a battu son record à 36 ans, après cinq JO. Elle a établi un record du monde en salle sur 200 m à l’âge de 34 ans. Il y a de l’espoir! (il rit) Votre motivation, la manière dont vous vous soignez et votre talent comptent beaucoup. Je n’aurai pas de problème tant que je serai en bonne santé. Je ne veux quand même pas m’acharner. Si je ne descends plus sous les 21, le BLOSO donnera son argent à quelqu’un d’autre! Mais on ne doit pas me mettre sur la touche tant que je reste plus compétitif que la plupart des autres. Malgré mon âge et ma situation familiale…

Inge Van Meensel, ,

« Merlene Ottey a établi un record du monde à mon âge »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire