Sterchele 007 a finalement décidé d’être le jeune premier de Bons baisers de Bruges

The End : c’était la dernière séance, on peut chiffonner le dernier seau de pop-corn. Le feuilleton de l’été a tenu les médias en haleine jusqu’à jeudi passé quand le rideau est tombé. Avec sa dégaine à la Sean Connery et une malice comparable à celle de Roger Moore, François Sterchele a tourné tous les films en même temps : Docteur No, Opération Tonnerre, Les diamants sont éternels, etc. Il était partout d’Anderlecht à Bruges, en passant par Heerenveen et le Standard, toujours rusé, moqueur, flingueur, ferme et imprévisible.

Ce joueur de poker a occupé toute la scène en ne laissant que quelques répliques aux seconds rôles. La Palme d’Or du Festival de la D1, c’est lui. Son étoile brille plus que les autres dans le ciel d’une campagne de transferts qui serait trop terne sans la rage acheteuse du Club Bruges. Il faut un portefeuille épais quand on ne fait pas ses courses dans les hard discounters du foot. Il y a un an, Bruges a dépensé quatre millions d’euros pour acheter Koen Daerden (la chute de sa cote est digne du crash boursier de Wall Street en 1929) et Sterchele vient de quitter le Germinal Beerschot en échange de trois bons millions, etc.

Même s’il en rêvait, le Standard n’a pas pu suivre les Flandriens dans leur désir de s’offrir ce baroudeur qui gagnerait 850.000 euros par an. C’est le troisième succès brugeois face aux Liégeois en peu de temps : Coupe, retour de Karel Geraerts, acquisition du meilleur buteur de D1. L’équipe du président D’Hooghe se pose désormais en challenger numéro 1 d’Anderlecht dans la course au titre. Le toubib doit pousser un fameux ouf de soulagement. Il a opéré plus d’une fois son club ces derniers mois (départs de Jan Ceulemans, Marc Degryse, Emilio Ferrera) et la fièvre de cheval est tombée. Bruges respire l’opulence comme au 15e siècle quand un riche marchand déboursa 400.000 couronnes d’or pour payer la rançon du dernier compte de Flandre, Jean sans Peur. Les notables de cette ville étaient d’excellents commerçants. Leurs descendants ne sont pas moins madrés.

Derrière le nouveau directeur technique, Luc Devroe, Michel D’Hooghe a bien tissé sa dentelle comme le prouve son agenda de la semaine passée. Bruges officialise la venue de Sterchele. Deux jours plus tard, un grand quotidien néerlandophone publie un magnifique reportage consacré à D’Hooghe et à son épouse en vacances à la mer. Puis, points d’orgue : fan day le samedi et présentation, le lendemain, du Roi François à la presse avant le match de gala des Matines Brugeoises. Du grand art. Le docteur D’Hooghe connaît le monde du foot sur le bout de son stéthoscope.

Les Liégeois ont opté pour une autre politique en misant sur la formation. Il y avait des choix à faire : le Standard était amoureux de Sterchele mais ne pouvait pas investir une fortune dans la réalisation de l’Académie Robert Louis-Dreyfus et vider ses poches pour transférer Sterchele. Quand on voit le solide Marouane Fellaini et le magnifique Axel Witsel à l’£uvre, on mesure que le Standard a pris un autre cap que celui de Bruges. Cette politique et ce souci de former des jeunes tranchent avec les grosses dépenses des Brugeois pour acheter des noms. Qui tient le bon bout ? Lequel de ces deux clubs qui se regardent en chiens de faïence aboiera de bonheur en fin de saison ? D’Hooghe ou Luciano D’Onofrio ?

Le transfert de l’année ne se pose pas ces questions. Sterchele 007 a finalement décidé d’être le jeune premier de Bons baisers de Bruges. Il devra confirmer et être à la hauteur de grosses productions après s’être révélé à Charleroi et au Kiel. Quel magnifique destin : il y a trois ans, avant que les Zèbres le repèrent à Louvain, la valeur financière du canonnier liégeois ne dépassait pas trois sous. Sa réussite fait penser à celle des frères Dardenne. Ces cinéastes disposaient de budgets maigrichons au début de leur carrière : cela ne les a pas empêchés de marquer deux fois à Cannes. Sterchele vient du pays de Rosetta : est-ce le secret de sa réussite ?

PAR PIERRE BILIC

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