Stas’ en Bundesliga!

Mönchengladbach revient en D1. Avec un ancien Anderlechtois.

Impressionnés, Peter Van Houdt et Stéphane Stassin, les deux Belges du club, longent la tribune principale du Bökelberg, ornée de posters géants du Onze du Siècle élu par les supporters du Borussia Mönchengladbach. Stassin plaisante: « L’année prochaine, nous en ferons partie. »

Ils ont leur part dans le retour du Borussia en Bundesliga mais il en faut davantage pour figurer parmi cette palette. A côté de l’entraîneur mythique, Hennes Weisweiler, on trouve le portrait de plusieurs monuments du football allemand, comme le flamboyant Günter Netzer, Berti Vogts, Jupp Heynckes et le Danois Alan Simonsen. Mais pas de Lothar Matthäus, qui a entamé sa carrière à Mönchengladbach avant de rejoindre le Bayern. Un club qui peut se permettre de bouder une telle figure ne manque pas de références… Par contre, on trouve la dernière grande idole du Bökelberg, Stefan Effenberg, dont le second départ -il avait déjà rejoint le Bayern puis la Fiorentina avant de revenir en 1994- a signifié la fin de Mönchengladbach, qui a été relégué la saison suivante pour la première fois depuis son accession à la Bundesliga, en 1965.

Le Borussia n’a pas été à la fête pendant ses deux saisons à l’étage inférieur mais les autres pensionnaires de D2 s’en sont frotté les mains: après le Bayern, Mönchengladbach demeure le club qui compte le plus de supporters en Allemagne. Partout où il se produit, il fait le bonheur du trésorier: les supporters locaux veulent voir l’ancienne gloire, et les fans qu’il compte partout se joignent à ceux qui effectuent le déplacement pour remplir le stade. Avec une assistance moyenne de 24.000 personnes, le Borussia laisse les autres clubs loin derrière lui, même s’il a souvent joué le lundi, à cause des retransmissions en direct. Et il a disputé ses derniers matches à guichets fermés: 34.000 personnes.

Ces chiffres ne peuvent toutefois assurer la survie de Mönchengladbach, même si l’enveloppe des droits TV va doubler grâce à sa promotion. Le stade est chaud, sans piste d’athlétisme, mais aussi vétuste. Il y a plusieurs années, le club avait imaginé bâtir une arène plus moderne, semblable à celle de l’Ajax. Faute de moyens, il avait dû y renoncer. Il a mis sur pied un projet plus modeste qui lui permet de poser sa candidature pour la Coupe du Monde 2006. Le financement de 2,6 milliards est bouclé. Le stade de 40.000 places et business-seats sera prêt au printemps 2004 et le club y emménagera la saison suivante. D’ici là, s’il devait renouer avec la Coupe d’Europe, il devrait déménager car le Bökelberg ne comporte que 8.700 places assises couvertes. En 1995 déjà, victorieux de la Coupe d’Allemagne, il avait dû livrer son duel contre Feyenoord à Düsseldorf, et partir au FC Cologne pour affronter Arsenal.

Le plus grand défi de Mönchengladbach est de tempérer les attentes des supporters. Il ne peut entamer la saison en simple pensionnaire de Bundesliga. Son passé le lui interdit. Las, l’argent fait défaut. Il n’a que 160 millions de francs à dépenser en transferts, suite au plan de redressement que la direction s’est imposé. Sa chute a commencé sans crier gare. En 1996, le Borussia était toujours la troisième puissance du championnat, après le Bayern et Dortmund. En 1998, avec Effenberg, il a assuré son maintien lors de la dernière minute du championnat! La commission des licences, qui exerce un contrôle budgétaire extrêmement strict en Allemagne, lui a imposé un assainissement. Confronté à une dette de 600 millions, le Borussia a vendu Effenberg au Bayern. La relégation était devenue inévitable mais elle a eu un effet positif: deux ans plus tard, la dette ne s’élève plus qu’à 100 millions. Elevé selon les normes de la D2, le budget de Mönchengladbach sera un des plus modestes parmi l’élite allemande.

Stéphane Stassin était en fin de contrat à Anderlecht, l’année dernière, et donc gratuit. Il avait la possibilité d’aller à Charleroi, Charlton et Aberdeen, mais il a signé au Borussia dès le mois de mars, alors que le club pouvait encore viser la promotion. « Après quatorze ans à Anderlecht, je ne voulais pas trop m’éloigner, ne serait-ce que pour des raisons familiales. J’ai eu quelques problèmes d’ordre privé et je ne voulais pas m’exiler à l’autre bout de l’Europe. Mönchengladbach n’est pas trop loin et c’est un bon club. Une transition idéale si je veux vraiment m’imposer à l’étranger dans quelques années. En outre, l’entraîneur me voulait absolument. Je n’estime pas avoir accompli un pas en arrière en évoluant en D2 allemande car elle vaut plus que la D1 belge. Et maintenant que nous sommes promus, j’accomplis un fameux pas en avant. »

L’équipe n’a connu qu’un seul off-day, à Mannheim. Elle s’est aussi inclinée logiquement à Nuremberg. Stassin: « Trois clubs émergeaient: Mönchengladbach, Nuremberg et Sankt-Pauli. Ça ne veut pas dire qu’on gagne facilement. On joue moins tactiquement mais plus physiquement. C’est un combat à l’usure, homme contre homme. Pas vicieux. Les duels sont rudes mais moins méchants qu’en Belgique. Les arbitres sortent vite leurs cartons jaunes. Anderlecht construisait le jeu à partir de la défense. Ici, on me regarde de travers si je vais demander le ballon en défense. Plusieurs fois, Peter, bien isolé, a appelé la balle, en vain car les autres ne l’avaient pas vu. Quand je joue, j’essaie de lui adresser de longs centres mais l’entraîneur m’a souvent préféré des joueurs plus physiques, et il m’alignait en dernier recours. »

Stassin évolue dans l’axe de l’entrejeu. « L’entraîneur pensait d’abord m’aligner dans l’axe de la défense, comme en Belgique. Mais ici, ce poste est occupé par deux stoppeurs, en fait, qui jouent sur l’homme. Ça ne me convenait pas. On presse davantage l’homme et le ballon alors qu’en Belgique, on redescend en perte de balle. »

Van Houdt et Stassin habitent un appartement proche du stade, en ville. A cause du problème linguistique, Stassin avait d’abord imaginé s’établir à Liège et effectuer la navette, mais il s’est laissé convaincre et a déménagé, même s’il ne parlait pas un mot d’allemand.

« Je l’apprends maintenant, à raison de deux heures par semaine. Du moins jusqu’il y a peu car le professeur a décrété que je maniais assez bien la langue. Ici, les gens respectent votre vie privée. En Belgique, on vous critique bien plus. Ce que vous dites, ce que vous faites… Le groupe des joueurs est très soudé. Tout le monde est content quand on gagne. A Anderlecht, les réservistes étaient ravis quand l’équipe perdait. On parlait dans le dos des gens. Pas ici. C’est peut-être différent pour Peter, qui a connu les Pays-Bas, mais je trouve que tout est mieux organisé. A Anderlecht, nous sortions une fois par an. Ici, c’est plus régulier. Tout le monde vient, y compris les femmes. S’il y a un problème, le club le règle. On ne vous renvoie pas d’un responsable à l’autre. »

Il n’y a pas de vedettes à Mönchengladbach: au fanshop, les vareuses de Stassin et de Van Houdt côtoient, sur le présentoir, celles du meilleur buteur, Van Lent, et du gardien, Uwe Kamps, un monument qui totalise plus de 400 matches de Bundesliga avec le Borussia. Hans Meyer, l’entraîneur, est le plus populaire.

Stassin: « Nous sommes applaudis dès que nous foulons la pelouse, mais quand les supporters aperçoivent l’entraîneur, ils scandent son nom. Ils sont fous de lui. Je n’avais jamais vu ça. »

Geert Foutré, envoyé spécial à Mönchengladbach

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire