SPÉCIALISTE en déménagements

Le grand Camerounais d’1m96 a signé des débuts fracassants à Mons qu’il a rejoint après un voyage mouvementé.

Mons est une nouvelle fois retombé sur terre, une semaine après son carnaval offensif face au Lierse (4-1). Dans le derby hennuyer, les Dragons se sont inclinés sur un coup franc de Loris Reina dévié dans son propre but par Ivan Milas. Pourtant, l’air du Pays Noir leur a mieux convenu que celui iodé de la côte ostendaise où ils avaient sombré.

Leur défaite dans la cité carolorégienne ne doit pas les faire rougir. Car tant Jean-Pierre La Placa que Nicolas Goussé auraient pu donner à cette rencontre une autre tournure. Dans un match fermé qui a sacré les défenses, les avants montois n’ont pas eu l’espace qu’ils désiraient. Une semaine après son entrée en fanfare dans notre compétition, Jeremie Njock, 25 ans, n’a pu réitérer son exploit. Pas de buts mais une grande débauche d’énergie.

Jeremie Njock : On a éprouvé plus de difficultés que face au Lierse. L’organisation de Charleroi ne nous a laissé aucune possibilité de profondeur. Pourtant, on a tenu le coup et on s’est ménagé quelques occasions mais cela n’a pas suffi. On peut parler de défaite positive car on a vu que l’on méritait mieux que notre classement. Et quand on accroche l’équipe qui occupe la quatrième place…

Tu n’as pas réussi à percer cette défense. Comment l’expliques-tu ?

Mons n’a pas joué selon son style. On a balancé trop souvent de longs ballons vers l’avant. Je suis grand mais ce n’est pas en cherchant sans cesse ma tête que l’on s’en sortira. Jos Daerden a essayé de recadrer l’équipe à la mi-temps en disant que l’on devait revenir au jeu court. Cela a mieux fonctionné en deuxième mi-temps mais le but nous a coupé les jambes. Il ne nous a plus permis de construire.

Quel était donc ce  » style montois  » auquel tu fais référence ?

A Craiova, tout le jeu était axé sur moi. On procédait par de longs ballons et je servais de pivot et de remiseur pour mes partenaires. Mais une fois que la défense parvenait à me canaliser, c’était toute l’équipe qui boitait. A Mons, le système me convient mieux. Tout le monde est en mouvement, ce qui me permet d’utiliser d’autres arguments que ma tête. Je suis à Mons pour progresser dans tous les secteurs. Ici, il faut créer les espaces et en bougeant sans cesse, on aide nos coéquipiers qui peuvent alors profiter du travail des attaquants. Ainsi, je me retrouve parfois sur le côté sans que l’entraîneur ne trouve à redire. A ce moment-là, c’est quelqu’un d’autre qui prend ma place dans l’axe. C’est de cette manière que cela a fonctionné avec Nicolas Goussé. Durant toute la semaine, on a travaillé nos automatismes à l’entraînement. Il sait tout faire tant sur le plan physique que tactique.

Tu parles d’autres qualités que ton jeu de tête mais cela reste tout de même ton point fort, non ?

J’avais lu dans un journal que je devais encore perfectionner cette arme mais c’est surtout le reste que je dois améliorer. Ainsi, sur huit buts inscrits pour Craiova au premier tour, j’en ai mis cinq de la tête. Cependant, je ne veux pas me focaliser là-dessus. Je suis un guerrier, j’aime bouger et ne pas simplement rester dans la surface à attendre qu’un centre arrive sur ma tête. Si celle-ci ne va pas, alors le pied peut prendre le relais. Je sais également faire la dernière passe s’il le faut.

Tu viens de disputer ton deuxième match d’affilée après deux mois d’arrêt…

Cela fait du bien. Je suis resté dans l’ombre à cause de la trêve et de mon problème d’affiliation. Je suis arrivé à Mons le 6 janvier mais Craiova a bloqué mon transfert. Quand j’ai été affilié, j’ai profité de la blessure de Datti pour faire mes débuts. Physiquement, je suis au point. Le match de Charleroi fut d’autant moins pénible pour moi que le terrain était moins lourd qu’à Mons.

Pourtant ce terrain lourd t’a bien convenu. Premier match, deux buts. Ce n’est pas donné à tout le monde !

Dans tous les clubs où je suis passé, j’ai inscrit un but lors de mon premier match. Jamais deux. Maintenant, je me lance un nouveau défi : réussir un hat trick. Je n’ai jamais réalisé cela en match officiel.

Tu as abouti à Mons après un véritable périple…

J’ai quitté le Cameroun à 19 ans en 1999. Quelqu’un m’avait repéré et je suis parti en Suisse à Nyon. Ce fut un vrai dépaysement. Pour la première fois, je découvrais la neige. Mais ce qui m’a le plus surpris, ce fut de voir que l’on continuait à jouer au foot qu’il pleuve ou qu’il neige. Au Cameroun, dès qu’il y avait une averse, tous les matches étaient annulés. Nyon faisait partie de la D2 et n’était donc pas un club professionnel. Il n’y avait que trois entraînements par semaine. Mais comme j’avais accumulé un certain retard de condition, je m’entraînais seul les jours de congé.

Alors que Nyon devait t’ouvrir les portes d’autres clubs européens, tu es parti vers le Qatar…

A l’époque, je ne connaissais pas les rouages du foot pro. J’ai fait confiance à mon conseiller de l’époque qui m’a conduit au Qatar alors que j’étais en train de passer un test au FC Zurich. Je ne pensais pas qu’il s’agissait d’un pas en arrière. Je voulais simplement progresser. Là-bas, j’ai retrouvé le soleil, un pays bien organisé, des équipes ambitieuses qui se dotaient de moyens pour y arriver. J’ai marqué 14 buts en 22 matches pour Al Arabi. Ce fut ma saison la plus prolifique. Il n’empêche : après une année, j’ai compris que je ne pouvais pas atteindre mes objectifs. Je voulais rentrer en Europe mais mon manager m’a dit que passer par le Maroc m’ouvrirait les portes du championnat de France. Je suis donc parti pour le WAC Casablanca où je suis resté trois mois.

Et là, tu comprends que tu dois te séparer de ton manager pour retourner en Europe…

Oui. J’ai suivi un passionné du foot qui m’a conseillé d’aller tenter ma chance au Stuttgart Kickers. Ce club évoluait en D2 allemande. Pendant six mois, je n’ai pas pu jouer car j’étais toujours affilié au Qatar. Vous voyez, avant Mons, j’ai déjà été transféré dans un club que je n’ai pas pu aider pendant six mois…. Je suis arrivé en Allemagne en janvier et je n’ai pu jouer avec Stuttgart qu’en été. Entre-temps, le club était descendu d’un échelon. Pourtant, c’est là-bas en D3 que j’ai découvert le professionnalisme. Le club était bien structuré et on disposait de sept séances d’entraînement par semaine. Au départ, tout allait bien. J’étais titulaire. Mais, quand un nouvel entraîneur est arrivé, j’ai vite été oublié. Je ne m’entendais pas avec le nouveau coach. En 2002, je me suis pris un nouveau manager qui m’a conduit à l’aube de la saison 2002-2003 en Roumanie.

Et c’est là que tu prends ton essor ?

Finalement, j’aboutis à Uta Arat, un petit club de D1. L’équipe venait de monter et avait perdu ses cinq premières rencontres. Il a commencé à gagner à partir de mon arrivée. Cependant, nous n’avons pas réussi à nous sauver. Mais comme j’avais inscrit pas moins de 10 buts en 23 matches, je m’étais fait remarquer par d’autres clubs. J’avais été élu deuxième meilleur étranger du championnat derrière Manu Godfroid. A ce moment, cela ne me déplaisait pas de rester encore un peu en Roumanie. Il s’agit d’un pays accueillant, qui respire la chaleur de vivre. Il n’y avait que le froid pour me déplaire mais j’ai fini à m’habituer. Je n’avais pas vraiment le choix. Car là-bas, quand c’est l’hiver, c’est vraiment l’hiver ( il rit).

Et tu optes alors pour Craiova…

C’était une équipe réputée d’où sont sortis des joueurs comme Gica Popescu, Cristian Chivu ou Marius Mitu. Lors de la première saison, j’ai répondu aux attentes et j’ai même décroché mon ticket pour la sélection olympique du Cameroun qui a remporté les Jeux Africains d’Abuja en 2003. Malheureusement, nous avons échoué dans la course pour les Jeux Olympiques d’Athènes.

Mais pourquoi la seconde saison tourne-t-elle mal ?

Même quand les résultats suivaient, les entraîneurs se succédaient. En un an et demi, j’ai connu sept entraîneurs différents. A Craiova, un coach était limogé après deux défaites. Même Mircea Rednic, qui a joué au standard, devait plier bagage après sept rencontres. Malgré cela, la première saison, nous avons terminé à la quatrième place juste derrière les qualifiés européens. Comme je voulais arracher une sélection en équipe nationale A, je savais que cela passait par un autre championnat. Rednic ne voulait pas me lâcher et c’est pour cette raison que je suis encore resté une demi-saison. Sous les couleurs de Craiova, j’ai totalisé 19 buts en 37 matches.

Et qui t’a aiguillé vers la Belgique ?

C’est Rubinelson, l’ancien attaquant du RWDM. Il avait joué avec moi sous les couleurs de Craiova et m’a orienté vers le championnat belge en me disant qu’il devrait me convenir. J’ai noué contact avec Mark Talbut qui s’est déplacé pour me juger lors de la rencontre contre le Dinamo Bucarest.

Tu as failli terminer en Angleterre. Pourquoi as-tu choisi la Belgique ?

Au départ, Talbut pensait m’envoyer vers le championnat anglais. Mais Mons s’est montré intéressé. Le club avait visionné une cassette. Puis Michel Wintacq et Jos Daerden se sont déplacés le 1er décembre pour me voir. Il s’agissait du dernier match du premier tour. Deux jours plus tard, Talbut m’envoyait à… Bolton. J’y suis resté trois semaines et j’ai même disputé un match amical avec les Wanderers. Mais le manager du club, Sam Allardyce, voulait me prêter à un club de First Division. Durant tout mon séjour en Angleterre, Jos Daerden n’a pas arrêté de m’appeler en disant que si cela capotait avec Bolton, je pouvais rejoindre Mons. Le 6 janvier, je débarquais en Belgique pour signer un contrat de deux ans et demi.

Autant de pays visités à seulement 25 ans et alors que tu as débuté le football sur le tard…

Je jouais encore dans les rues de Yaoundé à 17 ans quand mes amis m’ont dit que je devais tenter ma chance. J’ai fait mon sac et j’ai alors quitté ma famille pour partir à l’ouest du pays à la recherche d’un club. C’est dans cette région que j’avais le plus de chance d’en trouver. J’ai débuté en D2 chez les Aigles de Dschang avant de monter en D1 au Sosucam Dembanjock. Désormais, j’aimerais poser mes valises. J’aime ce club et sa façon de jouer. Je suis ici pour un petit temps…

Dans l’optique de l’équipe nationale ?

Je pense qu’il existe encore une place à pourvoir aux côtés de Samuel Eto’o. A moi de m’en montrer digne…

Stéphane Vande Velde

 » En Roumanie, j’ai été élu deuxième meilleur étranger derrière MANU GODFROID « 

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